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De Xabi Alonso à Barcelone, le trait d’union Guardiola
Longtemps adversaire du FC Barcelone sous la liquette merengue, Xabi Alonso retrouve une énième fois le Camp Nou sur son chemin. Alors joueur le plus « barcelonais » du Real, il enjouait déjà Guardiola, qui lui sert enfin de tiret avec la philosophie blaugrana.
87 tours de cadran à courir, à recevoir des coups, à distribuer et à équilibrer son équipe, puis il quitte le rectangle vert. Remplacé par un certain Cesc Fàbregas, il offre un visage résolument blaugrana au milieu de la Roja, composé de Xavi, Iniesta, Busquets et de celui qui était alors un Gunner. Le 11 juillet 2010, Xabi Alonso et son thorax presque perforé sont couronnés champions du monde, à l’instar d’une sélection espagnole au parfum catalan. « Ce que Xabi donnait à la sélection, c’était de l’équilibre, alors qu’Iniesta et Xavi étaient beaucoup plus créatifs, se souvient Paco Jémez, entraîneur du Rayo Vallecano et grand amoureux du toque. Xabi, c’est un joueur qui domine à la perfection le jeu long. Avec les ailiers si rapides que nous avions, il était indispensable et les servait toujours dans le bon tempo. » Ce tempo, il le distribue aujourd’hui en Bavière, sous les ordres du roi incontesté d’une certaine idée du football total, et s’apprête à retrouver une Espagne dans laquelle il s’est construit, et un Barcelone auquel le lie une histoire aux nombreux parallèles. Retour sur une liaison inextricable.
« La véritable plaque tournante du Bayern »
« J’ai toujours été très fidèle et engagé envers mes entraîneurs. » Sa devise, le Basque de Tolosa la respecte à la lettre au printemps 2011. Alors en plein marathon de Clásico, durant lequel Blaugrana et Merengues se croisent à quatre reprises en l’espace de quelques semaines, il suit chaque commandement du chef de meute du Real. Les plaintes contre les arbitres, il accepte. Les chamailleries enfantines, il ne bronche pas. Dans cette ambiance délétère qui gangrène le Bernabéu durant la fin de règne du Special One, Xabi Alonso ne critique jamais José Mourinho face au micro, ni même en off. Homme de devoir, respectueux de la parole donnée, il se chamaille ainsi à de nombreuses reprises avec ses adversaires barcelonais, comparses de sélection. Dans le camp catalan, il trouve face à lui un homme qui le craint tout autant qu’il le respecte : Pep Guardiola. « Xabi est un joueur qui s’adapte très bien au système de jeu et à la philosophie de Pep. Techniquement, il est très bon et, surtout, il est très intelligent tactiquement » , confirme Paco Jémez. Autant de qualités qui avaient déjà poussé Guardiola à presser Laporta pour recruter celui qui, à l’été 2008, évoluait encore du côté de Liverpool.
Après cinq saisons à défendre l’écusson royal de Madrid, ponctuées par un sacre en Ligue des champions, l’occasion rêvée se présente à l’entraîneur du Bayern Munich. « Dès que Guardiola a pu acheter Xabi Alonso, il l’a fait, confirme le coach rayista, ami et comparse du natif de Santpedor en sélection espagnole et dont il a également partagé la formation d’entraîneur. Son choix a grandement été dicté par l’un des points forts de Xabi, son jeu long. C’est la véritable plaque tournante du Bayern de cette année. Dans la tête de Pep, Xabi lui permet en une fraction de seconde de passer d’une situation de passes courtes dans un espace réduit à un renversement qui fatigue l’équipe adverse » . Quant à l’intéressé, recruté avec pour objectif de ne jouer qu’une rencontre par semaine, il souhaite « affronter de nouveaux défis et travailler avec lui » . Finalement titulaire inamovible, il a « beaucoup absorbé, appris une nouvelle manière de travail, une nouvelle culture. J’ai réussi mon défi d’être capable de m’adapter aux gens, à l’entraîneur et à mes coéquipiers » . À tel point que Xabi Alonso pulvérise, dès septembre face à Cologne, le record de passes réussies dans un match.
« Xabi est comme les grands crus »
Ses 175 passes complétées sont autant un hommage à la philosophie de Guardiola qu’à celle de la formation blaugrana, imprégnée dans les gênes du technicien catalan. « Si Xabi était né à Barcelone, il aurait joué toute sa vie au Barça, s’amuse Paco Jémez. Il aurait pu jouer dans toutes les équipes du Barça, lors de toutes les époques. Ses caractéristiques entrent parfaitement dans le moule blaugrana. » De sa formation basque, de son apprentissage anglais et de sa confirmation castillane, Xabi Alonso se réserve une variante dont ne dispose – ou n’use que trop peu – Xavi et Iniesta : le jeu long. « Il voit tout et réalise chacune de ses transversales à la perfection, toujours en utilisant la bonne surface de son pied. De l’intérieur ou de l’extérieur, brossé ou tendu, en une touche ou avec une pause, il choisit toujours la solution idoine » , livre l’autre divin chauve espagnol, celui de Vallecas, avant de s’emporter dans un élan spiritueux : « Xabi est comme le bon vin. C’est un grand cru, un vin qui gagne en profondeur, en saveur et en identité avec le temps. Un vin dont on doit apprécier chaque gorgée » . Que le Camp Nou spère ne pas avaler de travers.
Par Robin Delorme, à Madrid