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Dembélé et Dortmund, ou la force du bluff
Face aux envies d'achat de Barcelone, Dortmund se veut fort et résiste tant bien que mal à Dembélé, qui en réponse a choisi la grève de l'entraînement sans prévenir son club. Au BvB, désormais, on se veut fort financièrement et mentalement dans l'épreuve du mercato. Au moins dans les apparences.
« No way, keine Chance ! » À la première rumeur venue, alors que le mercato commençait à affoler les supporters et à alimenter les unes de journaux sportifs début juillet, le manager du Borussia Dortmund, Michael Zorc, avait été ferme, net et sans mesure, tout en jonglant entre anglais et allemand pour être sûr de bien se faire comprendre de tout le monde du football. Un départ de la grande promesse des marsupiaux n’est pas envisageable. Dembélé est un joueur clé pour l’avenir du Borussia Dortmund à tous les niveaux. Sportivement, le club veut se construire avec lui. Et pour la paix des ménages, après l’année compliquée dans les médias autour de Thomas Tuchel, ce n’est pas le moment d’en rajouter une couche avec le départ d’un joueur qui doit porter le club. Plus que l’institution, c’est la validité du projet initié depuis l’été dernier et la place de l’équipe dirigeante qui se jouent.
Jeunes talents de partout
Il y a un an, Dortmund n’était pas trop vendeur. Il était le club qui recrute à tout-va. Avec plus de 100 millions claqués en deux mois, le club de la Ruhr voulait s’établir nettement dans la concurrence du Bayern et se placer en vis-à-vis du nouveau riche de Leipzig. Sur le créneau des jeunes talents de moins de 20 ans, il fallait donc frapper fort. Dortmund a ainsi accumulé des profils assez similaires, de Mor à Isak, sans oublier Dembélé et l’Américain Pulisic, déjà au club. Dans le lot, l’ancien Rennais fait déjà figure de valeur à part, chipée au nez et à la barbe de plus gros. Mieux, Dortmund a connu une réussite au cours d’une année mitigée et parfois difficile : un Dembélé, rayonnant et en progrès constant jusqu’au bout. Logiquement, les regards déjà intéressés de l’an dernier se sont intensifiés, pour mieux lancer les rumeurs estivales. Michael Zorc pensait fermer le ban facilement avec sa première sortie médiatique. Les quelques relances ponctuelles n’étaient que des brouilles pour animer les pages transferts. C’était compter sans l’écume post-Neymar.
La chaise musicale de l’été
Tout s’accélère ainsi le 10 août. Soudainement, le FC Barcelone fait une première offre ferme. Dans le même temps, Dembélé ne se pointe pas à l’entraînement. Le joueur a trouvé un accord avec les Espagnols. L’heure est au bras de fer et au poker menteur. Chacun y va ainsi de sa petite partition pour faire douter et vaciller l’autre. Le Barça reste muet. Dembélé disparaît. Dortmund joue aux naïfs, sur l’air d’un « nous ne savons pas où est Dembélé » , avec un soupçon de moquerie via Peter Bosz : « J’espère que rien de grave ne lui soit arrivé. » Quelques heures plus tard, le scénario se précise avec le refus d’une offre la veille, la bouderie de l’ailier absent « sans motif valable » de manière réfléchie et la sanction financière à six chiffres accompagnée d’une suspension sportive. À la fin de la journée, Dortmund s’affirme : le BvB ne cédera pas cet été.
L’invraisemblable : le montant ou le départ ?
Pourtant, si Dembélé part – et il partira, un jour ou l’autre –, Dortmund s’en remettra. Ce n’est qu’un joueur d’une longue liste, qui plus est après les épisodes Götze, Lewandowski et Hummels. Le club survivra. Mais dans le court terme et dans la foulée des bisbilles avec Thomas Tuchel, cela irait bien mal avec les ambitions affichées du club. Plus que le BvB, c’est le projet actuel qui pose question. Et pour cela, Dortmund n’a pas d’autres choix que de tenir bon et pour montrer que le club avance et a choisi la bonne voie, en encaissant a minima une somme délirante pour un joueur sous les 100 matchs en professionnel. Alors dans un communiqué destiné aux actionnaires, les dirigeants n’hésitent pas à dire que son transfert est « à l’heure actuelle peu vraisemblable » . Une manière aussi d’ouvrir la porte à un coup de folie. Ce n’est plus tout à fait l’impasse des débuts. Il y a une voie. Elle est juste insensée, vue d’Allemagne et de Dortmund. Qui peut bien valoir 150 millions d’euros ?
Par Côme Tessier