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Di María, la parenthèse mancunienne
Champion d'Europe, meilleur passeur de la Ligue des champions et de la Liga, finaliste de la Coupe du monde et plus gros transfert de l'histoire du championnat anglais : à son arrivée à l'été 2014, le CV d'Ángel Di María avait de quoi laisser pas mal de monde rêveur du côté de Manchester United. Une saison foirée plus tard, l'Argentin est reparti par la petite porte, direction Paris. De retour à Old Trafford mardi, El Fideo a l'occasion, en l'absence de Neymar, de prouver au public mancunien qu'il valait un peu mieux dans l'histoire de MU qu'une place à la table de Danny Wallace et Neil Webb.
Deux pas d’élan, et un coup de patte pour mettre le ballon dans la boîte. Rebond, but, cœur avec les doigts : nous sommes le 14 septembre 2014 et, pour sa deuxième apparition sous le maillot de Manchester United, Ángel Di María met les Red Devils sur la voie de leur premier succès de la saison face à QPR (4-0).
De nouveau buteur sept jours plus tard lors d’une déroute à Leicester (5-3), El Fideo récidive début octobre face à Everton où il signe son troisième « doublé » but-passe décisive (2-1). Début octobre, l’Argentin facture ainsi trois buts et trois assists en cinq apparitions. Et semble donc avoir posé les bases d’une love storyavec le club mancunien.
Tout nouveau tout beau
Et puis, plus rien. Ou trop peu, en tout cas, pour justifier les 75 plaques posées par United pour le débaucher du Real Madrid et faire de lui le plus gros transfert de l’histoire de la Premier League. Le septième dans l’histoire du football. Trop peu, aussi, pour un type qui sort d’une saison 2013-2014 XXL, conclue par la Décima avec le Real et une finale de Coupe du monde avec l’Argentine. Une saison également décorée de quelques jolies distinctions individuelles : le titre de MVP de la finale de la C1 remportée contre l’Atlético (4-1), et ceux de meilleur passeur de la Champions et de la Liga (7 et 17 passes décisives). S’il facture trois caviars supplémentaires entre octobre et novembre, le gaucher doit attendre janvier et un déplacement à Yeovil Town pour retrouver le chemin des filets. Ce, pour la dernière fois d’une saison achevée avec quatre pions au compteur. Une misère. C’est simple, pour retrouver trace d’un total aussi faiblard dans sa carrière, il faut remonter aux exercices 2007-2008 (un but) et 2008-2009 (quatre buts). Ses deux premiers sur le Vieux Continent, à Benfica.
Ses douze passes décisives ne suffisent pas à dissiper le constat d’échec, encore moins quand on sait que trois de ces passes sont en fait des frappes croquées exploitées par des partenaires bien placés. Quant à sa place au mémorial des numéros 7, mythique chez les Red Devils, elle se situe davantage aux côtés de Neil Webb, de Danny Wallace ou, pour faire plus grand public, de Michael Owen, que des hommes qui l’ont magnifié, de Best à Ronaldo en passant par Robson, Cantona ou Beckham. La faute à qui, à quoi ? Au contexte, déjà : un an après le départ de Sir Alex Ferguson, c’est un United encore en chantier, auteur d’une première saison de transition foirée dans les grandes largeurs (aucun titre, septième place en championnat et licenciement en avril de David Moyes) et relégué au rang d’outsider qu’a rejoint Di María. Au joueur, aussi, dont la carrière – ses années parisiennes n’échappent pas à la règle – rime avec irrégularité, entre éclairs de génie et matchs fantomatiques, et plus à l’aise dans le rôle de lieutenant d’un crack – Ronaldo au Real, Messi avec l’Albiceleste, Neymar à Paris – que dans celui du maître à jouer dont il a un peu hérité sans le vouloir à Manchester.
Une question d’adaptation
La faute, enfin, à l’adaptation. Laquelle n’a jamais vraiment opéré pour l’Argentin, à en croire ses propos dans Le Parisien en septembre 2015 : « Ma famille n’allait pas bien, ma fille souffrait. La vie en Angleterre était un peu difficile. Certains s’y font très bien. Et pour d’autres, l’adaptation est plus difficile. » Dans l’esprit de l’ailier, cette difficulté portait un nom : Louis van Gaal, coach de MU entre 2014 et 2016. « Je commençais un match à une position, puis le suivant à une autre. Ça ne m’a pas aidé à m’adapter. Chaque entraîneur décide où jouent les joueurs. Mais le joueur doit se sentir bien à une position et s’adapter. » S’il s’en est montré incapable outre-Manche, c’est pourtant ce que le garçon avait fait avec brio en 2013-2014 pour s’affranchir de la concurrence nouvelle de Gareth Bale et rester un premier choix au Real.
Replacé à gauche d’un entrejeu à trois par Carlo Ancelotti, c’est dans ce registre de box-to-box que l’Argentin a signé ce qui reste sans doute comme la saison la plus aboutie de sa carrière. Dans ce registre, aussi, qu’il a fait chavirer un Paris alors contraint par le fair-play financier et United. S’adapter, c’est également ce qu’il fait depuis le début de saison au sein du PSG de Thomas Tuchel qui l’aligne à droite, à gauche, au cœur du jeu et même parfois devant dans un système à deux pointes. Mardi, à la veille de ses 31 ans, il sera d’ailleurs encore question d’adaptation pour El Fideo. Neymar absent, c’est en grande partie à lui (et à Julian Draxler ainsi qu’à Kylian Mbappé) qu’incombera la responsabilité du jeu parisien à Old Trafford. Un stade dont il a, quatre ans après, l’opportunité de faire le théâtre des rêves parisiens.
Par Simon Butel