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Corentin Tolisso, l’apprentissage par la douleur

Nicolas Jucha
Corentin Tolisso, l’apprentissage par la douleur

Deux buts de sa responsabilité, une lourde défaite et des larmes de rage. Corentin Tolisso a vécu un derby cauchemardesque dimanche à Geoffroy-Guichard. De quoi être traumatisé pour un bon moment, ou a contrario, se forger un mental de tueur...

« Il a été très marqué. Ça fait partie de son apprentissage. À lui de faire abstraction des ondes négatives qu’il a eues après ce match-là. Oui, il était marqué. Oui, il en a pleuré. À l’instar de plusieurs joueurs de l’équipe, il n’a pas su gérer ce match émotionnellement. » Après la lourde défaite de son OL à Saint-Étienne, Hubert Fournier n’a pas cherché à esquiver les questions sur la performance de Corentin Tolisso, battu au duel par Bayal Sall sur le premier but des Verts et complètement responsable sur le troisième de Renaud Cohade. Pas facile à encaisser quand on n’a que 20 ans, malgré une quarantaine de matchs en Ligue 1. « Le joueur doit se poser la question après le match des causes de sa contre-performance. Le contexte ? L’enjeu ? L’objectif de résultat qu’il n’a pas su appréhender ? Un élément extérieur que lui seul connaît et qui a perturbé son avant-match ? Le joueur a peut-être déjà quelques réponses pour se re-mobiliser » , analyse Stéphane Le Jeune, fondateur de SLJ Pro Team, structure qui offre des conseils en préparation mentale à des footballeurs et golfeurs professionnels. L’intervention de l’entraîneur ou de son staff ne doit intervenir que dans un second temps, « s’il y a une éventuelle demande du joueur » , estime pour sa part Joël Trébern. Consultant en préparation mentale via la société JHT Performance et collaborateur de la Fédération française de football, il considère « qu’il faut d’abord répondre à un besoin du joueur plutôt que de lui imposer une aide. Mais à partir du moment où le joueur est ouvert au dialogue, il faut éviter les remises en cause générales et se focaliser strictement sur la prestation, le match défaillant. Sinon, on plombe la confiance du joueur. »

Quand Guy Roux prône l’amour

Pour éviter de plomber cette confiance, l’ancienne légende de l’AJ Auxerre, Guy Roux, a une recette bien à lui : « C’est très simple, si on aime son joueur, on va le réconforter. Une erreur ou une maladresse qui a été sanctionnée par malchance d’un but, il faut lui dire que de toute façon, cela fait partie du métier. » Comme quoi, on peut avoir le physique type du père Fouettard et être un grand sensible agissant avec doigté. Guy donne ses remèdes de grand-mère : « Au début, il faut être discret dans le réconfort, mais il ne faut pas oublier, même pas inadvertance, de lui serrer la main au moment où il sort du terrain. Le moment important, c’est celui où l’on se quitte, où le joueur rentre chez lui. Là, il faut lui dire un petit mot, qu’il voit que malgré son erreur technique, on ne l’accable pas. » Dédramatiser donc, mais sans excès selon Stéphane Le Jeune, car « le joueur n’a besoin ni de réconfort, ni de compassion, ni d’encouragements excessifs, mais plutôt d’être guidé pour la suite. Il doit comprendre que l’erreur fait partie de la performance. » Et aussi de l’apprentissage dont parlait Hubert Fournier après la déroute de Geoffroy-Guichard. « Dès lors qu’un dialogue a lieu, il faut développer une écoute active pour connaître ses impressions sur sa prestation, son sentiment avec du recul, et enfin comprendre sa gestion émotionnelle lors du match. Il faut partir de la réalité du joueur » , explique Joël Trébern. Car selon lui, « dans cette expérience malheureuse, il faut penser aux opportunités qu’elle génère en réfléchissant aux contrariétés et contraintes auxquelles le joueur a fait face. Ensuite, il faut faire en sorte que le joueur s’appuie sur cette expérience pour devenir plus fort. Une erreur n’est pas dommageable si on sait l’utiliser et en profiter demain. »

« L’échec n’est rien d’autre qu’une accumulation d’erreurs »

