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De Bruyne, sur les chapeaux de roue

Par Valentin Lutz
5 minutes
De Bruyne, sur les chapeaux de roue

Après une saison frustrante, entachée par des blessures à répétition, Kevin De Bruyne est revenu à la compétition avec fracas. En seulement quatre matchs de championnat, le milieu de terrain belge a déjà inscrit un but, délivré cinq passes décisives et proposé quelques démonstrations saillantes. Une aubaine pour un Manchester City plus affamé que jamais, ainsi que pour une sélection belge soucieuse d’asseoir son statut de superpuissance, dès ce jeudi, face à Saint-Marin.

À observer se produire Kevin De Bruyne en ce début de saison, on en viendrait presque à oublier que la silhouette et la démarche si singulières du milieu de terrain belge avaient été presque invisibles tout au long de la saison dernière. De fait, le meneur de jeu belge a vécu un exercice 2018-2019 quasiment vierge, passé à soigner une lésion chronique au ligament collatéral fibulaire du genou droit. De la sorte, De Bruyne n’a pris part qu’à 978 minutes de jeu en championnat (deux buts, deux passes décisives) et n’est apparu qu’à deux reprises sous le maillot de la Belgique, en fin de saison, face au Kazakhstan (3-0) et à l’Écosse (3-0). Entre-temps, les Citizens ont été sacrés champions pour la deuxième fois d’affilée (qui plus est avec la manne extraordinaire de 98 points) et les Diables rouges ont réalisé un quasi sans-faute (quatre victoires dans le cadre des éliminatoires de l’Euro, une seule défaite, face à la Suisse, en Ligue des nations), la marche victorieuse des deux formations a été ponctuée par l’arrière-pensée effrayante que celle-ci se réalisait sans celui qui peut être considéré comme son meilleur joueur.

Sur les chapeaux de roue

Mais Kevin De Bruyne est revenu ; et au cas où le message ne serait pas passé, le milieu de terrain a visiblement décidé dès ses premières sorties de graver dans les esprits la marque indélébile de sa classe. Le 25 août, face à Bournemouth (1-3), le Belge de 28 ans a en effet profité de sa forme étincelante pour renverser un record et entrer un peu plus dans l’histoire du championnat d’Angleterre : en offrant à Agüero le but de l’ouverture du score, De Bruyne a en effet atteint la barre symbolique des 50 passes décisives en seulement 123 matchs, soit le plus faible total jamais enregistré (dix-huit apparitions de moins que Mesut Özil, précédent détenteur). Le samedi suivant, face à Brighton (4-0), le Belge a dépoussiéré la cartouchière en inscrivant son premier but depuis près de cinq mois et a distillé une nouvelle passe décisive, pour porter son total à une réalisation et cinq offrandes en quatre rencontres. Impressionnant. Ainsi doté d’une nouvelle pièce d’orfèvre, Manchester City, qui était déjà l’une des machines les mieux huilées du Royaume, semble toujours plus intraitable.

Mais au-delà de l’aspect comptable, qui peut étonner par son ampleur, mais qui ne peut complètement surprendre étant donné les états de service du natif de Tronchiennes (42 buts et 68 passes décisives en 177 rencontres toutes compétitions confondues de 2015 à 2018), KDB impressionne par son aisance sur le terrain et par son rôle déterminant dans les performances quasi impériales de Manchester City. Particulièrement affûté physiquement, l’international belge (67 sélections, 15 buts) apporte une dimension supplémentaire et une profondeur inédite au jeu des Citizens : positionné à la base droite de l’attaque en W mise en place par Pep Guardiola, il rayonne par sa propension à jouer entre les lignes afin de proposer une solution au porteur, à déborder sur l’aile pour parfois en créer lui-même, mais surtout, à servir ses coéquipiers avec une précision diabolique et quasiment toujours dans le bon tempo.

L’art de dompter la foudre

De Bruyne dispose en effet d’une propension unique à trouver des solutions lointaines et directes, ainsi qu’à verticaliser le jeu grâce à des décalages tranchants, par la passe ou par la course. Surtout, en plus de sa qualité de passes et de sa vision du jeu, qui étouffent les défenses tout autant qu’elles permettent à son équipe de monopoliser le ballon et de se maintenir dans une situation d’attaque/défense, la principale qualité du jeu de De Bruyne consiste en sa capacité à libérer des espaces et à faire s’épanouir ses coéquipiers. Car en attirant les défenses vers lui, le meneur de jeu libère des espaces pour ses coéquipiers offensifs. De la sorte, défendre face à KDB devient un périlleux exercice d’équilibriste qui consiste à bloquer les menaces sans libérer d’espaces. Or, pour l’instant, personne n’est encore réellement parvenu à déjouer l’influence de De Bruyne ; pire, à la faveur de son sens du placement et de l’anticipation, le maestro des Citizens donne pour l’instant l’impression de rendre tout bonnement impuissant l’ensemble des systèmes défensifs mis en place pour le contrer.

À l’occasion de la rentrée des Diables rouges, ce vendredi face à Saint-Marin et lundi contre l’Écosse, le défi pourrait être tout aussi ardu pour les adversaires de la Belgique. Car si la densité de la sélection belge est sans doute moins importante que celle de Manchester City, surtout en l’absence des frères Eden et Thorgan Hazard, tous deux blessés et forfaits, l’ancien joueur de Wolfsburg aura néanmoins à ses côtés un certain nombre d’éléments plus que difficiles à gérer : entre Youri Tielemans, auteur d’un début de saison abouti avec Leicester, avec qui il pourrait être associé au milieu, Dries Mertens, Romelu Lukaku ou encore Divock Origi, la Belgique pourrait donner un certain nombre de maux de tête aux défenses adverses. D’autant qu’avec un De Bruyne intenable, les schémas de passe et de mouvements, tout comme l’attaque redoutable de la Belgique (onze buts en quatre matchs), pourraient s’avérer dévastateurs. En l’absence de son meneur de jeu, celle-ci a prouvé qu’elle savait gagner avec la manière, mais avec un De Bruyne en pleine bourre, Saint-Marin et l’Écosse sont prévenus. Une démonstration ne dépend que de quelques éclairs : pour un adepte de la foudre, quelques passes tonitruantes pourraient suffire.

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