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Toulouse en mode ultra Violets
Soixante-six ans après la seule finale de Coupe de France de son histoire, le Toulouse Football Club découvrira le Stade de France, ce samedi face à Nantes. L'occasion pour la Ville rose, habituée à vibrer derrière son équipe de rugby, de faire enfin la fête pour du ballon rond.
Marché Victor Hugo, mercredi dernier. Une soixantaine de commerçants et des milliers de Toulousains sont au rendez-vous de la première nocturne de l’année. Exceptionnellement, écharpes, casquettes et drapeaux ont remplacé les côtes et les gigots sur les étals de la Maison de l’agneau, reconvertie en boutique du TFC. La Ville rose monte en pression à l’approche de la finale de la Coupe de France. Sur place, Branco van den Boomen, Anthony Rouault, Gabriel Suazo et Rafael Ratão sont même présents pour satisfaire les demandes de photos et d’autographes. Le dress code de la soirée ? Le violet, déjà à l’honneur sur la façade du Capitole et sur les allées Jean-Jaurès. Toulouse commence doucement à s’y habituer : désormais, les couleurs du Téfécé se portent toute l’année.
La fête bat son plein à Victor Hugo, à 10 jours de notre finale de @coupedefrance !
⏳Le décompte est lancé, Toulouse commence à s’échauffer 😊😈 pic.twitter.com/jfr7egprBW
— Toulouse FC (@ToulouseFC) April 19, 2023
Maxi super graal, Casanova et Curva
Le Stadium a retrouvé de la chaleur, et de la voix : il affiche une moyenne de 23 268 spectateurs par match en Ligue 1 cette saison. Du jamais-vu depuis l’exercice 2004-2005, où l’affluence moyenne atteignait 24 162 sièges. Une dynamique qui suit les résultats sportifs. « C’est monté crescendo depuis la reprise du club en 2020. On rate de très peu la montée (en barrages contre Nantes, NDLR), puis on y parvient avec un titre de champion de France de Ligue 2, c’est le graal. Et là, on a le maxi super graal », se félicite Laurence Arribagé, adjointe au maire de Toulouse en charge des sports, et épouse de Dominique. « On partait vraiment de rien, embraye Frédéric, 50 ans, encarté chez les Indians. On voit du jeu, des buts, des jolis matchs… On sortait de périodes où le club était tristounet, il y a une renaissance. Quand tu racontes une belle histoire aux gens, ils suivent. » Tellement qu’en mai dernier, au moment de célébrer le titre, les nombreux fumigènes craqués sur la place du Capitole avaient déclenché l’alarme incendie de la salle des Illustres, à l’intérieur du bâtiment.
D’après le classement des tribunes de la LFP, le Stadium est d’ailleurs le troisième stade de Ligue 1 en matière d’ambiance cette saison, derrière la Meinau et Bollaert-Delelis. « C’est presque un premier engouement, de nouvelles générations qui arrivent, évalue Medy, abonné depuis plus de dix ans et animateur de l’émission La Feuille de match sur Radio Occitanie. Il y a eu de grosses saisons, notamment lors des années Gignac, mais pour moi, autant d’ambiance dans le virage et autant de passion autour du club, c’est tout nouveau. » Fini l’indifférence, place à l’effervescence, dans laquelle s’inscrit la création de la Curva Oèst, un nouveau groupe de supporters, installée dans le virage Christophe-Revault depuis janvier. « Ce n’est plus Casanova, quand on jouait tous derrière pour essayer de prendre des nuls, explique Côme, fondateur du groupe. Tout le monde a envie de venir au Stadium pour pousser les Violets. La jeunesse a pris goût au TFC et n’est plus pour l’OM, le PSG ou l’OL comme à l’époque. Il y a cinq ans, tu sortais avec un maillot de Toulouse, on se foutait de ta gueule en te disant “C’est quoi cette merde ?” Maintenant, toute la ville est derrière. » Le violet a ainsi réussi à se (re)faire une place aux côtés du rouge et du noir du Stade toulousain, qui espère rééditer cette année le doublé Top 14 – Champions Cup de 2021.
