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Debève, l’anti-Dupraz
Catapulté sur le banc de Toulouse fin janvier, Mickaël Debève n’a visiblement pas grand-chose à voir avec son prédécesseur, Pascal Dupraz. Aussi calme que discret, l’ancien joueur de Lens reste toutefois un entraîneur perfectionniste et hyper déterminé.
De lui, personne n’en sait beaucoup. Sauf ceux qui le connaissent personnellement, évidemment. Peu nombreux sont également les fans de foot à en garder un souvenir précis. Hormis les supporters de longue date du Racing Club de Lens, où il a disputé près de 200 matchs entre 1994 et 2002 et avec lequel il a inscrit un but mythique à Wembley contre Arsenal en 1998, et ceux de Toulouse, où il a démarré sa carrière de joueur (de 1986 à 1994) avant d’y remettre les pieds dans un rôle d’éducateur en 2008. Depuis, Mickaël Debève a grimpé les marches et se retrouve aujourd’hui entraîneur principal du TFC, remplaçant Pascal Dupraz qu’il assistait dans l’ombre. Une nomination un peu surprise, quand même.
Il faut dire que Mickaël Debève semble se complaire dans la sobriété et la pudeur. Désormais sur le devant de la scène, l’ancien entraîneur de l’équipe réserve (de 2008 à 2015) ne paraît pas le moins du monde attiré par la lumière médiatique. Contrairement à son prédécesseur, justement. « C’est sûr qu’il ne va pas gesticuler ou faire le feu follet comme Antoine Kombouaré devant Frédéric Hantz, remet Stéphane Hornoy, président du SC Abbeville période 2005-2008. C’est un technicien calme qui respecte l’arbitrage et l’adversaire, et qui se concentre davantage sur l’analyse de match que sur les erreurs arbitrales. » Sa première mission sur un banc, l’originaire d’Abbeville l’a accomplie sous le regard de l’ancien dirigeant.
Star à Abbeville, à l’ombre ailleurs
En fin de carrière à Amiens, Debève se reconvertit en effet en entraîneur-joueur dans sa ville natale en 2005 tout en passant ses diplômes. Suivent quelques saisons sur la touche jusqu’en 2008, date de son départ à Toulouse. Une période durant laquelle il jouit d’un semi-statut de star. « Ici, dans la région, il est très connu. Car il a été formé au club et a joué à Lens. Sans compter qu’il habitait à dix kilomètres d’Abbeville, reprend Stéphane Hornoy. Donc lorsqu’il est arrivé, c’était presque comme Neymar au PSG ! C’était la grande actu. Et c’était un bon joueur, très apprécié : quand il décidait de ne pas s’aligner dans le onze titulaire, les supporters lui demandaient d’entrer sur la pelouse ! »
À Abbeville, les résultats ne sont ni mauvais ni extraordinaires. Et s’il s’entend bien avec tout le monde, tapant régulièrement la discussion avec les supporters, Debève ne souhaite pas se contenter du niveau amateur. « On voyait bien qu’il y avait une différence entre lui, qui venait du monde pro, et les joueurs amateurs ou semi-amateurs. Ces derniers n’avaient pas forcément la même gagne, donc ils ne comprenaient pas toujours ce qu’il demandait. Et il demandait beaucoup, presque un peu trop pour ce niveau, rembobine Stéphane Hornoy. En fait, c’est un homme très déterminé, perfectionniste, avec un esprit de gagneur. Il sait ce qu’il veut. L’image qui le symbolise bien selon moi, ce sont ses footings à Lens : ce n’était pas le meilleur technicien, mais il était toujours premier. Donc on savait qu’il ne resterait pas. Parce que le monde professionnel est son milieu, et le foot sa vocation. »
Une voix qui porte dans les couloirs toulousains
Avec les jeunes du TFC, qu’il rejoint en 2008, la méthode ne varie pas. Sans faire de bruit en public, Debève réclame beaucoup. « C’est quelqu’un de très, très discret, mais de très, très travailleur. Il est strict, extrêmement pointilleux, à l’affût du moindre détail » , pose Adrien Regattin, qui a évolué sous ses ordres en CFA, puis quand le coach est devenu l’adjoint de Dominique Arribagé en équipe première en 2015. Et les relations avec les joueurs, alors ? Aussi chaudes que son profil laisse augurer ? « Il a son propre caractère : il est un peu renfermé au départ, puis il s’ouvre petit à petit, répond le milieu offensif d’Osmanlıspor. Je dirais qu’il n’est ni proche ni distant. Il lui arrive de glisser quelques petites blagues par-ci par-là durant des moments de détente, mais c’est clair que ce n’est pas le genre de coach à te prendre dans les bras. »
Rien à voir avec Dupraz, donc. Reste que Mickaël rejoint Pascal sur un point : la franchise et la sincérité de langage digne d’un grand frère, quitte à placer sa colère dans le son de la voix. « Quand il faut crier, il va crier, il n’y a pas de souci à se faire de ce côté-là ! S’il n’est pas content de toi, il va te le faire comprendre, hein, assure Regattin. Il aime montrer son autorité, il n’a pas de problème à faire savoir qu’il est le patron. » Possible que les murs du vestiaire toulousain aient craqué après l’élimination à Bourg-Péronnas (2-0) pour son premier match en tant que coach principal, donc. En tout cas, le TFC a rattrapé cette bévue de Coupe de France par six journées de Ligue 1 encourageantes (deux victoires 1-0 contre Troyes et Nice, une défaite 1-0 face à Paris, un nul sans but à Amiens, un 3-3 devant Monaco et un 1-1 à Metz). « Je me souviens d’un coach qui voulait que ça aille vite, très vite vers l’avant, ajoute Regattin. La possession de balle pour faire tourner, il n’en veut pas. Il disait toujours : « Je ne veux pas que ça ronronne. » » Comme quoi, sous des airs de chat solitaire…
Par Florian Cadu
Propos recueillis par Florian Cadu