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Comment les bars s’organisent pour diffuser la Ligue 1
Avec un abonnement atteignant 29,99 euros par mois (avec engagement) pour les particuliers et 199 euros pour les bars, la reprise de la Ligue 1 sur DAZN fait grincer des dents. Face à cette inflation, les établissements doivent s’organiser et se retrouvent face à un choix : la légalité, l’illégalité ou l’écran noir.
La flambée des prix imposés par DAZN, le nouveau diffuseur du championnat de France, ne fait pas seulement grogner les supporters. Du côté des bars, on tire aussi la tronche. Les établissements où la bière coule à flots se présentent pourtant comme une solution de repli intéressante pour les amateurs de ballon rond pour ne pas avoir à souscrire des abonnements à foison pour voir leur équipe préférée ou simplement un Toulouse-Angers. Bien sûr, ce n’est pas gratuit non plus pour les bars : il faut se baser sur le nombre d’écrans, et une offre basique s’élève par exemple à 218 euros par mois pour deux téloches, comme relaté par Le Parisien. Le quotidien francilien précise que Canal + propose un pack avec beIN Sports, Eurosport et DAZN à 278,99 euros (puis 333,90 après huit mois), dont une grande partie rien que pour DAZN. L’inflation existe pour tout le monde et certains tenanciers se retrouvent face à un choix capital : continuer à diffuser du foot en toute légalité, mais en payant très cher ; miser sur des techniques illégales ; ou tout simplement tirer un trait sur la diffusion des matchs.
Pour certains établissements, et notamment les bars sportifs, l’abonnement à DAZN est un mal nécessaire. C’est le cas pour Le Meteor à Strasbourg ou encore Le Rookies à Marseille, qui doivent assurer la diffusion de tous les matchs et de tous les sports, conformément à la promesse de base. Ces abonnements « sont les nerfs de la guerre pour nous », confirme la responsable du bar alsacien. Dans la cité phocéenne, où l’OM est comme une religion, le bar du 1er arrondissement suit la même logique : les prix ont grimpé, mais les soirées dédiées à l’équipe marseillaise sont trop importantes pour la rentabilité, encore plus quand il s’agit des rencontres à l’extérieur. « Marseille et l’OM, c’est plus fort que ça, insiste-t-elle. Ne pas diffuser les matchs, c’est perdre une partie de notre âme. » Le moindre manque à gagner pourrait peser lourd dans son chiffre d’affaires, et le bar serait déserté les jours de matchs de l’OM si les téléviseurs restaient éteints.
Hésitations, IPTV et Serie A
Pour d’autres, la pilule est plus dure à avaler. Comme pour le Moulin 1883, à Lyon, qui a décidé de faire l’impasse sur la Ligue 1 cette saison. « Nous, on n’a pas pris l’abonnement DAZN, parce que c’est bien trop cher, explique le patron, Junior. Il faut prendre l’abonnement Canal+, beIN, et rajouter un abonnement avec un prix excessif en plus. La majorité des bars lyonnais ont décidé de ne pas diffuser. » Peut-être une bonne nouvelle pour ceux qui ont voulu s’épargner la gifle reçue d’entrée à Rennes le week-end dernier, mais une stratégie potentiellement risquée à moyen terme. Pour ces bars, l’enjeu premier est de « faire face à la période creuse en cours », et de continuer à offrir une ambiance conviviale et attrayante, même sans les matchs de Ligue 1. Quels retours chez les clients ? Ils sont déçus, mais la majorité comprend la démarche, nous assure-t-on.
Même chose pour Lucas, responsable d’un bar en centre-ville de Montpellier. À la différence près que l’Héraultais, qui n’a sans doute pas prévu de se faire un restau tous les vendredis soir, hésite encore. « Pour l’instant, on n’a pas pris l’abonnement, on n’est qu’au début de la saison, donc on attend de voir, pose-t-il. Mais payer 199 euros juste pour les matchs de Ligue 1, c’est mort. » Seulement, les tarifs ne risquent pas de baisser comme par magie, pour les téléspectateurs comme pour les commerçants. Comme le simple fan dans son canapé, le tenancier de bar a entendu parler des solutions de secours, pas toujours très légales, de Telegram à l’IPTV, déjà très démocratisée dans les lieux de boissons. « Je me dis : pourquoi pas sauter le pas pour le bar, admet Lucas. Au moins, on aura toutes les chaînes et l’année revient même moins cher que juste DAZN pour un mois. »
Il pourrait passer un coup de fil à certains de ses confrères de la capitale, entre autres, qui n’ont pas attendu pour sauter sur cette occasion. Sans aucune hésitation. C’est le cas pour ce bar situé dans le 5e arrondissement. « Ça fait quelques années déjà qu’on fonctionne avec l’IPTV, assume le proprio. Mais cette année, la question ne s’est même pas posée, 199 euros par mois juste pour la Ligue 1, c’est du foutage de gueule. » Surtout lorsqu’on parle de huit des neuf matchs par journée. Ce choix, bien que risqué, devient de plus en plus courant dans les établissements parisiens, où la clientèle, souvent jeune et avertie, comprend et soutient ce type d’initiative. Le championnat de France n’est pas le seul à poser problème, d’ailleurs. « J’avais des clients qui venaient pour la Serie A, et pour le moment, on ne sait pas où elle sera diffusée. C’est super mal foutu », continue le patron, qui a vu comme tout le monde que le championnat italien n’avait toujours pas trouvé de diffuseur en France à l’aube de sa deuxième journée. Ce n’est décidément pas facile d’être un fan de foot dans l’Hexagone cet été.
Par Nesrine Bourekba
Tous propos recueillis par NB