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Daniel Cousin : « On m’a mis des bâtons dans les roues »

Propos recueillis par Alexis Billebault
6 minutes
Daniel Cousin : « On m’a mis des bâtons dans les roues »

Daniel Cousin (42 ans), nommé sélectionneur du Gabon en septembre dernier, a été viré après l’élimination des Panthères en qualifications pour la CAN 2019. L’ex-attaquant du Mans et de Lens livre sa version des faits, allume au passage le ministre des Sports, et soulève plusieurs questions sur le fonctionnement interne de la sélection.

Quelques jours après le match nul au Burundi (1-1, le 23 mars), vous avez appris que votre mission s’arrêtait là, alors que votre contrat courait jusqu’au 31 juillet. Cela n’a pas vraiment dû vous surprendre, connaissant le contexte local…En effet. Avec l’attitude de la Fédération et du ministère des Sports, qui ne cessaient de me mettre des bâtons dans les roues, je m’y attendais forcément.

Des bâtons dans les roues ?Oui. Je souhaitais mettre en place un projet sportif, en m’inscrivant dans la durée, sur deux ans. Par exemple, mettre en place un règlement intérieur, ce qui n’a, à ma connaissance, jamais été fait en sélection, afin d’instaurer une vraie discipline. Sur les horaires à respecter, sur l’obligation, quand les joueurs arrivent à Libreville, de rejoindre le lieu de rassemblement avant d’aller voir la famille. Je voulais aussi organiser plus régulièrement des stages avec les locaux, créer une école de gardiens de but. Et pour la sélection A, professionnaliser les choses, pour les stages, notamment. J’avais été nommé en septembre. Ce projet, je l’ai remis en janvier au ministre des Sports (Alain-Claude Bilie-By-Nzé). Il ne m’en a jamais parlé. Quand j’ai voulu évoquer le sujet avec lui, il m’a dit qu’on devait régler les choses à propos de mon contrat et de mes salaires. En gros, que c’était l’un ou l’autre.

La préparation du match face au Burundi a été assez révélatrice du bordel permanent qui entoure le fonctionnement de la sélection…

Le premier jour de regroupement, on a appris au dernier moment que le terrain où on devait aller était inaccessible en raison d’une grève.

J’avais demandé certaines choses. Aller voir quelques joueurs en Europe. On m’a répondu qu’il n’y avait pas de moyens. Puis je souhaitais organiser le stage de préparation au Rwanda, un pays frontalier du Burundi, pour des raisons climatiques, et aussi parce que le Rwanda dispose d’un centre technique de qualité, avec un terrain synthétique, comme celui de Bujumbura au Burundi. J’avais fait un budget global de 25 millions de francs CFA environ (38 000 €) pour les visites aux joueurs et le stage. Pas de réponse. Du coup, on s’est préparés à Libreville. Le premier jour de regroupement, on a appris au dernier moment que le terrain où on devait aller était inaccessible en raison d’une grève. Nous avons donc dû nous replier sur un terrain en banlieue, qui n’était vraiment pas en bon état.

Le départ pour Bujumbura, la veille du match, a été folklorique…L’avion privé devait décoller à 9h, pour une arrivée au Burundi vers midi, et un entraînement à 15h. Les joueurs se lèvent à 7h, et on devait nous donner le signal pour rejoindre l’aéroport. Seulement, le coup de fil est arrivé beaucoup plus tard. Les joueurs sont partis se recoucher, car l’avion n’a décollé qu’à 12h30. Le ministre des Sports et le vice-président de la République y avaient pris place. Tout le monde savait qu’on partirait plus tard, sauf le staff et les joueurs. Résultat, tout a été décalé et l’entraînement à Bujumbura a eu lieu plus tard, alors qu’il faisait presque nuit !

Dans cet avion, outre les personnalités politiques évoquées, avaient pris place Pierre Aubame, le père de Pierre-Emerick Aubameyang, ainsi que ses deux frères, Willy et Catilina. Est-il exact que cela a choqué certains joueurs ?

Que Pierre Aubame, ancien capitaine de la sélection, soit dans l’avion, pas de problème. C’est une personnalité importante au Gabon. Cela résulte sans doute d’accords entre lui et le ministre.

Que Pierre Aubame, ancien capitaine de la sélection, soit dans l’avion, pas de problème. C’est une personnalité importante au Gabon. Cela résulte sans doute d’accords entre lui et le ministre, je ne sais pas et à la limite, ce n’est pas un souci. Mais sinon… Je me rappelle qu’avant un match au Soudan du Sud (1-0), en octobre, un joueur était venu me dire, mi-ironique, mi-sérieux, qu’il aimerait lui aussi que sa famille vienne avec lui.

Vous parliez de règlement interne. Pierre-Emerick Aubameyang n’est arrivé que le mercredi à Libreville, a dormi la première nuit dans sa maison plutôt qu’à l’hôtel où était regroupée la sélection. Pourquoi est-il arrivé si tard au Gabon ?Je l’avais convoqué pour ce match décisif. Je n’allais pas le supplier de venir ! Et quand je cherchais à en savoir plus, on me répondait qu’on négociait avec lui. Cela a duré plusieurs jours, et Pierre-Emerick est arrivé le mercredi à Libreville. J’ai parlé avec lui, il m’a dit qu’il avait dû honorer un rendez-vous médical. Mais était-il normal que la Fédération négocie avec le capitaine de la sélection pour un match de cette importance ? C’était oui ou non, mais de là à négocier…

Le ministre des Sports, en plus de votre limogeage, a annoncé la dissolution de la sélection…

Le ministre veut tout révolutionner. Il compte s’appuyer sur les jeunes, sur les locaux ? J’avoue que j’ai du mal à bien comprendre.

(Il coupe.) Est-ce que cela veut dire que tous les joueurs qui étaient au Burundi ne sont plus considérés comme sélectionnables ? Ils doivent se poser la question. La Fédération a lancé un appel à candidatures pour un nouveau sélectionneur. Et que va-t-on lui dire quand il va arriver ? Il va vouloir savoir avec quels joueurs il va disputer les qualifications pour la CAN 2021 et la Coupe du monde 2022. Le ministre veut tout révolutionner. Il compte s’appuyer sur les jeunes, sur les locaux ? J’avoue que j’ai du mal à bien comprendre. Ce qui me semble évident, c’est qu’il ne connaît vraiment pas grand-chose au football. Ce n’est pas son monde.

Au fait, avez-vous récupéré tout votre argent ?J’ai récupéré une partie de mes salaires de manager de la sélection. J’attends le reste…

Pour terminer, pouvez-vous nous parler de l’affaire Gilchris Nguéma, qui vous aviez sélectionné pour le match au Burundi, avant d’être obligé de le retirer de la liste, car il n’avait pas de club ?Quand je l’avais rencontré à Libreville, il venait de quitter un club de Macao (Benfica) et partait en Chine, pour y signer un contrat. Il m’avait d’ailleurs envoyé des vidéos de lui, en matchs amicaux visiblement. Et quand on a envoyé sa convocation, le club chinois nous a répondu qu’il n’avait finalement pas signé. J’ai contacté le joueur, qui m’a confirmé. Voilà… Ensuite, la Fédération a pondu un communiqué pour annoncer que Nguéma n’était plus retenu. Je n’avais même pas répondu. Ce n’est pas la première fois qu’un joueur sans club était malgré tout convoqué par le Gabon. Et puis, on a fait beaucoup de bruit pour un joueur que j’avais pris en doublure d’Ecuele Manga…

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Propos recueillis par Alexis Billebault

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