- Coupe du monde des clubs 2025
Coupe du monde des clubs-DAZN : un milliard de questions
Moribond en France, DAZN a chopé les droits de retransmission de la Coupe du monde des clubs de la FIFA, dont personne ne veut, mais qui aura bien lieu. S’il sera plus simple de voir Auckland City que le PSG en France, la plateforme britannique s’affirme comme un partenaire majeur de la FIFA, et peut-être bientôt de l’Arabie saoudite.
Une Coupe que personne ne veut, mais une diffusion gratuite. Il ne s’agit pas ici du championnat de France de doublette mixte de pétanque sur La Chaîne L’Équipe, mais de la Coupe du monde des clubs. Le trophée, dont le tirage au sort a lieu ce jeudi soir, fait plus rêver les grands du monde du foot que Rodri et ses camarades. La FIFA a (enfin) trouvé un diffuseur pour cette compétition 2.0 qui doit voir le jour au croisement du printemps et de l’été 2025. Alors qu’Apple + était longtemps annoncé, DAZN va retransmettre le nouveau joujou de Gianni Infantino, gratuitement.
La plateforme du milliardaire Len Blavatnik aura réussi l’exploit de se rendre plus visible et accessible pour un Seattle Sounders-Benfica que pour un Marseille-Monaco. « Cet accord révolutionnaire avec la FIFA constitue une étape majeure dans le parcours de DAZN pour devenir la plateforme de divertissement de choix pour les fans de sport du monde entier », a même réagi Shay Segev, son PDG. Gianni Infantino parle lui du « tournoi le plus accessible de tous les temps ». Rien que ça. Encore mieux : les créateurs du tutoiement à la télé se sont octroyé ces droits alors que des rumeurs parlent d’un investissement d’un milliard de dollars de l’Arabie saoudite sur DAZN. Le fonds souverain du pays de Mohammed Ben Salmane pourrait racheter 10% des parts de la plateforme. Une manière d’oublier son relatif fiasco en France ou un pion de plus du royaume dans son investissement dans le foot ?
DAZN signs landmark free-to-view deal with FIFA to exclusively broadcast FIFA Club World Cup 2025™ globally.
The agreement will see all 63 matches involving 32 of the best clubs worldwide, live-streamed, free to view on DAZN worldwide, with the possibility of sublicensing to… pic.twitter.com/JQlu00YwUH
— FIFA Media (@fifamedia) December 4, 2024
French Labrune et nouveaux acteurs
Si DAZN n’a pas les moyens de son ambition en France, même avec des showcases à la place des avant-matchs de Ligue 1, la donne pourrait changer. Avec un milliard de dollars en plus, la plateforme présente partout dans le monde est en passe de devenir le premier partenaire télévisuel de la FIFA. En diffusant la Coupe du monde des clubs en clair, les objectifs de l’autoproclamé « Netflix du sport » se marient avec ceux d’Infantino : continuer sa razzia dans le sport d’un côté, trouver (enfin) quelqu’un pour montrer sa compétition de l’autre. « DAZN est intelligent : il surfe sur la décroissance des marchés du sport pour acheter des droits. C’est un très bon négociateur », relève Pierre Maes, consultant et auteur en droits télé du sport.
L’Arabie saoudite arriverait alors à point nommé. Le royaume princier, via Vision 2030, sa stratégie de diversification du pétrole, trouve qu’il est d’usage de s’acoquiner avec le foot, le tourisme et la culture. Ce n’est pas pour rien qu’Infantino est accueilli les bras ouverts à Djeddah. Six ans après la Russie et alors que le Qatar semble pointer un début de désaffection pour le foot, l’Arabie saoudite s’affirme comme une nouvelle place forte du ballon rond, à dix ans de la Coupe du monde 2034, pour laquelle personne n’a osé candidater face à elle.
L’attribution doit être décidée mercredi prochain en visioconférence. Tant pis pour les recommandations d’Amnesty international ou de Human Rights Watch, qui a sobrement appelé son dernier rapport « Crève d’abord, je te paierai ensuite ». Le mouvement Play the Game a d’ailleurs mis à jour cette semaine son étude sur l’influence croissante de l’Arabie saoudite sur le foot. Il montre que le régime a subventionné cette année plus de 900 actions dans le sport, principalement dans le foot. C’est plus de deux fois plus que l’année dernière.
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Verra-t-on alors Walid Acherchour et la fanzone commenter un Seattle Sounders-Benfica ? Un Flamengo-RB Salzbourg ? « Attention, DAZN apparaît au dernier moment pour la FIFA et retransmettra cette Coupe du monde des clubs en clair. Il semble difficile de les voir rentrer dans leurs frais. DAZN est en perte, on sait qu’ils sont à vendre, précise Pierre Maes. Le milliard annoncé pour acquérir correspond à la valorisation que voudrait Blavatnik. Et personne ne lui a fait d’offre. Cela ressemble à une méthode Coué. » Faire monter les enchères pour trouver des acheteurs, une méthode rappelant un certain Vincent Labrune avec la Ligue 1.
Faire de DAZN pour l’Arabie saoudite l’équivalent de Bein Sports pour le Qatar paraît donc démesuré. « On ne constate pas le même empressement qu’avait manifesté Bein dans son développement », poursuit l’auteur de La Ruine du football français. En parallèle, la question du positionnement de la chaîne qatarie, diffuseuse des trois dernières Coupes du monde en France, se pose. « Bein Sports, c’est un autre sujet, est en désinvestissement discret depuis cinq, six ans, enchaîne-t-il. Ils ont payé des prix très élevés pour des droits et ils arrêtent tout ça discrètement. » Pendant que DAZN et l’Arabie saoudite tentent de se faire une place de choix dans le paysage du football européen, mais jusqu’où et jusqu’à quand ? Un milliard de questions, décidément.
Par Ulysse Llamas