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Coup de foudre à Nottingham
Nottingham Forest et la Premier League, c'est l'histoire d'une séparation qui dure depuis vingt ans. Mais cet été, Sabri Lamouchi est arrivé à la barre, et le géant endormi des bords de la Trent a repris goût à la vie, et à la victoire. Même si les deux derniers revers, dont celui de ce mercredi face à Hull City (1-2), sont venus rappeler combien le retour au sommet sera forcément tortueux.
Mercredi soir, City Ground. Le théâtre des Reds (ceux de Nottingham, pas de Liverpool) bouillonne. On a beau être un soir de Coupe d’Europe, ici, ça fait des lustres que la grésillante sono n’a pas craché l’hymne de la Ligue des champions. Il faut dire qu’à l’époque où Forest écrasait tout (deux Coupe d’Europe des clubs champions en 1979 et 1980), le compositeur britannique Tony Britten, à qui l’UEFA a commandé la chanson, n’avait pas encore posé la moindre note sur sa partition. Non, à Forest, en ce milieu de semaine, c’est La Bamba qui dévale à pleins poumons sous les armatures métalliques de la Peter Taylor Stand. « Sabri Lamouchi, Sabri Lamouchi, il déteste Leicester, il déteste Derby, Forest est magique ! » Un quart d’heure de jeu, l’air entraînant de Ritchie Valens en est déjà à son troisième rappel. Sabri Lamouchi, agité comme une puce sous le crachin automnal, replace sa bouteille d’eau tel Rafael Nadal et applaudit en direction des supporters. « Putain, c’est ça que j’aime chez lui, s’emballe Richard, 64 ans, imper de saison et lunettes bien accrochées. Ce manager-là, il donne des ondes positives. Dès son arrivée, il a compris comment fonctionnait Forest, quelle relation il fallait avoir avec les supporters. Lamouchi est fait pour un club comme le nôtre. »
« Et si c’était enfin notre année ? »
Les résultats aidant, l’ex-technicien évincé de Rennes en décembre 2018 au profit de Julien Stéphan s’est mis toute une clique de fanatiques (encore 27 624 supporters ce mercredi face à Hull) « in the pocket » . Sa nomination fin juin a été suivie par l’arrivée de 12 joueurs, dont le portier Brice Samba devenu titulaire. Sa philosophie de jeu a convaincu une grande partie des sceptiques. En septembre, il a été sacré manager du mois. Nottingham ne presse pas à tout-va, patiente pour réduire les espaces, n’hésite pas à avoir recours régulièrement aux contre-attaques et saisit sa victime, généralement via Lewis Grabban (cinq réalisations) sans forcément faire d’éclat (5 des 6 victoires cette saison l’ont été par un but d’écart). Une roulée au bord des lèvres et les cheveux aussi rouges que son écharpe, Shirley reverdit : « Depuis des années, nous vivons des déceptions. Et là, enfin, on nous a trouvé quelqu’un qui apporte un enthousiasme, une implication au quotidien. Tout le stade le ressent. Rarement ces derniers temps il y avait autant de bruit ici. C’est quasi plein à chaque rencontre. »
Du voyage à Madrid en 1980 lors du deuxième sacre continental chipé à Hambourg (1-0), l’abonnée se prend à rêver : « Et si c’était enfin notre année ? Le grand retour de Forest. » Pour le come-back dans les cimes, la patience sera un maître-mot pour ne pas sortir étouffé d’une pression populaire constante. La soirée de mercredi est venue le rappeler. Pas assez tranchants dans la surface, pris de vitesse dans les couloirs par Hull City, les Reds ont cédé une deuxième fois de suite (1-2) après l’accroc à Wigan trois jours plus tôt (1-0). Après 13 journées, les compères du Malien Samba Sow pointent à la 8e place avec 22 points, à quatre unités du leader West Bromwich. « J’aimerais parfois qu’on prenne plus de risques, fulmine Dave avec son maillot des années 1980 légèrement taché par la sauce de ses frites. C’est très bien ce que fait Lamouchi, mais je ne serais pas contre plus de spectacle. »
Anigo et Modesto dans la place
« C’est un moment compliqué, concédait après coup le manager, abrité par un parapluie devant une nuée de journalistes.Dans ces moments-là, il faut rester ensemble, faire corps pour rebondir. » Le mercato d’hiver en dira un peu plus sur les ambitions de l’institution des Midlands. François Modesto (directeur technique chargé du recrutement pour l’équipe première) et José Anigo (chargé du recrutement international), nommés la semaine dernière par le magnat grec Evangelos Marinakis, y auront un rôle clé. De si belles noces ne mériteraient pas de vriller dare-dare. Et l’ex-international français Sabri Lamouchi (12 sélections, 1 but) d’admettre qu’il poursuit son apprentissage de ce côté-ci de la Manche. « Je découvre encore cet environnement. Le Championship, c’est incroyable (un marathon de 46 matchs, N.D.L.R.). À Forest, il y a une vraie ferveur, une vraie passion, une vraie histoire. C’est aussi pour cela qu’il faut toujours aller dans le bon sens avec l’état d’esprit nécessaire. » Face à Reading (20e, 12 points), ce samedi, « une seule issue sera possible, la victoire » , histoire de rincer tout ça sur des airs de Bamba.
Nottingham Forest 1-2 Hull City
Buts : Cash (52e) pour Nottingham // Magennis (38e), Bowen (48e) pour Hull City
Par Florent Caffery, à Nottingham