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De Crakitic à Ivan la banquette
Deux saisons durant, le Croate a gagné une place d’indéboulonnable et de stakhanoviste dans le onze du Barça. Un numéro d'équilibriste qui lui a longtemps permis de jouir d’un statut de « favori » auprès de Luis Enrique, mais qui se retrouve aujourd’hui questionné par la concurrence d’André Gomes.
Les fêtes sont délicates à digérer pour Ivan Rakitić. Ce n’est pas tant que les excès se sont faits nombreux durant la courte trêve hivernale, mais le Croate n’arrive toujours pas à se mettre à l’heure de 2017. De fait, il ne fait partie d’aucun des onze alignés par Luis Enrique lors des trois dernières sorties blaugrana, sa seule titularisation remontant au premier revers annuel sur la pelouse de San Mamés. Que ce soit face à Villarreal, Bilbao, pour la manche retour, ou Las Palmas, il enfile la chasuble du remplaçant et attend son heure sous la guérite. Malgré des rumeurs faisant état de velléités de départ, lui avance un amour aveugle pour son coach dans les colonnes de France Football : « Si je devais me jeter d’un pont pour l’entraîneur, je le ferais, sans aucun doute. Luis Enrique m’a beaucoup aidé, il m’a tout de suite accordé sa confiance, et ça m’a permis de travailler tranquillement. Avec un regard ou un sourire, il te transmet la confiance nécessaire pour faire les choses bien. En plus, c’est lui qui a sollicité mon arrivée. » Et qui devrait encore faire appel à lui pour espérer quelque chose de cette seconde partie de saison.
« Favori d’Enrique » et marathonien blaugrana
Dans l’esprit de Luis Enrique, Ivan Rakitić forme, à l’instar de Mascherano ou de Busquets, l’un de ses meilleurs soldats de l’ombre. Capable de se dédoubler et de passer sous silence son ego, il remplit le rôle de stakhanoviste du onze catalan. Un statut qu’il gagne à la sueur de son front dès son premier exercice, couronné d’un triplé de titres et d’une réputation de relève de Xavi. Le « favori d’Enrique » , à en croire l’un des artisans de son transfert du Sánchez-Pizjuán vers le Camp Nou, se fait ainsi autant respecter pour ses efforts sur les prés que pour son tact envers l’institution. « Xavi ? Je ne vais remplacer personne. Je suis Ivan Rakitić et je veux triompher à Barcelone en étant Rakitić. Même si je sais que pour cela je dois travailler beaucoup » , clame-t-il sitôt son arrivée, à l’été 2014 et contre 18 millions d’euros, comme pour rappeler l’homme éduqué qu’il est. Toutes ces caractéristiques, ajoutées à un abattage de tous les instants sur le terrain, permettent au Barça de Lucho de trouver son équilibre après quelques mois de tâtonnement. Avant, finalement, de décrocher la lune avec la cinquième Ligue des champions de l’histoire du club.
Sa seconde campagne blaugrana relève, à quelques interférences près, du même acabit. Toujours omniprésent au milieu, incapable de calculer ses efforts et, surtout, impeccable dans sa communication catalane, Ivan Rakitić se confirme comme un homme qui compte dans le vestiaire azulgrana. Exemple à suivre, il construit son quotidien autour de l’obsession du résultat. Changement d’alimentation, coach personnel et programme individualisé à la maison rythme, en plus de ses entraînements, ses journées. « En plus d’une pièce pour y déposer tous les maillots qu’il collectionne, il vient de construire un gymnase dans sa maison. C’est sans doute pour cela qu’il court autant » , s’amuse Piqué, l’un des amis de vestiaire du Croate. Mais « courir m’importe peu si nous gagnons » , renchérit l’intéressé qui s’affirme comme le meilleur marathonien de l’effectif du Barça. Au total, sur ses deux premiers exercices, il prend part à 51 des 60 rencontres de son équipe (huit buts, dix passes), puis à 57 des 62 (neuf buts, six passes). Suffisant, donc, pour que la transition post-Xavi se passe dans les meilleures conditions.
La nouvelle concurrence d’André Gomes
Mais l’évidence Rakitić devient, après un Euro en trompe-l’œil pour la sélection au damier, une énigme pour le staff blaugrana. Bien que partant avec un avantage sur les autres milieux de l’effectif, exceptés Iniesta et Busquets, il doit désormais faire avec la nouvelle concurrence d’André Gomes et Denis Suárez, sans oublier celle de Rafinha et Arda Turan. De fait, dans un onze duquel ne sortent jamais MSN, Piqué, Busquets ou encore Iniesta, il devient le premier fusible à sauter. Et ce, à presque chaque rencontre des Culés qu’il quitte autour de l’heure de jeu. Pis, depuis quelques semaines, il perd même une place dans la hiérarchie établie par Luis Enrique, qui lui préfère souvent l’activité d’André Gomes. Suffisant, donc, pour qu’outre-Manche et en Castille des rumeurs de transfert naissent, les plus insistantes l’envoyant chez le Manchester City de Pep Guardiola. Lui assure pourtant vouloir rester et même prolonger son bail catalan, et travaille pour que « les hauts durent plus longtemps que les bas » . Il faudrait au moins ça pour percer le mystère de sa drastique baisse de forme, et pour que le Barça redevienne l’épouvantail qu’il a longtemps été.
Par Robin Delorme