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David Moyes, un chat noir chez les miraculés…
Encore sauvé d’une relégation qui lui était promise par un énième exploit du pompier Sam Allardyce, Sunderland repart pour une nouvelle saison avec un entraîneur à la relance : David Moyes. Le Moyes faiseur de miracles de l’époque Everton ou le Moyes qui n’a pas pu assurer la succession de Sir Alex à Manchester United avant de manquer son aventure espagnole ? Une chose est sûre : les Black Cats seront en mode underdogs, comme d’habitude…
Dix à la suite. La saison 2016/2017 sera la dixième de rang avec Sunderland aligné en Premier League. Une anomalie ? Pas forcément. Ce club du nord de l’Angleterre est un véritable bastion historique du football outre-Manche, avec un palmarès loin d’être vilain – six championnats, deux FA Cup – même s’il commence à dater. Un exploit ? Pas vraiment non plus. Sunderland n’est pas le moins doté financièrement des clubs de l’élite, encore moins le plus à plaindre au niveau infrastructures avec une enceinte – le Stadium of Light – vieille d’à peine vingt ans et qui figure parmi les plus agréables, que ce soit pour les joueurs ou pour les spectateurs. Un miracle alors ? Oui, ça, clairement oui. Depuis quasiment une décennie, Sunderland s’affiche comme l’un des candidats les plus crédibles à la relégation et n’est jamais parvenu à se hisser dans la première moitié de tableau. En 2013/2014, il passe même 24 journées dans la zone de relégation. La saison suivante, il en sort in extremis à trois journées de la fin. La saison dernière, c’est encore plus à l’arrache : 28 journées passées au-dessous de la ligne de flottaison et une 17e place comme meilleur classement ! Les Black Cats ont une chance incroyable de faire encore partie de l’élite du football anglais (et gallois). Une chance incroyable mais aussi une belle force de caractère pour s’en sortir à chaque fois d’extrême justesse, avec comme dernier capitaine de navire à la dérive un habitué des situations désespérées : Sam Allardyce, nommé depuis la fin de l’Euro à la barre de la sélection anglaise, et donc remplacé par David Moyes dans la banlieue de Newcastle.
Moyes seul coupable de l’échec MU ?
L’Écossais de 53 ans a signé fin juillet un joli contrat de quatre ans avec Sunderland et fait donc son retour en Premier League après quelques mois de chômage et surtout deux précédentes expériences douloureuses. Élu trois fois meilleur coach du championnat lorsqu’il était à la tête d’Everton (2003, 2005, 2009), Moyes s’était vu confier la lourde responsabilité de succéder à Sir Alex Ferguson du côté de Manchester Utd. Sur le papier, c’était bien vu, ça semblait cohérent, c’était raccord avec l’esprit d’un club voulant reconstruire sur la durée. Sauf que l’expérience ne dura que le temps d’une saison 2013/2014 complètement ratée. Le costume était-il trop grand pour Moyes ? La succession trop lourde à assumer ? Fallait-il tout de même lui laisser le temps de reconstruire à sa manière ? Lui avait-on donné tous les moyens pour le faire ou avait-il commis des erreurs d’appréciation en ne confiant pas les clés de l’équipe aux bons joueurs ? On ne saura jamais vraiment la part de responsabilité de l’entraîneur dans cet échec puisqu’il fut dégagé sans aucune élégance et bien plus tôt que prévu. Le tout sans que son successeur Louis van Gaal, avec des moyens bien plus colossaux, ne réussisse à faire tellement mieux… Pour Moyes, le plan de relance du côté de la Real Sociedad ne fonctionna pas plus, avec seulement 47 matchs à la tête de la formation de San Sebastián, pour un famélique bilan de douze victoires.
La jurisprudence Leicester
Résumons : sont désormais dans la même galère, un club, Sunderland, dont tout le monde se demande encore ce qu’il fait en Premier League, et un entraîneur, David Moyes, qui sort de deux échecs qui lui ont fait perdre une bonne partie du crédit accumulé chez les Blues d’Everton. Cela va-t-il forcément déboucher sur une vilaine saison ? Pas forcément, même si les Black Cats figurent encore parmi les plus solides candidats à la relégation, avec les trois promus, sans oublier WBA et Watford (voire Bournemouth). Le premier motif d’espoir, c’est que David Moyes revient justement dans un cadre qui lui convient, plus raisonnable, moins passionnel et agité que lorsqu’il a quitté la discrète Everton pour relever le défi MU. Le second, c’est qu’il y a désormais la jurisprudence Leicester, ancien miraculé qui s’est maintenu de justesse au printemps 2015 avant d’enchaîner avec la saison que l’on sait… Il n’est bien sûr pas question pour Sunderland d’envisager de jouer les premiers rôles dans cette Premier League, mais il semblerait bien que ce championnat soit de plus en plus homogène et imprévisible. Même une formation comme Sunderland peut aborder la nouvelle saison sans claquer des dents, et d’ailleurs elle ne se prive pas de le faire, à l’image d’un Moyes qui a déjà retrouvé enthousiasme et ambition. « Mon travail est de gagner des matchs. Peut-être qu’au début, nos victoires ne seront pas belles, mais sur le long terme, je veux que les supporters prennent du plaisir » , a-t-il annoncé, avant de demander de la stabilité – pas idiot pour un club qui a épuisé six entraîneurs en cinq ans – et de se montrer élogieux vis-à-vis de son nouvel employeur, estimant que « Sunderland a un potentiel que beaucoup de clubs n’ont pas » .
S’inspirer du recrutement hivernal réussi
En l’état, l’effectif paraît pourtant limité, d’autant plus avec les départs de M’Vila et Yedlin, qui n’étaient que prêtés et qui faisaient partie des cadres de l’opération maintien réussie au printemps dernier. David Moyes peut néanmoins s’appuyer sur des certitudes nées des performances de la deuxième moitié de saison 2015/2016, avec l’apport des recrues de l’hiver : l’ancien Lorientais Lamine Koné, qui forme une charnière fiable avec Younès Kaboul, l’Allemand Jan Kirchhoff, très propre en milieu défensif, et Wahbi Khazri, en réussite pour ses débuts en Premier League. En attaque, l’éternel Jermain Defoe est toujours là, toujours très performant, mais il file droit vers ses 34 ans et est actuellement blessé… Moyes souhaite au moins trois renforts, dont un latéral droit (retour de Yedlin ?). Les deux autres pourraient être Marouane Fellaini et Adnan Januzaj, soit son ancien homme fort de l’époque Everton avant de l’emmener dans ses valises à United, et l’éternel jeune prodige qu’il a lancé à Manchester. La preuve que Moyes, s’il est désormais tourné vers un défi aussi nouveau que difficile, garde tout de même un œil dans le rétro en cherchant à puiser dans ses réussites passées. Et s’il faisait mentir ce vieil adage : « on ne se refait pas » ? La question est posée.
Par Régis Delanoë