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Di Natale devrait-il être titulaire ?
Entre un Balotelli qui a raté l’immanquable contre l’Espagne, un Di Natale qui marque cinq minutes après son entrée en jeu et un Cassano qui dérape sur les gays, Cesare Prandelli doit faire son choix. A priori, c'est encore Di Natale qui restera sur la touche. Vraiment un bon choix ?
C’est évidemment le débat du moment en Italie. À quelques heures d’affronter la Croatie, l’Italie cherche encore son attaque. Or, après le match contre l’Espagne, on ne peut pas vraiment dire que Cesare Prandelli ait été aidé. Car, si la prestation italienne a été convaincante, celle de l’attaque laisse planer des doutes. Titulaire, Mario Balotelli n’a pas pesé comme il le devrait et a surtout raté une énorme occasion qu’il s’était lui-même procurée. Derrière, l’attaquant de Manchester City a été remplacé par Toto Di Natale. 300 secondes ont suffi au buteur de l’Udinese pour mettre au fond des filets sa toute première occasion. En fin de rencontre, Di Natale a même failli offrir la victoire aux Azzurri, avec une reprise de volée version Roberto Baggio face à la France, en 98.
Quant à Cassano, il a été bon et a offert de la profondeur, même s’il semble encore un peu juste physiquement. Par contre, Fantantonio a eu la bonne idée de faire parler de lui en conférence de presse. Une énième cassanade, en réponse à un journaliste italien qui a récemment affirmé que deux joueurs de la Nazionale cacheraient leur homosexualité. « Il vaut mieux que je ne dise pas ce que je pense, sinon ça va être le bordel et je serai attaqué de tous les côtés. C’est leur problème s’ils sont pédés. Tout cela ne me regarde pas, mais j’espère qu’il n’y en a pas en Nazionale » , a-t-il affirmé. Quelques heures plus tard, face à l’indignation générale, Cassano demandait pardon. Prends ça, le code de l’éthique de Prandelli.
Les blagues de Toto
La vraie question est donc là : Antonio Di Natale devrait-il être aligné, ce soir, face aux Croates ? Les premières réponses émanant du camp de base de la Squadra semblent indiquer que non. Pourtant, il y a pléthore d’arguments en sa faveur. En ce qui concerne les chiffres, Di Natale est de loin le buteur italien le plus prolifique des dernières années. 28 buts en 2009-10, 29 en 2010-11 et 23 cette saison. Uniquement en championnat. À Udine, l’attaquant jouit d’une liberté totale, qui lui permet d’être le roi de l’équipe et du public. Son adresse devant le but lui a permis de retrouver la Nazionale à l’occasion de l’Euro, deux ans après sa dernière sélection, lors du Mondial 2010. Classe jusqu’au bout : Di Natale avait quitté la Squadra Azzurra avec un but (lors de la défaite 3-2 contre la Slovaquie), il la retrouve avec un but. Comme si le temps s’était arrêté. « Tu lui donnes un demi-ballon et il le transforme en but. C’est un tireur d’élite » , a dit de lui son coéquipier, Antonio Cassano.
Fantantonio n’est d’ailleurs pas le seul à faire la promo du buteur napolitain, frioulan d’adoption. « Lors des 4-5 dernières années, il a prouvé qu’il était notre attaquant le plus fort. Selon moi, il devrait jouer titulaire. Après, il est clair que c’est Prandelli qui doit faire ses choix » , a affirmé Fabio Quagliarella, son ancien pote à l’Udinese, lors d’une interview à Sky Sport 24. On l’a compris : Toto a ses supporters et les chiffres parlent pour lui. Mais alors, pourquoi mettre en doute sa place de titulaire, face à un Balotelli qui, jusqu’ici, n’a jamais rien accompli en équipe nationale ? La réponse tient de la psychologie. Lorsqu’il débute un match titulaire avec la Squadra, Di Natale, qui n’a jamais été un grand fan de la grosse pression sur ses épaules (c’est d’ailleurs pour cela qu’il a toujours refusé de signer dans un grand club), s’éteint. Cette même pression qui lui avait fait rater son tir au but, en 2008, contre l’Espagne, en quarts de finale. À ce moment-là, de son propre aveu, il a même pensé à « tout arrêter, et à redevenir maçon » . Ça aurait été con, quand même.
Trois noms, trois possibilités
Toutefois, Prandelli continue d’avoir des doutes. Garder le meilleur buteur de la Serie A comme joker de luxe risque aussi d’être considéré comme un gâchis, surtout lorsque l’on voit à quel point l’avant-centre de l’Udinese est affûté. Voilà pourquoi, lors des derniers entraînements, le sélectionneur a tout essayé. Di Natale/Cassano, Di Natale/Balotelli et Balotelli/Cassano. Or, il ne faut pas se tromper. Car le match contre la Croatie est déjà un match décisif. Les Croates ont réussi leur entrée en s’imposant contre l’Irlande (3-1) et pourraient se qualifier mathématiquement en s’imposant contre les Italiens. À l’opposé, l’Italie serait éliminée à 99% si elle venait à perdre contre l’équipe de Bilić. Il faudrait alors espérer un miracle lors de la dernière journée, sans avoir son destin entre les mains.
Prandelli n’a donc pas intérêt à se tromper sur la formation. Le profil des joueurs croates n’est en rien similaire à celui des Espagnols. D’où l’importance d’adapter le secteur offensif. Balotelli demeure le seul joueur physique de l’attaque italienne, aux côtés des « petits » Di Natale, Cassano, Borini et Giovinco. Voilà peut-être, donc, ce qui a pu peser dans la balance pour Prandelli, au moment de faire ses choix. Attention aussi à Giovinco, qui a effectué une très bonne entrée contre les champions du monde espagnols (un caviar pour Di Natale…) et qui aurait pu également prétendre, à la surprise générale, à une place de titulaire. Le beau Cesare a encore quelques heures pour prendre sa décision définitive. Et pour celle-là, il n’y a ni chiffres ni conseils d’autres joueurs qui tiennent.
Eric Maggiori