- CM 2018
- Qualifs
- Luxembourg-France (1-3)
Dembélé, la route de la liberté
Incapable de s’exprimer lors de sa première titularisation chez les Bleus en novembre dernier, Ousmane Dembélé a rendu samedi soir une copie plus qu’intéressante et complètement dans son registre. Soit en percussion et en ouvreur d’espaces.
La fête est finie, les lumières s’éteignent. Au fond, pour une dernière bouffe avant de se quitter pour plusieurs mois, tout le monde espérait mieux, mais tant pis, c’est comme ça. Lens, une nuit de novembre. Face à la presse, Didier Deschamps veut profiter de cette dernière sortie de 2016 pour passer un message avant plusieurs mois de silence : « Je n’aurai peut-être plus l’occasion de donner du temps de jeu à des jeunes pour qu’ils touchent du doigt le haut niveau avec des exigences élevées. Il ne faut pas porter de jugements trop hâtifs. Il y a de la qualité, mais encore des paliers à franchir.(…)Évidemment, certains doivent faire plus, faire mieux. » Le haut niveau n’enlève pas sa jupe facilement, il faut l’apprivoiser et le mériter. C’est une histoire de mérite, de sueur et de travail, avant tout. Au sortir du nul entre l’équipe de France et la Côte d’Ivoire il y a plus de quatre mois, le sélectionneur français pointait avant tout cette donnée : s’il voit qu’un joueur, aussi jeune soit-il, se dépouille sur le terrain, il sera autorisé à revenir, sinon, ce sera plus compliqué. Se battre pour exister, voilà l’attitude à avoir. Quelques mètres plus loin, dans les couloirs de Bollaert, Ousmane Dembélé, titulaire pour la première fois de sa jeune carrière chez les grands, sait qu’il a grillé une première vie. « J’étais content d’être titulaire, mais je ne me suis pas lâché sur le terrain, balance-t-il. Je n’ai pas montré ce que je sais faire. C’est comme ça… J’espère qu’il va y avoir d’autres occasions. Ce sont mes premières minutes. Je ne suis pas déçu, mais j’aurais aimé montrer ce que je sais faire. » Ce dont il est capable, tout le monde en est conscient, et sa première saison au très haut niveau avec le Borussia Dortmund – sept buts toutes compétitions confondues, neuf passes décisives – le prouve. Alors, Deschamps avait décidé de se priver lors de ce rassemblement de certaines cartes (Fekir, Martial, Coman) pour offrir à Dembélé ce pourquoi il a débarqué un jour sur un terrain de foot : de la liberté.
Les mots et les actes
Depuis quelques jours, il n’y avait pas beaucoup de suspense. Oui, Ousmane Dembélé allait être titulaire pour un déplacement au Luxembourg dont la portée dans la tête du sélectionneur est bien plus importante que la rencontre de gala qui attend l’équipe de France contre l’Espagne mardi soir au stade de France. En conférence de presse, Didier Deschamps avait alors expliqué faire « toujours preuve d’un peu plus d’indulgence avec les jeunes lors de leurs premières sélections. À Dortmund, Ousmane marque et fait marquer. Il sait qu’il doit jouer aussi libéré et se montrer aussi efficace en sélection qu’en club. » Derrière les mots, on attendait maintenant les actes. Et voilà : placé à droite du 4-2-3-1 français, Ousmane Dembélé a enfin rendu la copie attendue depuis ses premières foulées internationales. Mieux, il l’a fait sur un terrain flingué et face à un bloc compact qui a longtemps privé les Bleus d’espaces. C’est dans ce registre que Dembélé a marqué des points samedi soir lors de la victoire française (1-3), angoissante par moments, au stade Josy-Barthel : en ouvrant les espaces, en agitant la défense adverse, en acceptant de se faire secouer dans tous les sens au point de finir la rencontre les bras en croix après un énième tampon. Le haut niveau est pour les costauds mentalement et Dembélé devait prouver qu’il avait les épaules. Tout le monde se doutait qu’il les avait et, derrière ses belles promesses, il faudra maintenant le confirmer. De cette rencontre est même ressortie une statistique assez folle : avec dix dribbles tentés samedi soir, Ousmane Dembélé a claqué un record détenu jusqu’ici par Abou Diaby depuis octobre 2010. C’est sur cette piste qu’il est attendu et au cours d’une semaine où l’étiquette espoir a davantage été scotchée sur le front de Kylian Mbappé, sa réponse est la bienvenue. Au nom de la liberté.
Par Maxime Brigand