Une théorie qu’appuie Stéphane Le Jeune : « Tolisso, comme tout autre joueur, a le droit de faire une erreur. Ce qu’il n’a pas le droit, c’est de ne pas traiter la cause de cette erreur. Il faut donc l’aider à repartir du bon pied à l’entraînement, à se re-focaliser sur l’instant présent et non le passé. Il doit se re-mobiliser sur des objectifs de maîtrise à court terme et prendre le temps d’oublier sa mésaventure. » De là à dire que Tolisso devrait utiliser son calvaire stéphanois comme un acte fondateur, il n’y a qu’un pas, rappelle Joël Trébern : « La différence entre le niveau amateur, le niveau pro et le très haut niveau se situe là. Il y a de très bons joueurs amateurs qui n’ont pas su, qui n’ont pas pu ou même qui n’ont pas eu l’entourage, le staff et les éducateurs pour corriger leurs erreurs. Pour moi, l’échec n’est rien d’autre qu’une accumulation d’erreurs non corrigées. Or, l’erreur fait partie de la vie et du haut niveau. » Pour s’en convaincre, il suffit de dresser une liste non-exhaustive des plus ou moins grands joueurs pris en flagrant délit : Peter Čech à l’Euro 2008 se trouant deux fois en trois minutes face à la Turquie et éliminant son équipe à lui seul, Martin Palermo entré dans le Guiness des records le 4 juillet 1999 pour avoir manqué trois penalties dans le même match de Copa América contre la Colombie ou encore, plus récemment, Steven Gerrard qui a privé son Liverpool de titre à cause d’une glissade inopportune contre Chelsea. Plus proche encore de chez nous, Stéphane Ruffier avait ouvert la porte à une déroute collective des Verts au Parc des Princes fin août, suite à un banal contrôle foiré…

Guy Roux : « Il faut lui maintenir sa confiance »

Dans la foulée de cette énorme bévue, le coach stéphanois Christophe Galtier n’avait pas dédouané son joueur, simplement refusé de l’accabler : « Stéphane est un homme. Il a eu, depuis maintenant trois ans que je travaille avec lui, cette première erreur. Il le sait, il en a parlé rapidement dans le vestiaire. Bien sûr que cela a eu une incidence, mais accabler Stéphane après tout ce qu’il a fait au club depuis trois saisons, ce serait malvenu et aussi un manque de respect. » Guy Roux acquiesce : « Mettre en avant le passé du joueur comme Galtier avec Ruffier, c’est un bon argument. Tolisso, il a déjà quelques matchs derrière lui. Il ne va pas perdre sa place comme ça. » Surtout que pour l’ancien maître de l’Abbé-Deschamps, « si au-delà d’une erreur technique, le reste du match a été bon, il faut lui maintenir sa confiance et le faire jouer le match suivant. » Pour l’homme aux bonnets improbables, il ne faut surtout pas gâcher les talents et il a sa propre grille de lecture : « Il a fait une erreur qui a provoqué un but, c’est le point un. Le point deux, c’est « Que valait son match ? » Si, globalement, le match a été satisfaisant et que l’entraîneur n’a pas de meilleur choix, il doit le remettre et faire comme s’il ne s’était rien passé… » Mais s’il sait se montrer magnanime, Guy Roux sait que la gentillesse doit avoir ses limites : « Un vrai entraîneur ne peut pas être impulsif par rapport à une erreur, sauf si c’est une négligence caractérisée, par exemple un joueur qui, pour se replacer, marche au lieu de courir… »

Le mental, un marché français à conquérir

Du côté de la préparation mentale, on profite évidemment du cas Tolisso pour faire un peu de pub. Pour Stéphane Le Jeune, les joueurs ont surtout besoin d’apprendre à gérer ces matchs où rien ne va : « Un joueur qui travaille régulièrement avec un préparateur mental développe des capacités lui permettant, après une erreur, ou plusieurs comme pour Tolisso, deswitchersur autre chose rapidement et ainsi limiter la casse. » Et selon le consultant, sa discipline suscite encore le scepticisme dans le foot français : « Les entraîneurs vous diront que l’équipe s’est bien préparée sur le plan physique, technique ou tactique. Mais rarement l’entraîneur dira « on s’est bien préparés mentalement ». Or, la préparation mentale doit être prise en considération au même titre que la préparation physique et technique. Sauf que dans le football français malheureusement, c’est souvent négligé. C’est dommage. » Le carnet de commandes ne demande pourtant que ça.

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Nicolas Jucha

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