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- Bulgarie-France (0-1)
Deschamps, le flou pas très artistique
Ce samedi soir face à la Bulgarie, les Bleus l'ont emporté en douceur (0-1). Et on ne sait toujours pas comment, tant le contenu a été insipide.
À la fin du match contre la Bulgarie, tous les Bleus sont unanimes. Sur le banc de touche, Guy Stéphan et le reste du staff éclatent de joie, comme pour pousser un gros ouf de soulagement. Au micro de TF1, que ce soit Hugo Lloris, Blaise Matuidi ou Didier Deschamps, le message est clair. L’équipe de France a fait le travail en l’emportant 1-0 et en conservant la première place du groupe A. C’est tout ce qu’il faut retenir, avant d’affronter mardi la Biélorussie pour la dernière rencontre de la campagne de qualification.
Mais une fois dans les vestiaires, loin des caméras et de la presse, les réactions sont-elles réellement les mêmes ? Après un match si poussif, les Bleus doivent-ils lâcher un énorme cri de guerre pour continuer à se motiver, ou doivent-ils la fermer et se remettre en cause ? La bonne foi incite à envisager la seconde option. Car tactiquement, difficile de tirer beaucoup d’enseignements de cette purge.
La vie sans Pogba
Il est légitime d’interroger les choix légèrement surprenants de Didier Deschamps. Alors qu’on lui reproche souvent de ne pas prendre assez de risques dans ses compositions lorsqu’il en a l’occasion, il a choisi de bousculer énormément de choses dans ce match à Sofia où l’enjeu était énorme. D’abord dans le système de jeu, en revenant à un 4-3-3 abandonné au cours de l’Euro pour son inefficacité offensive. Et ô surprise ! les mêmes problèmes d’organisation, les difficultés à trouver du liant et à imprimer une pression continue sont revenus.
Mais à la décharge de Didier Deschamps, le duo Kanté-Pogba si complémentaire dans cette configuration ne pouvait être aligné à cause de la blessure du Mancunien. C’est sûrement cette absence qui a poussé le sélectionneur à opter pour un retour au milieu à trois. Mais dans ce cas-là, pourquoi ne pas faire confiance d’entrée à Adrien Rabiot, qui cartonne dans ce rôle-là depuis le début de la saison ? Résultat : le Parisien a été contraint de rentrer en cours de match pour compenser la blessure de Kanté, dans un rôle de numéro six qui ne lui sied définitivement pas.
Lacazette mal utilisé
D’ailleurs, au-delà du système, c’est le choix des hommes et de leur position sur le terrain qui a posé problème. Didier Deschamps a décidé de faire confiance à Corentin Tolisso et Alexandre Lacazette, alors qu’ils n’avaient jamais été testés dans des matchs qui comptent. Pourquoi pas, après tout. Mais tout n’a pas été mis en œuvre pour permettre au joueur d’Arsenal de briller. L’ancien Lyonnais, qui a besoin de beaucoup de joueurs autour de lui pour combiner dans les petits espaces, s’est souvent retrouvé dos au but avec Kylian Mbappé et Antoine Griezmann pour seules options de remise. La faute à l’absence d’un réel meneur de jeu.
D’ailleurs, ses deux compères d’attaque n’étaient clairement pas dans les meilleures conditions non plus. Impérial à Paris dans son couloir droit, Kyky est repassé à gauche. Parfaitement à l’aise dans l’axe avec Giroud comme point d’appui – l’une des seules associations sûres de cette équipe de France –, Grizou s’est cru revenir trois ans en arrière en étant replacé dans le couloir droit. Résultat : trois joueurs attirés par l’axe et aucun pour combiner sur les côtés.
La victoire des comptables
Alors oui, la France l’a emporté. Mais c’est seulement grâce à la culture de la gagne ou la réussite légendaire de Didier Deschamps, peu importe comme on l’appelle. Rien d’autre, aucun ingrédient supplémentaire n’a été mis par les Bleus pour s’assurer la victoire, tant ils n’ont rien montré collectivement. Mais en même temps, aucun joueur français n’a réellement failli à sa mission et peu – si ce n’est Lucas Digne – ont réellement marqué de points. Un flou tactique qui ne permet absolument pas aux Bleus d’avancer sur le fond, mais qui au moins fait le taf sur le plan comptable. Les plus confiants parleront encore de pragmatisme. Les plus sceptiques évoqueront une constante stagnation. Si les joueurs de Didier Deschamps ne savent pas s’ils doivent se réjouir de ce match, les supporters encore moins.
Par Kevin Charnay