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- Finale
- PSG-OL (0-0, 6-5 tab)
Didier Domi : « Ce n’est pas facile de remettre le 4-3-3 en route »
Latéral gauche formé au Paris Saint-Germain et passé par le club de la capitale de 1994 à 1998, puis de 2001 à 2003, Didier Domi analyse la victoire parisienne en finale de la Coupe de la Ligue face à Lyon (0-0, 6 t.a.b. à 5). Et selon lui, Paris a des enseignements à tirer de cette rencontre en vue de son quart de finale de Ligue des Champions contre l'Atalanta, le 12 août prochain.
Thomas Tuchel expliquait qu’il ne pouvait pas « préparer l’Atalanta car aucune autre équipe ne jouait pareil » . Y-a-t-il néanmoins des enseignements à tirer de l’état actuel de son PSG après cette finale remportée face à l’OL ? D’un point de vue physique, jouer des matches à haute intensité est le seul véritable marqueur. Le PSG n’en a eu que deux, contrairement à l’Atalanta qui a enchaîné pendant un mois mais qui a quand même pu faire beaucoup tourner après avoir acquis sa qualification en Ligue des Champions. Le premier enseignement, c’est que le PSG n’arrivera pas à 100% le 12 août. Même si au niveau de la fraîcheur mentale, Paris sera peut-être meilleur car lorsque tu joues tous les trois jours avec d’importants protocoles dû au Covid-19, les déplacements… C’est lourd. Mais physiquement, les Bergamasques seront au-dessus. Car ils auront effectués beaucoup plus de courses à haute intensité. Au haut niveau, après le talent, l’intensité des courses et l’efficacité dans les deux surfaces sont les deux facteurs qui priment. Le deuxième enseignement, c’est le changement tactique.
Le PSG n’aura probablement pas Kylian Mbappé, tandis qu’Ángel Di María sera suspendu. Tuchel va donc devoir passer en 4-3-3. Ce n’est pas facile de remettre ce système en route, d’autant que son équipe a des repères en 4-4-2 et une importante fluidité dans le jeu. Ce n’est pas étonnant si on a observé un Neymar orphelin ce soir. Heureusement qu’il avait Marco Verratti pour ressortir le ballon.
Est-ce directement lié au très faible apport offensif des latéraux parisiens, qui n’ont pas permis – via leurs déplacements – la création de décalages ?Quand tu es un latéral moderne et qu’on te demande d’utiliser la largeur, ce n’est pas forcément pour toi. C’est principalement pour deux raisons. Déjà, face au 3-5-2 lyonnais de ce soir par exemple, ça te sert à faire reculer Léo Dubois et Maxwell Cornet. Ensuite, quand on demande à un latéral d’élargir, c’est pour trouver des chemins à l’intérieur. Ce soir, il y avait énormément de densité au milieu et c’est vrai que ça a été très handicapant que Mitchell Bakker et Layvin Kurzawa ne soient pas plus haut dans la préparation des actions. On ne parle même pas de montées ou de débordements, juste de positionnement. Cela aurait permis d’aérer le jeu du PSG.
On l’a vu ce vendredi soir, et ça ne date pas d’hier, Icardi était plutôt esseulé et exclu de la relation technique avec Neymar. C’est dû à la période ou c’est aussi tactique ?Un peu des deux. Quand il est à deux, ça va, car il peut rester devant et c’est davantage Mbappé qui va décrocher. Mais en 4-3-3, où il est la seule pointe, là, c’est problématique. Personne ne lui demande d’enchaîner les courses comme Edinson Cavani, on lui demande juste de devenir par intermittence un relais technique. Et il en est capable ! Par exemple, en faisant deux-trois mètres en décrochage pour servir de relais à Neymar. En 4-3-3, on a un peu plus besoin de lui comme relais. Face à Lyon, on l’a vu une ou deux fois dans le rond central tenter de lancer Di María. Même s’il rate, ce n’est pas grave. Dans le 4-4-2, c’est devenu une habitude de voir Neymar trouver Mbappé qui venait de décrocher. Contre l’OL, Ney a tenté plusieurs fois de toucher Icardi mais sans succès. Ça, c’est un problème.
