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« Créer un terrain de foot virtuel géant »

Propos recueillis par Florian Dacheux
7 minutes
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Du 5 juin au 10 juillet, La Villette passe en mode football avec un événement festif et artistique intitulé « Foot Foraine ». Au menu : expositions, Café des Sports, fête foraine vintage, tournois sur terrains décalés ou encore ateliers jeune public. Entretien avec Pierre Giner, artiste inclassable à l'origine de Soccer Party Club, une installation immersive au cœur des jeux vidéo de football.

C’est difficile de vous classer dans une catégorie d’artistes. Qui êtes-vous ?Je suis artiste, commissaire d’exposition et scénographe sur les sujets du numérique et de la société électronique. Ce qui m’intéresse, c’est d’imaginer la plupart du temps des dispositifs numériques en lien avec les contenus et les usages dans un dispositif de vision pour lequel on serait au milieu d’un sujet. Je suis d’une génération d’artistes qui s’est mis au numérique en faisant les beaux-arts. Je viens de la vidéo, du numérique et des jeux vidéo pour y avoir joué. Puis j’en ai produit. Ce sont deux actions très proches : jouer et produire des images.

Qu’est-ce qui vous attire dans le jeu vidéo ?Le jeu vidéo m’intéresse en tant qu’artiste, car on ne peut pas l’ignorer. Énormément de gens y jouent. C’est en quelque sorte un nouveau médium qui existerait. C’est intéressant de se demander ce que les gens se racontent. Ce qu’il se passe quand ils regardent ce genre de choses. Et en même temps se demander ce que l’on pourrait produire à cet endroit-là.

Votre premier jeu vidéo ?Un jeu vidéo de bagnoles. J’en ai fait toute une série, où l’on progressait dans des espaces déserts avec le risque de tomber de l’autre côté. Les jeux vidéo, ce sont des plateaux finalement. Et ces jeux de voiture menaient à l’accident.

On a produit un jeu vidéo d’avion sans sol, un fly simulateur. On n’atterrit pas, on est pris dans la météo. C’était beau et flippant.

On tombait dans le vide. J’ai également produit un jeu de simulation assez pointu, c’était comme un plan séquence dans un film. Un jeu qui générait de la route, accompagné de musique, comme un grand road movie. Et un troisième basé sur les événements de 2001 au World Trade Center. Un jeu d’avion. J’avais appris que des terroristes s’entraînaient dans des écoles de pilotage pour apprendre à décoller, mais pas pour atterrir. On a produit un jeu vidéo sans sol, un fly simulateur. On n’atterrit pas, on est pris dans la météo. C’était beau et en même temps flippant comme projection dans l’espace.

Vous êtes un peu un enfant du numérique qui participe à une certaine révolution…Je crois que oui, on est tous dedans. On a l’impression de ne pas y être, mais c’est déjà passé. Je suis sans doute un enfant du numérique, ou plutôt un vieillard (né en 1965, ndlr). Finalement le jeu vidéo a 50 ans, ce n’est pas un truc neuf. Je suis en train d’écrire une exposition sur le hacking, par exemple. Cela remonte aux années 60. C’est ça qui m’intéresse, cette culture populaire, électronique, musicale, cinématographique. Toutes ces cultures du jeu vidéo avec la SF, l’informatique, elles sont là depuis longtemps. On est capable de vivre dans deux mondes imbriqués. Et dans le jeu vidéo, il y a le monde de la simulation et le monde tangible dans lequel on est.

Comment vous êtes-vous retrouvé sur l’événement Foot Foraine à La Villette ?J’ai déjà participé avec Didier Fusillier, le président de la Villette, à l’exposition Lille 3000 Collector. J’avais monté une pièce qui fonctionne comme un jeu vidéo où l’on circule au milieu des œuvres de façon aléatoire. Puis j’ai fait l’exposition Ultima l’été dernier à Nantes sur une histoire des jeux vidéo. Une expo assez marrante éditée par la revue L’Étape, où l’on parle du jeu vidéo sous toutes ses formes. C’est une expo immersive où l’on peut jouer. Les gens s’engagent, participent. Ils sont eux-mêmes les acteurs de l’exposition. Ils y contribuent en l’activant.

De là est né votre projet de Soccer Party Club…C’est tout à fait ça. Pour La Villette, c’est une sorte de monument jouable dédié aux jeux vidéo de foot.