« Entendre des « Toulouse ville de rugby », y a pas pire pour un fan du Téfécé, ça fait mal au cœur, poursuit Côme. Toulouse est une ville de sport, et de foot. Revoir le club prendre une place dans le cœur des Toulousains, notamment chez les jeunes qui vont faire perdurer ça, ça fait plaisir. » Sentiment partagé par Laurence Arribagé : « Le club a progressé dans pas mal de domaines. Ils sont très forts en communication, ils s’inscrivent pleinement dans la vie de la ville, ils associent les Toulousains. Tout le monde s’approprie le TFC. Des gens avec des maillots du Téf dans la rue, et pas que les jours de match, c’est assez nouveau. J’avais ressenti quelque chose de comparable quand mon mari Dominique jouait encore, lors de la qualification pour le tour préliminaire de la Ligue des champions. Mais là, ça s’inscrit dans la durée. »
« Pour Toulouse, c’est comme la finale de la Coupe du monde »
Depuis la victoire à Annecy, le rendez-vous du 29 avril est dans toutes les têtes. Ces derniers jours, les boutiques du club – au stade comme en ville – ne désemplissent pas et les produits dérivés spécialement lancés pour l’occasion se vendent comme des petits pains. « On y pense tous les jours, on a envie que le match arrive tout de suite. Ce sera un déplacement de folie (51 bus pour Saint-Denis ont été affrétés par le club, NDLR), probablement le plus beau de ma vie pour le moment », assure Côme. Des mots qui reviennent en boucle dans la bouche des supporters, privés du moindre titre depuis 66 longues années. « S’il y a victoire, ce sera le plus grand match de l’histoire du club dans le football moderne, il n’y a pas de possibilité de débat là-dessus, tranche même Yves, abonné chez les Indians depuis la fin des années 2000. Il faudra faire en sorte de ne pas réitérer les erreurs du passé et ne pas perdre le trophée cette fois-ci. »
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— Toulouse FC (@ToulouseFC) April 21, 2023
Partout dans la capitale occitane, chacun se prépare, à sa manière. « Pour Toulouse, c’est comme la finale de la Coupe du monde, s’exclame Françoise Pujo, patronne de l’emblématique bar Chez Tonton, haut lieu de la fête dans la Ville rose. J’ai connu le TFC au summum, quand ils ont battu Maradona, c’était quand même quelque chose ! On avait fait une fête fantastique. Maradona c’est mieux qu’Annecy, mais quand même, on ne va pas cracher dans la soupe. Le soir de la gagne, il y avait un monde, une folie terrible. Si on gagne, ça peut être la même chose, même sans Maradona », en rigole-t-elle déjà. « Ce n’est pas comparable, là on parle d’inscrire une ligne au palmarès, nuance Frédéric. Naples, ça nous tombe un peu dessus. J’avais une quinzaine d’années et je me souviens que ça avait été vraiment très fort, la symbolique d’avoir Maradona au Stadium… Mais là c’est encore plus fort. » Après la génération Beto Márcico, la génération Branco ? « S’il y a victoire au bout, pour eux, ce serait clôturer la fin de leur histoire chez nous, une aventure collective qui dure depuis trois ans. Cette génération entrerait définitivement dans l’histoire du club », espère celui qui fréquente régulièrement le Stadium depuis près de quarante ans.
Le rugby, le foot ou les deux ?
Historique, la journée le sera forcément sur les bords de la Garonne, et pas seulement pour la bande de Philippe Montanier. Un peu plus tôt dans l’après-midi, le Stade toulousain jouera en effet en Irlande, face au Leinster, sa demi-finale de Champions Cup. L’occasion pour une ville largement portée sur la balle ovale de vibrer en double, alors que les deux rencontres seront diffusées successivement sur écran géant place du Capitole, entrecoupées par une représentation de La Traviata. « Je connais des dizaines de gens qui sont abonnés aux deux et qui ont compris que c’était tellement inédit pour le Tef qu’ils ont quelque part fait une croix sur le match de rugby et préfèrent venir à Paris plutôt que de s’occuper de la demi-finale de rugby. Je pense que ça a pris le dessus pour certains parce qu’ils sont gavés de titres de toute façon », en rigole Medy. « La ville de Toulouse aime le foot. Jusqu’à maintenant, ils étaient centrés sur le rugby parce que le TFC était à la peine, mais le foot est quand même plus populaire, ça amène beaucoup plus de monde », assure mamie Françoise du côté de la place Saint-Pierre.
Célébrer des finales, Toulouse connaît par cœur. La fête sera-t-elle différente cette fois avec le changement de forme du ballon ? « Au niveau de ceux qui resteront sur la ville, je pense que ce sera un peu similaire parce que tu n’auras pas les fanatiques du football, analyse Yves, qui garnira pour sa part le virage sud du Stade de France. Après, on l’a vu aussi au moment de la montée en Ligue 1, on ne célèbre pas de la même manière au rugby et au foot, par culture. » Peu importe pour Frédéric : « Tout le monde va vibrer pour une ville en fait, le rugby puis le foot. C’est l’occasion que les deux publics se retrouvent ensemble, ce sera chouette. Ça restera une grande soirée quoi qu’il arrive. » De celles dont on se souviendra pendant 66 ans.
Par Quentin Ballue et Tom Binet, à Toulouse
Tous propos recueillis par QB et TB.