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Corchia peut-il remporter la primaire à droite ?
Nouvelle tête de l'équipe de France, Sébastien Corchia était dans l'anti-chambre depuis plusieurs saisons. Avec le manque de forme de Bacary Sagna et Christophe Jallet, la situation difficile de Mathieu Debuchy, il est désormais seul avec Djibril Sidibé pour tenter de s'imposer en Bleus. En a-t-il les moyens ?
« Il n’y a pas beaucoup de monde à droite, Bacary Sagna a déjà trente-trois ans, Christophe Jallet aussi n’est plus tout jeune, donc cela ne me surprend pas de voir Sébastien Corchia dans les 23. C’est une sélection logique. » Ancien taulier au poste de latéral droit des Bleus, Manu Amoros sait de quoi il parle. Entre le joueur du LOSC et lui, plus de vingt ans, mais des titulaires en puissance qui se comptent sur les doigts de la main : Jocelyn Angloma, Lilian Thuram, Willy Sagnol ou encore Mathieu Debuchy et Bacary Sagna. « On a peut-être quelque chose à revoir au niveau de la formation à ce poste » , analyse le champion d’Europe 84. « Il faut penser au gamin en fonction du poste qu’il pourrait tenir en pro le plus tôt possible, or, nos latéraux sont souvent d’anciens attaquants reconvertis sur le tard » , pour pouvoir passer le palier pro. Comme Lucas Digne et Layvin Kurzawa, les deux « contenders » pour le couloir gauche, alors que Corchia a été replacé à treize ans à l’INF Clairefontaine. Un modèle d’anticipation. « À mon époque, j’avais été formé à tous les postes avant de me fixer arrière droit, alors que dans mon petit club amateur, j’étais milieu offensif » , soutient Amoros.
Au poste de latéral droit, le garçon de Rosny-sous-Bois a rapidement convaincu le monde pro : titulaire en Ligue 1 depuis 2009-2010 au Mans, international français dans toutes les catégories depuis les U17, il recevait les pré-convocations de Didier Deschamps depuis la saison 2014-2015. « Cela donne envie de donner encore plus aux entraînements. C’est une source de motivation pour aller chercher encore plus » , expliquait-il en octobre 2015. Longtemps dans l’anti-chambre, relégué derrière Sagna, Debuchy, Jallet et même Sidibé, réserviste à l’Euro 2016, Corchia a donc surmonté les dernières réserves à son égard, relatives à son petit gabarit et à ses replacements défensifs. Amoros approuve : « Ce n’est pas une armoire comme Sidibé, mais il sait répéter les efforts nécessaires pour tenir le poste. Le seul point faible, c’est d’être parfois trop prompt à se porter vers l’avant et à découvrir ses arrières. Mais c’est commun à beaucoup d’équipes dans le football moderne, où le latéral doit être un attaquant supplémentaire en phase offensive. » Pas un hasard si, à de nombreuses reprises, René Girard avait fait de Corchia un milieu offensif droit, alors que l’intéressé admet volontiers que ses modèles s’appellent Philip Lahm, Willy Sagnol ou encore Paolo Maldini, pour « l’excellent pied, la qualité de centre » . Un domaine dans lequel il a confirmé contre Nice qu’il n’était pas en reste avec quelques beaux débordements.
Adoubé par Thiago Silva
Mais si Didier Deschamps l’a sélectionné, c’est aussi parce qu’il considère que le Lillois a solidifié sa présence défensive. Suffisamment pour s’installer dans la durée ? Sur le site de la FFF, il a assuré ne pas être là pour profiter de l’ambiance contre le pays de ses parents – sa mère est née à Milan, son père a des origines transalpines, d’où le patronyme –, mais bien faire son trou : « L’objectif, c’est de rester dans le groupe. C’est à moi de faire le nécessaire sur le terrain. » Alors que les retours de Sagna, Jallet, voire Debuchy s’il relance sa carrière loin d’Arsenal, Corchia ne manque pas de partisans prestigieux. La saison passée, Thiago Silva l’avait cité, dans une interview accordée au Parisien, comme le joueur de Ligue 1 le plus intéressant pour étoffer l’effectif du PSG. « Il a clairement les qualités pour apporter à l’équipe de France. Depuis plusieurs saisons il est bon avec Lille, il sait se projeter vite vers l’avant, il a une belle qualité de centre » , assure Manu Amoros, pour qui Corchia « a un profil qui peut être très utile dans l’équipe actuelle » . Le seul regret de l’homme aux 82 sélections, c’est de ne pas avoir vu le Lillois plus tôt, « car en lui donnant sa chance un peu plus tôt, quand on n’avait pas de match à enjeu, on aurait pu lui donner l’opportunité de progresser plus vite. » A priori, derrière Djibril Sidibé dans la hiérarchie, il va désormais devoir prouver qu’il peut franchir le palier international, avant éventuellement de faire comme son ancien compère lillois en signant dans un club de dimension européenne. Il y a six mois, Anthony Réveillère estimait que le Dogue devait évoluer à un niveau supérieur : « Sans vouloir faire injure à Lille, s’il veut franchir le dernier palier, il doit jouer dans un plus gros club en Ligue 1 ou à l’étranger. Un club avec un projet de jeu plus ambitieux, car les latéraux sont bien mieux mis en valeur dans des équipes offensives. » Quelques prestations bien senties en Bleus devraient lui permettre de faire d’une pierre deux coups.
Par Nicolas Jucha
Propos de Manu Amoros recueillis par Nicolas Jucha. Propos de Sébastien Corchia extraits du So Foot Club n°16 (octobre 2015). Et propos d'Anthony Réveillère extraits de Sofoot.com en mars 2016