Ici, tout le monde va contribuer au déploiement d’un terrain de foot virtuel géant produit par la réactivation à l’échelle de la Grande Halle de La Villette de jeux vidéo mythiques oubliés.

Ce sont des objets qui sont tout le temps dans l’actualité, ils sont tellement poussés par l’industrie. Ici, tout le monde va contribuer au déploiement d’un terrain de foot virtuel géant produit par la réactivation à l’échelle de la Grande Halle de La Villette de jeux vidéo mythiques oubliés. On va plonger dans le monde de Kick Off, Super Soccer, Pelé Football, Tehkan World Cup, Virtua Striker 2, Mario Smash FootballTerrain. Ils seront projetés hors des écrans d’ordinateur pour activer à l’échelle 1 les cages, les joueurs, les ballons, la mosaïque et l’ambiance endiablée de la retransmission des matchs d’une compétition déstructurée et immersive. Tout le monde se regarde jouer. C’est comme une place publique, un truc qu’on a en commun.

À quels jeux de foot avez-vous joué ?Cela fait longtemps. Je ne suis pas dans FIFA ni PES. Je préfère le jeu d’arcade, les jeux de simulation. Si aujourd’hui, j’étais tenté pour jouer, je serais plutôt entraîneur. Ce truc d’être ultra connecté et jouer avec l’information, ça me passionne.

Quelle est votre vision du monde du football ?En tant que personne, j’ai une enfant et je peux vous dire que commencer à jouer au foot, c’est drôle.

Quand on a joué au foot et que l’on se remet à jouer, c’est comme le vélo, c’est quasiment immédiat.

Il y a des gestes très beaux, très simples. C’est étonnant comme ce jeu semblerait simple. Quand on a joué et que l’on se remet à jouer, c’est comme le vélo, c’est quasiment immédiat. J’ai beaucoup voyagé. Le foot n’est pas joué pareil partout. J’aime le fait de jouer, l’impulsion. Ensuite, l’industrialisation de ce foot, de ce jeu, de ce phénomène me pose problème. Dans le sens où il y a une sorte de retournement dans le fait d’être joueur et d’être pris dans cet immense soupçon très marketé. Je le vois comme un sport urbain, à la fois partout, sur tout terrain et hors des stades.

Un sport tout terrain qui a une certaine dimension artistique…Il y a énormément de grâce. C’est ça qui est rigolo entre jeu vidéo et foot. Il y a énormément d’entraînements. Moi, j’étais skateur par exemple et refaire un mouvement, être dans l’action, c’est assez beau. Participer ou voir un match, c’est super marrant. Je ne peux pas le nier. D’une certaine manière, je me méfie de sa médiatisation, mais l’émotion foot, individuelle ou collective, est quand même très puissante. Réussir une action, pouvoir enchaîner avec d’autres, l’énergie et l’intensité que ça produit. Il y a très peu de formes comme ça.

Quel est votre pronostic pour l’Euro et allez-vous suivre les matchs de l’équipe de France ?Lors de la Coupe du monde 98, j’étais à Beyrouth au Liban, c’était génial. Toute la ville était pour le Brésil. On regardait les matchs sur des chaînes arabes, donc ce n’était jamais filmé par des Français.

Je n’arrive pas à me le raconter par avance, mais bien sûr que c’est la France qui va gagner l’Euro.

On voyait les actions de l’autre côté, c’était super marrant. Je l’ai vécu aussi en Italie en 2006. Heureusement que Zidane a foutu un coup de boule, car sinon, on se serait fait lyncher dans le café dans lequel on était, car les Italiens nous regardaient avec un air tellement méchant. Après, c’était marrant, car ils sont venus à la fin nous consoler. Oui, on est obligé de regarder. Cela engage de la politique, de l’énergie individuelle et collective. On ne peut pas y échapper. Je n’arrive pas à me le raconter par avance, mais bien sûr que c’est la France qui va gagner. Sinon, il y a un risque de dépression très fort. Je préférerais qu’on s’amuse.

Teaser Soccer Party Club

Teaser Foot Foraine

Retrouvez le programme complet ici

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Footox épisode 22 : on fait le bilan des Bleus en 2024, calmement
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Propos recueillis par Florian Dacheux

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