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Cristiano Ronaldo pris en Ten Hag
Mis à l’écart du groupe avec Manchester United, Cristiano Ronaldo s’est de nouveau attiré les foudres d’Erik ten Hag. Une nouvelle escalade dans les tensions reliant les deux hommes, aux allures de rupture définitive.
L’image a fait le tour du monde. À la 87e minute de ce Manchester United-Tottenham (2-0), Cristiano Ronaldo rentrait aux vestiaires en courant, lassé de s’échauffer dans le vide et conscient qu’Erik ten Hag ne compterait – une nouvelle fois – pas sur lui. De leur côté, les médias anglais avancent la thèse d’un refus du joueur de 37 ans d’entrer en jeu pour les deux ultimes minutes de jeu, alors que le résultat semblait déjà scellé. Un geste surprenant pour certains, choquant pour d’autres, mais plutôt compréhensible dans les faits.
Les amnésiques de Carrington
La fracture s’est ainsi dessinée dès l’été. Au détour de rumeurs de transferts parfois amplifiées, souvent infondées, Cristiano Ronaldo s’est effectivement décidé à prolonger, d’une saison supplémentaire, son aventure mancunienne. L’erreur à ne pas commettre, certainement. En poste depuis le mois d’avril, Erik ten Hag s’est ainsi résolu à un tacite accord avec le Portugais, le faisant reculer dans la hiérarchie, en échange d’un apport moral auprès de ses coéquipiers. En réalité, il s’agira du dernier pot commun entre les deux hommes. Décidé à dicter sa ligne de conduite, le Batave n’a pas hésité à sacrifier Ronaldo, au profit d’un système sporadiquement fonctionnel.
Sur la ligne offensive, il est en effet difficile d’y voir clair, tant les changements effectifs et les rotations pleuvent. Étincelant en sélection, Christian Eriksen peine ainsi à mener le jeu des Red Devils, empêtré dans un axe bouché par la présence imposante de Bruno Fernandes. Le Lusitanien est branché sur courant alternatif depuis la fin de saison dernière, après avoir pourtant laissé entrevoir quelques éclaircies. Deux meneurs, en difficulté pour servir des attaquants guère inspirés, à l’image de l’inconstant chronique Jadon Sancho et du méconnaissable Marcus Rashford. Dans cet amoncellement d’incohérences techniques, difficile donc de trouver trace d’une responsabilité propre à Cristiano Ronaldo, dont la seule priorité semble finalement d’apporter son aide à un coach peu enclin au compromis.
Car à y analyser les informations distillées ça et là, le nœud du problème résiderait dans l’attitude « néfaste » de CR7. Un argument légèrement bancal, en observant le simple passif de l’intéressé. De sa première aventure à Manchester United, à la Juventus, en passant par le Real Madrid ou la Selecção, Cristiano Ronaldo n’aura en effet jamais fait parler de lui pour de supposés manquements sportifs. En dépit d’un caractère affirmé, devenu marque déposée, le trentenaire a, à l’inverse, toujours été loué pour son professionnalisme et sa bienveillance. À tous les niveaux du vestiaire. Mieux, comment expliquer que six mois en arrière, Ronaldo achevait sa saison 2021-2022 au deuxième rang du classement des buteurs de Premier League (dix-huit réalisations) ? Meilleur artificier du club avec 24 buts au total (dont 6 en Ligue des champions), l’attaquant entamait donc ses vacances estivales avec le sentiment du devoir grandement accompli. Tout cela avant qu’en septembre, l’amnésie ne s’empare de Carrington.
Le bout du rouleau et celui du tunnel ?
Comme le révèle le Times, l’origine du mal se situerait donc dans les « méthodes dogmatiques » de Ten Hag, tel que l’aurait suggéré Ronaldo aux membres du staff. Affecté par certaines décisions venues fragiliser son rôle de cadre au sein d’un effectif relativement jeune, le Portugais s’est donc logiquement braqué. Tel qu’avancé dans le quotidien, le Madérois se serait également plaint de « la qualité et de la quantité des exercices proposés à l’entraînement », mais également des libertés octroyées à certaines jeunes pousses. Un point sur lequel s’est d’ailleurs attardé le numéro 7, à plusieurs reprises. « Le respect a toujours été primordial dans mes prises de décision et j’ai toujours pris en exemple des joueurs plus expérimentés, pour ensuite devenir moi-même un exemple », pouvait-on ainsi lire dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux ce jeudi soir.
De même, au détour d’une interview accordée à Sky Sports en janvier dernier, déjà. « À mes 18 ans, des joueurs plus âgés m’ont recadré, et j’ai pris cela comme des conseils, pas des invectives. Cette nouvelle génération ne semble pas prête à accepter les critiques. Dès lors, si vous ne voulez pas de mon aide et de mes conseils, au moins faites le travail et aidez l’équipe. » Une manière d’illustrer un ras-le-bol général, pour l’une des plus grandes figures sportives du XXIe siècle, dont la légitimité est aujourd’hui remise en cause par un entraîneur euphorique. Cette même légitimité dont jouirait n’importe quel athlète de sa stature. Catalyseur silencieux, Erik ten Hag semble donc vouloir croiser le fer avec son plus grand cadre, au nom d’une quête de crédibilité nuisible et de principes farfelus. Mais à 37 ans, malgré les tumultes et avec une carrière chargée outre-mesure, il en faudra plus pour faire fléchir Cristiano Ronaldo. À Manchester ou ailleurs.
Par Adel Bentaha