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Didier Deschamps et la Juventus, une histoire d’amour inachevée

Par Denis Ménétrier
Didier Deschamps et la Juventus, une histoire d’amour inachevée

À l'occasion de la Ligue des nations, Didier Deschamps va faire son retour à Turin. Lors de la saison 2006-2007, le sélectionneur de l’équipe de France avait remis la Juventus sur les rails du succès après le scandale du Calciopoli et à l’issue d’une année passée en Serie B. Pourtant, Deschamps et la Vieille Dame ont divorcé en mai 2007, en raison de différends entre l’entraîneur et sa direction. Un départ qui a laissé des regrets de part et d’autre.

De retour en terrain conquis, quel type de comportement Didier Deschamps va-t-il adopter ? Le sélectionneur de l’équipe de France, qui va retrouver Turin avec les Bleus à l’occasion de la demi-finale de la Ligue des nations contre la Belgique, est-il du genre discret ou de ceux qui serrent un maximum de paluches ? Au moment d’annoncer sa liste jeudi dernier au siège de la FFF, DD a donné un premier élément de réponse : « Je vais revoir beaucoup de personnes que j’ai côtoyées qui sont toujours en activité dans ce club. Je considère la Juve comme ma deuxième maison. » Ce doux souvenir à Turin se lit dans les yeux de Deschamps, avant que son visage ne se ferme au moment d’évoquer la fin de sa collaboration avec la Vieille Dame, au terme de la saison 2006-2007 : « Je l’ai écourtée (l’aventure). Quand j’ai pris cette décision, ça me semblait être la seule et la meilleure. Maintenant, avec le recul, il est évident que ce n’était pas la meilleure décision que j’ai prise. »

Avec un peu plus d’expérience et de recul, j’aurais certainement agi différemment.

Après cinq saisons comme joueur (1994-1999), le passage de Deschamps sur le banc de la Juventus se résume à cette seule saison, alors que le club piémontais sortait progressivement la tête de l’eau, noyée dans les affres de l’affaire du Calciopoli. 43 matchs seulement, une promotion en Serie A, et des regrets pour toujours du côté de Deschamps. « Avec un peu plus d’expérience et de recul, j’aurais certainement agi différemment », confirmait le sélectionneur la semaine dernière, un rictus au bout des lèvres.

La patte à Dédé

L’idylle débute pourtant comme un scénario de film de Serie B. Après cinq saisons passées à l’AS Monaco et une année sabbatique, DD est, selon Alessio Secco, le directeur sportif de l’époque, l’homme de la situation. « À ce moment-là, c’était le bordel au sein du club, donc mon idée était de repartir en mettant quelqu’un qui avait une identité qui collait à la Juve, explique aujourd’hui Secco. J’avais croisé Didier quand il jouait à Turin et je trouvais que c’était une bonne idée. » À l’image du retour de Zinédine Zidane au Real Madrid, le jeune Deschamps, 37 ans seulement, et son ancien club semblent parfaits l’un pour l’autre.

Deschamps a lancé des jeunes joueurs qui sont devenus très importants, comme Claudio Marchisio, Paolo de Ceglie, Sebastian Giovinco. Il a même replacé Giorgio Chiellini en défense centrale.

Au sein d’une Serie B all-stars, l’une des plus relevées de l’histoire avec Naples, le Genoa, Brescia, Lecce ou encore Bologne, la Juventus de Deschamps fait immédiatement des merveilles et ne perd son premier match qu’à la 19e journée. Avec un vestiaire de légendes, le club revit. « On était un peu comme des rockstars en tournée, avec Gigi(Buffon), Alessandro(Del Piero), Mauro(Camoranesi), David(Trezeguet), Pavel(Nedvěd), se souvient Federico Balzaretti, ancien joueur des Bianconeri et désormais consultant Ligue des champions pour RMC Sport. L’ambiance était magnifique, et tous ces joueurs qui ont remporté des grands trophées dans leur carrière ont toujours gardé un très bon souvenir de cette saison-là. »

Dès le mois de décembre, et malgré ses neufs points de pénalité en début de saison, la Juventus trône à la première place du classement. En bon bâtisseur, le disciple de Lippi reconstruit l’équipe avec les anciens qui sont restés et des jeunes qui remplacent les cadors partis vers d’autres cieux à l’intersaison (Zlatan Ibrahimović, Lilian Thuram, Fabio Cannavaro, Gianluca Zambrotta, Patrick Vieira, Emerson, Adrian Mutu). « Il a lancé des jeunes joueurs qui sont devenus très importants, comme Claudio Marchisio, Paolo de Ceglie, Sebastian Giovinco, explique Balzaretti, qui avait reçu des offres de Serie A avant de choisir de rester à la Juve. Il a même replacé Giorgio Chiellini en défense centrale, mais ça c’est aussi un peu grâce à moi, car j’étais trop fort au poste de latéral gauche.(Rires.) »

