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Costil, l’oublié
Ce samedi, Benoît Costil retrouve le Stade rennais avec les Girondins de Bordeaux. Depuis son départ de Bretagne l’été dernier, le gardien a perdu son statut d’international. Alors, pourquoi le train est parti sans lui ?
« Gardiens de buts : Alphonse… » Pas besoin d’en dire plus, l’affaire est entendue. À peine installé derrière le pupitre de son bureau de la Fédération française de football, ce jeudi, à 14h04, Didier Deschamps faisait déjà un grand perdant chez les gardiens. Numéro un : Hugo Lloris. Numéro deux : Steve Mandanda. Numéro trois : Alphonse Areola. Pas de Benoît Costil dans les 23 convoqués pour affronter la Russie et la Colombie en amical. En novembre dernier, le gardien des Girondins bénéficiait de la blessure d’Hugo Lloris, mais il était déjà absent de la précédente liste de la Desch’. Bref, la tendance se confirme : sauf blessure, Costil a peu de chances d’être appelé en équipe de France cet été pour disputer la Coupe du monde, et ce, alors qu’il était numéro deux de la hiérarchie il y a un an et installé dans le groupe depuis le début des éliminatoires de l’Euro 2016. Comment en est-on arrivé là ?
Le remplaçant du chouchou
26 août 2017, Bordeaux-Troyes. Une clameur s’élève dans le stade : « Carrasso ! Carrasso ! Carrasso ! » Non prolongé par les Girondins, le capitaine bordelais s’en est allé après huit ans de bons et loyaux services. L’homme garde un goût d’amertume : celui de ne pas avoir fait ses adieux au public bordelais, ayant appris son départ avant le dernier match de la saison à Lorient. Les supporters bordelais en veulent à leurs dirigeants, et n’ont pas forcément envie d’accueillir à bras ouverts la recrue qui prend la place du chouchou Carrasso. Comme le beau-père qui débarquerait dans sa nouvelle famille mitraillé du regard, Benoît Costil, qui arrive libre à tout juste trente ans, part avec un handicap. Et il va lui falloir six mois pour conquérir son nouveau club.
Dans une équipe d’abord prometteuse, mais à la dérive à l’arrivée de l’automne, Costil est loin de son niveau affiché en Bretagne. Sur la première partie de saison 2017-2018, c’est lui qui présente le pire ratio d’arrêts en Ligue 1 sur des tirs cadrés subis (60,6% d’arrêts seulement, dans la lignée des 61,9% du Niçois Cardinale ou des 62,2% de l’Angevin Letellier, contre 76,2% à l’actif du Nantais Tătăruşanu, le meilleur bilan). Pire, lors des trois derniers matchs de l’année civile, Costil se retrouve relégué sur le banc par Jocelyn Gourvennec, le coach qui l’a convaincu de venir à Bordeaux. Ardu. Au point d’envisager un départ au mercato hivernal, comme il l’assurait récemment dans L’Équipe : « Sortir de l’équipe, ça ne m’était jamais arrivé. C’est une réaction normale. Au début, je me suis dit :« Merde, ça ne va pas pouvoir durer comme ça… »Ça a duré trois, quatre jours et puis les vacances à Caen, en famille, m’ont fait du bien. Je me suis posé les bonnes questions. » Et les bonnes réponses sont apparues sur le terrain.
La responsabilité du capitaine
En 2018, le gardien des Girondins est revigoré. Jérôme Prior n’a pas su saisir sa chance dans les cages, Costil redevient numéro un, confirmé ensuite par le nouveau coach Gustavo Poyet. Nommé capitaine en intérim après son match de patron à Nantes mi-janvier (victoire 1-0), l’ancien Rennais va bien accrocher le brassard pour qu’il ne quitte plus son biceps. « Je dis souvent que le brassard, c’est un bout de tissu, que ça ne changera rien à mon investissement, mais, à ce moment-là de la saison, c’est de ce genre de geste dont j’avais besoin, confie-t-il dans L’Équipe. Ça m’a touché et fait énormément de bien. » Et, dans le dernier virage de la saison, Bordeaux reste en embuscade pour accrocher un ticket européen. Si Costil enchaînait les pions encaissés à l’automne, il se dresse désormais comme le dernier rempart de la deuxième meilleure défense de Ligue 1 (huit buts encaissés en dix rencontres) sur la deuxième partie de saison. Sauf qu’il est sûrement trop tard pour repasser devant Alphonse Areola dans la hiérarchie du sélectionneur national.
Par Florian Lefèvre