- C1
- 8es
- Bayern-PSG (2-0)
Didier Domi : « On a trop voulu trouver Mbappé à tout prix »
Latéral gauche formé au Paris Saint-Germain et passé par le club de la capitale de 1994 à 1998, puis de 2001 à 2003, Didier Domi analyse l’élimination du PSG face au Bayern (2-0).
C’est vrai que le Bayern a été supérieur, même si je pense que le PSG a fait deux bonnes mi-temps sur cette double confrontation : la deuxième à l’aller avec l’entrée de Kylian, et la première mi-temps, ce mercredi soir, notamment sur le plan de l’organisation tactique. Paris n’a pas concédé énormément d’occasions, et c’est vraiment dommage que Vitinha ne marque pas avant la pause. Il aurait fallu tirer un peu plus fort et plus près du poteau. C’est ce genre de micro-événements qui changent le cours d’un match, mais le constat global c’est que Paris doit être plus consistant. Dans l’ensemble, le Bayern a été plus convaincant, percutant physiquement, plus incisif. Et puis, ils ont marqué ! Ce que Paris n’a pas fait. J’ai senti plus de maturité, une plus grande profondeur de banc aussi.
Tu ne peux pas continuer à jouer aussi haut à cause de ça, c’est un fait. On en revient à la profondeur de banc, qui n’était pas celle du Bayern ce soir, mais aussi aux performances des joueurs cadres de chaque équipe. Dans leurs temps forts, les leaders du Bayern ont été meilleurs, et c’est ce qui a fait la différence. Tu as toujours besoin de tes grands joueurs pour faire pencher la balance en ta faveur, marquer un but de raccroc. Quand Leon Goretzka et Joshua Kimmich ont accéléré le tempo en deuxième mi-temps, ça a fait mal à Paris.
C’est physiquement et tactiquement qu’ils ont pris l’ascendant. Ils ont joué plus haut, et là-dessus, tu peux faire un parallèle avec la première période : ils n’avaient pas tellement pressé Gianluigi Donnarumma, là où Paris au contraire avait été bon, on en revient notamment à l’erreur de Sommer qui n’a pas été sanctionnée où tu avais Mbappé, Achraf Hakimi et Vitinha autour de lui. Ça avait alors énormément embêté le Bayern. La différence, c’est que Paris manque de constance dans la performance, physiquement au milieu de terrain. À cause de la fatigue, alors que l’équipe court après le score, elle recule. À l’inverse, le Bayern avance, et sur le but de Choupo-Moting, tu as un losange de pressing autour de Marco Verratti. Bon, après, sur cette séquence, il faut à un moment donné savoir mettre une mine devant car tu sens que le pressing arrive. Quand je regarde Arsenal, quand ils sentent que la pression est trop forte, boum, ça envoie loin devant, Aaron Ramsdale, il n’hésite pas. C’est l’Allemagne : elle pêche derrière, devant car elle n’a plus de buteur, mais au milieu, attention. Souviens-toi d’Espagne-Allemagne à la Coupe du monde, ce sont des rouleaux compresseurs, techniquement ça sort de la pression, très intelligents, ça s’adapte et surtout, ils ne renoncent jamais. Ils peuvent souffrir comme là, en première période, et revenir fort après, tandis qu’à Paris, les lignes se sont délitées sous la pression, moins de courses, moins d’impact, et au plus haut niveau, ça se paye cash.
Le PSG actuel est une équipe qui n’a pas vraiment de vitesse au milieu de terrain. Les trois milieux alignés ce soir, que sont Marco Verratti, Vitinha et Fabian Ruiz, ne sont pas des milieux dynamiques. C’est dommage de ne pas en avoir un comme Musiala qui, quand Kylian Mbappé n’est pas là, soit capable de sortir de la pression et puisse éliminer un ou deux joueurs afin d’amener un peu plus de chaos. Le PSG n’a pas ce joueur-là. Ensuite, le Bayern a extrêmement bien muselé Messi qui n’était par ailleurs pas très inspiré. Quand tu as la vitesse de Mbappé, il y a trois choses pour défendre contre ça : la première, c’est de prendre 2-3 mètres d’avance, la seconde c’est de le prendre à deux ou à trois au marquage et ensuite la dernière, c’est de couper tout à la source. C’est cette troisième solution qui a parfaitement fonctionné. Autre chose, aussi : on a trop voulu trouver Mbappé à tout prix. Souvent, avec une meilleure prise de décision, la solution était à l’opposé. Vers la 21e, on veut trouver Mbappé à droite, alors que Nuno Mendes est tout seul. Même chose sur une autre situation avec Fabian Ruiz, il y a eu un gros déchet dans la prise de décision par le fait d’être obnubilé à trouver Mbappé. Comme lui, sa force, c’est de réussir à occuper 2-3 joueurs, il y avait des boulevards sur l’autre côté, et comme ça se joue sur des détails ces matchs-là, c’est dommage de ne pas avoir fait les bons choix.
Annoncé, jamais, car le foot réserve toujours des surprises. Mais quand même : le foot de haut niveau, c’est de la concentration et beaucoup de détails. 1% + 1% + 1% suffisent parfois à faire la différence. Les petits détails qu’on vient d’évoquer, des blessures de Marquinhos et Mukiele à la profondeur de banc, voilà tout ce qui fait que le PSG ne se qualifie pas en quarts, tout simplement.
Par le passé, Mbappé ou Messi ont su le faire. Mais ce soir effectivement, ça n’a pas été le cas. Ils sont dépendants d’une certaine dynamique, notre milieu a énormément flanché. Quand tu parles de milieu de terrain et de profondeur de banc, parfois c’est de là que vient l’étincelle. Hormis Warren Zaïre-Emery qui a fait le jour de ses 17 ans une bonne petite entrée, il n’y a pas eu ça. Cette consistance et cette régularité à amener le ballon plus haut, elle sert à aider certaines stars en mal d’inspiration. Une star a toujours une grande équipe derrière elle, toujours des milieux qui amènent le ballon dans les meilleures dispositions. Ce n’était pas le cas ce soir. Quand en face, tu vois Sané, Mané, Gnabry entrer… Même s’ils avaient eu des problèmes, il y avait des solutions avec une expérience et un vécu européen très important.
Il faut avoir un milieu qui fait des courses, une aptitude à casser les lignes, à éliminer un ou deux joueurs. Un leader technique et physique à la fois. Quand je vois Musiala et Goretzka, ils sont forts, ils sont rapides. Tu n’as pas besoin d’être grand ou costaud, il faut du dynamisme avant tout. Il faut un milieu de classe mondial. Autre point : quand le PSG n’aligne pas les trois stars devant, il y a beaucoup plus d’équilibre, du moins en Ligue des champions. Enfin, il faut ramener une autre profondeur de banc avec beaucoup plus de maturité.
Propos recueillis par Andrea Chazy