Deschamps too british

A priori, tout marche comme sur des roulettes pour Deschamps à la Juventus. Dès le mois de janvier 2007, les dirigeants de la Vieille Dame évoquent une prolongation du contrat de DD dont le bail se termine en juin 2008. Pourtant, l’actuel sélectionneur des Bleus quitte soudainement le navire en mai, deux matchs avant la fin de la saison de Serie B. « Moi aussi, j’ai des regrets par rapport à ce qu’il s’est passé, assume Alessio Secco. Je suis certain que dans un contexte plus apaisé, les choses se seraient passées différemment. Nous aurions pu gérer les choses autrement, et Didier serait resté à la Juve. » Mais que s’est-il passé, au juste ?

Depuis son arrivée en Italie à l’été 2006, le coach français travaille dans des conditions précaires. « Toute la période estivale avait été très compliquée. Tous les jours, il y avait des rumeurs de départ de joueurs, on ne savait pas encore avec certitude quelles seraient les sanctions pour le club », se remémore Balzaretti. Mais c’est à propos du recrutement que la relation se tend entre Deschamps et son employeur. En janvier, alors que la Juve entrevoit le bout du tunnel et la promotion en Serie A, la direction réfléchit à l’avenir d’un club qui veut retrouver sa gloire d’antan. Beaucoup de grands noms, comme ceux de Cristiano Ronaldo, Steven Gerrard, Antonio Cassano ou encore Klaas-Jan Huntelaar, sont évoqués dans les journaux italiens.

Didier avait envie d’un rôle managérial à l’anglaise. Il voulait avoir un pouvoir plus important sur le choix des joueurs.

Deschamps, impliqué pour construire une nouvelle Juve, n’est pas de cet avis. « Je pensais qu’il valait mieux prendre trois joueurs très forts plutôt que six ou sept joueurs », expliquera-t-il plus tard à Sky Sport Italia. Alessio Secco, qui est alors décrit comme l’homme du clash avec DD, confirme les divergences : « Didier avait envie d’un rôle managérial à l’anglaise. Il voulait avoir un pouvoir plus important sur le choix des joueurs. Mais ce n’était pas l’avis et la conception du club. » Passé par Chelsea à la fin de sa carrière de joueur, Deschamps a découvert le fonctionnement à la british et réclame plus de responsabilités dans le choix des joueurs. La demande ne passe pas, et en une petite vingtaine de jours, en mai, la rupture est consommée. Au lendemain d’un dîner avec Jean-Claude Blanc, alors administrateur délégué de la Juventus, qui confirme les désaccords entre les deux parties, Deschamps annonce son départ du club le 26 mai.

Un mea culpa mutuel

Déjà un peu en vacances dans leurs têtes, les joueurs de la Juventus perdent leurs deux derniers matchs de championnat sans DD. « Ça a été une surprise pour tout le monde. On n’avait rien vu venir au sein de l’équipe », assure Balzaretti. Homme de confiance de Deschamps, le latéral gauche de la Juventus subira le départ de l’entraîneur français quelques semaines plus tard. « Le club m’a demandé de partir à la Fiorentina. Je n’étais pas content, parce que j’avais joué deux ans à la Juve, j’étais resté en Serie B, j’étais important dans l’équipe et je voulais continuer », explique celui qui a terminé sa carrière à la Roma. Au sein de la Juve, les regrets sont donc partagés autour du départ de Deschamps, qui a renoncé à sa deuxième année de contrat en quittant le club.

Un geste particulièrement apprécié par Alessio Secco, qui insiste sur le fait « que si ça avait été une autre saison, on aurait pu gérer cette pression avec plus de tranquillité. Toute cette situation a brisé quelque chose entre Didier et le club. » Quelques mois après la rupture, l’ancien directeur sportif et DD ont eu l’occasion de s’expliquer pour « remettre les choses à plat et reconnaître qu’on s’était tous les deux trompés ». Mais pas de quoi envisager de remettre le couvert selon Secco, qui assure que jusqu’à la fin de son mandat comme directeur sportif en 2010, Deschamps n’a pas été sollicité à nouveau par la Vieille Dame. « Mais j’espère qu’il pourra un jour revenir entraîner la Juventus en Serie A et en Ligue des champions parce qu’il le mérite », ajoute Secco. Avant d’envisager cette suite à une aventure turinoise qui semble s’être terminée trop tôt, c’est avec l’équipe de France, avec qui il partage sa vie depuis 2012, que Deschamps se rendra à Turin cette semaine. Sans oublier d’aller rendre visite à quelques vieilles connaissances, mais une victoire face à la Belgique dans la poche.

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Par Denis Ménétrier

Tous propos recueillis par DM, sauf mentions

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