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Cristiano Ronaldo : super seum
En se montrant sans filtre dans une interview choc accordée à Talk TV, Cristiano Ronaldo a laissé planer le doute sur son avenir à Manchester United. Mais cette sortie médiatique, conjuguée à son mauvais début de saison, témoigne surtout d'une forme d’impuissance pour le joueur de 37 ans.
« Tu n’es jamais plus grand qu’un club. Tais-toi et reste à ta place ! » Comme à l’accoutumée, Zlatan Ibrahimović n’y va jamais de main morte au moment de s’en prendre à quelqu’un d’autre. Et si ses mots s’adressaient ce jour-là à Kylian Mbappé, le géant suédois aurait pu tenir le même discours face à Cristiano Ronaldo. Dans un lourd entretien accordé au journaliste britannique Piers Morgan pour Talk TV et publié dans les colonnes du Sunlundi matin, le Portugais a dressé le bilan de Manchester United depuis son retour en 2021. Tout le monde en a pris pour son grade. Mais dans cette tornade de critiques, le goleadorde 37 balais a peut-être oublié que lui-même n’était pas irréprochable.
Battu par K.-O.
« Depuis le départ de Sir Alex Ferguson, il n’y a pas eu d’évolution au club, zéro progrès. Rien n’a changé. Ni bain à remous, ni salle de sport… pas même la cuisine, enclenche Ronaldo dans la fameuse interview. Ils ont comme arrêté le temps. Ça m’a beaucoup surpris, car je pensais y trouver des choses différentes. Mais malheureusement, j’ai retrouvé des choses que j’avais déjà vues quand j’avais 20-21 ans. » D’entrée de jeu, le quintuple Ballon d’or s’en prend à Manchester United en utilisant malicieusement la carte du tacticien écossais, chère aux admirateurs des Red Devils, avant de régler ses comptes, sans pitié, avec différents visages du club. À commencer par son entraîneur Erik ten Hag : « Je n’ai pas de respect pour lui, car il n’en a jamais eu pour moi. » Ronaldo lève aussi le voile sur sa non-participation lors de la présaison mancunienne et la décision de l’entraîneur néerlandais d’écarter son joueur du groupe. Son absence était en réalité liée à l’hospitalisation de sa fille, alors âgée de trois mois. « Il n’y a eu aucune empathie pour ma fille malade », a révélé le papa. Dans la foulée, le Portugais pointe du doigt l’arrivée de Ralf Rangnick en décembre dernier. « Après le départ de Solskjær, le club a fait venir un directeur sportif. Un choix que personne n’a compris. Il n’est même pas coach… Cela a surpris le monde entier. Si tu n’es même pas entraîneur, comment tu veux être le boss ? Je n’avais jamais entendu parler de lui avant. » Enfin, Wayne Rooney a aussi mangé son uppercut après avoir sévèrement critiqué l’attitude de son ancien coéquipier : « Je ne sais pas pourquoi il me critique si méchamment… Probablement parce qu’il a terminé sa carrière et que je joue toujours au haut niveau. » Face caméra dans cette sortie ficelée depuis de nombreuses semaines, l’ancien joueur du Real Madrid erre comme une âme en peine et assure que les dirigeants lui ont même indiqué la porte de sortie. « Pas seulement le coach, mais des gens du club. Je me suis senti trahi. Je ne devrais peut-être pas dire ça, mais je m’en fiche, les gens doivent entendre la vérité. J’ai le sentiment que certaines personnes ne veulent pas de moi ici, cette saison, mais aussi la saison dernière. » Comme un boxeur désemparé, allongé sur le ring, Ronaldo se lâche nerveusement sans pour autant se relever. Parce que oui, si ses fans les plus acharnés prendront à cœur de défendre leur idole, il est difficile de voir cette sortie médiatique autrement que comme un aveu de faiblesse.
Mauvais timing
Capable des plus grands coups d’éclat, le numéro 7 des Red Devils semble se mentir à lui-même en se présentant comme l’homme de la situation. En témoignent ses copies de plus en plus révoltantes. Le Portugais compte par exemple plus de fautes commises cette saison en Premier League (7) que de tirs cadrés (6). Bien loin de ses standards, CR7 a aussi converti seulement 4% de ses tirs dans l’élite anglaise en dix rencontres, révélait Opta il y a peu. Quatre fois moins que l’édition 2021-2022 ponctuée par 18 réalisations en 30 apparitions. Des chiffres choquants pour un joueur d’un tel niveau. C’est donc dans ce contexte que Ronaldo a décidé de s’en prendre à un club dont il connaissait toutes les difficultés au moment de signer. Au-delà des critiques sur l’évolution du club depuis son départ vers Madrid en 2009, le Portugais savait sans aucun doute qu’il mettait les pieds dans une équipe en manque de confiance, malade à souhait depuis le départ de Ferguson, et qui cherche désespérément à renouer avec un glorieux passé.
Celui qui assurait en septembre 2021 « ne pas être ici pour les vacances, mais pour gagner à nouveau » est aujourd’hui bien loin du compte. « Pour revenir ici, j’ai suivi mon cœur. Sir Alex m’a dit :« C’est impossible, tu ne peux pas aller à Manchester City. »Et j’ai dit :« Ok boss. »Désormais, il sait mieux que quiconque que le club n’est pas sur la voie qui doit être la sienne. Mais comme Picasso l’a dit, il faut parfois tout détruire pour reconstruire. Et s’il faut commencer par moi, ce n’est pas un souci. » Pour le moment, le club a simplement assuré « avoir pris note de cette couverture médiatique » via un communiqué. Aucune sanction n’a été prise. Mis à l’écart par Erik ten Hag après un geste d’humeur il y a deux semaines, Ronaldo ne fait de toute façon plus soulever les foules. Dans le déni ? Peut-être. Sur le déclin ? Sûrement. Ce qui est certain, c’est qu’il est difficile de penser que Ronaldo portera à nouveau la tunique des Red Devils après la Coupe du monde.
Par Matthieu Darbas