Ce n’est pas dangereux de n’avoir qu’une seule relation technique forte (Neymar-Verratti) à onze jours d’une échéance aussi importante ?Ça ne date pas d’aujourd’hui. C’était aussi le cas en 4-3-3 en début de saison. Je trouve que lorsque le PSG est passé en 4-4-2, on a tout de suite vu la différence. Paris est une équipe de techniciens, et de ce fait, se doit de toujours apporter du surnombre au milieu. C’est le cas lorsque Mbappé décroche, quand Di María rentre à l’intérieur. Là, Neymar a énormément de relais, ils fatiguent l’équipe adverse et ouvrent aussi les couloirs pour Juan Bernat et Thilo Kehrer.
Qu’est-ce que Tuchel aurait pu faire pour déstabiliser davantage le collectif lyonnais ?Quand les latéraux sont montés davantage en deuxième période, il y a eu du mieux. Disons qu’il aurait fallu que Di María rentre un peu plus dans le jeu. Quand Paris joue en 4-3-3, il est moins à l’intérieur comme peut l’être Neymar. Mais comme ils ont les mêmes qualités, je pense qu’il ne devrait pas hésiter à revenir plus souvent à côté de lui et former un sapin de Noël comme sous Ancelotti (le PSG évoluait alors en 4-3-2-1, ndlr). Avec l’absence de Mbappé, ça s’est encore plus vu qu’il était trop loin de Neymar pour combiner, d’autant qu’Icardi était aussi très absent. Quand on arrive en 4-3-3, avec les qualités que l’on a, Di Maria n’est plus un ailier à l’ancienne et devrait davantage revenir dans le cœur du jeu plutôt que de s’exiler sur son côté. Ça permettrait de mieux ressortir le ballon et de donner la possibilité aux latéraux de monter. Pour résumer : Di Maria était esseulé, Icardi trop passif, Kurzawa et Bakker ne donnaient pas la largeur… Dans ces conditions, c’est impossible de jouer.
Qu’est-ce qu’ils ont le temps de corriger d’ici le 12 août ?J’ai envie de revoir ce type de phases où, comme en début de match, Neymar, Di María et Icardi sortaient sur les trois centraux lyonnais. Car le plus important vient après. Vu que la sortie de balle se fait sur un côté, il faut que les latéraux parisiens suivent le pressing. Ça, Bakker l’a bien fait en début de rencontre, il était tout de suite au contact de Dubois.
Il faudra refaire cela défensivement, un peu comme contre Dortmund. Il ne faudra pas subir, presser plus haut et de façon agressive. Comme le fait l’Atalanta, finalement. Face à la Juve, les deux pistons allaient presser Juan Cuadrado et Danilo à la relance. D’où l’idée de faire jouer Paredes. On l’a vu contre Dortmund, c’est un mec qui met des coups, qui va au charbon et qui n’avait pas laissé respirer Witsel et Can. Techniquement, c’est le meilleur deuxième relais du PSG. Il faut que Tuchel mette de la densité au milieu pour combiner, pour ensuite permettre d’aller attaquer et de trouver la profondeur avec Icardi ou un autre.
Comment devrait, selon toi, évoluer le PSG face à la Dea ?Quand je regarde l’Atalanta, que je vois Papu Gomez, le gars qui va jouer avec Zapata ainsi que les deux sur les côtés, ils font un pressing bien précis. Gomez va sur le numéro 6, les deux attaquants sur les deux centraux et les deux joueurs de côtés sur les latéraux. C’est pourquoi je pense que, face à eux, il faudra Verratti mais aussi Leandro Paredes. En 4-3-3 comme ce soir, c’est parfois compliqué pour Marquinhos au milieu. Face à des équipes comme Manchester United, qui ne jouait pas trop au ballon, il est plus qu’utile. Mais l’Atalanta, quand ils commencent à presser, ils sont redoutables. C’est pourquoi il te faut des joueurs au milieu capables de jouer malgré la pression, d’y résister. Les deux, associés à Neymar quand il décroche, peuvent aider à casser cette première ligne pour ensuite attaquer cette défense et les mettre en danger. Je préférerais faire reculer Marquinhos avec Kimpembe derrière, et mettre dans le milieu à trois Gueye, Verratti et Paredes. Après, il ne faut pas rentrer dans un complexe d’infériorité. Si Verratti arrive à se retourner, que Neymar est trouvé derrière leurs deux milieux de terrain ou qu’Icardi et son compère d’attaque arrivent à fixer leurs centraux, il y aura des choses intéressantes à faire.
Propos recueillis par Andrea Chazy