- France – Ligue 1 – Le joueur de la 36e journée
Corchia, héros malgré lui
Maudit héros. Plombé par le mektoub, Sébastien Corchia a pris l’habitude de composer avec ce que la vie lui propose. À deux doigts de rejoindre le LOSC lors du dernier mercato hivernal, le latéral droit du FC Sochaux-Montbéliard est l’un des protagonistes importants de la folle remontée des Doubistes. Son dernier coup de force dans l’Est de la France. À moins que…
Il a les pieds faits pour l’or et ils sont dans la merde. Chaque jour un peu moins qu’hier, mais dans la merde quand même. Trop bien élevé pour s’offrir les envolées lyriques de Tony Montana, Sébastien Corchia fait partie de ces poissards talentueux du football. Mais le malheur des uns fait le bonheur des autres. De l’allégresse, il y en a eu assez peu cette saison à Sochaux. Finalement, il n’y a des rayons de soleil à Bonal que depuis le début de l’année 2014. Que depuis le transfert avorté de Sébastien Corchia vers le LOSC. Le calendrier indique la date du 18 février 2014 quand le latéral droit revient au centre d’entraînement de Sochaux la queue entre les jambes. Il revient sans maison, sans casier au sein du vestiaire, mais avec un « non » du CNOSF qui n’a pas validé son départ pour Lille. Plutôt du genre à tout donner et grand habitué de la course au maintien, Corchia et ses bras frêles n’ont pas pensé une seconde à un bras de fer ou à passer la fin de saison à faire la gueule. Bosseur invétéré depuis son plus jeune âge, le latéral droit est revenu pour choper le maintien. Décisif lors des 15 dernières journées au cours desquelles les Doubistes ont chopé 26 de leurs 37 points, Corchia fait tout pour partir la tête haute d’un club qui ne méritait pas autre chose. Avant peut-être, d’aller mettre ses pieds ailleurs que sur la pelouse boueuse de Bonal.
La ZEP et les faux plans
Élève brillant en ZEP, Sébastien Corchia est un habitué des faux plans. Le garçon plaît, beaucoup même, mais chaque rencard se termine mal, sans même un bisou maladroit. Que ce soit au Mans ou à Sochaux, le natif de Noisy-le-Sec n’a jamais laissé indifférent. Malgré son gabarit de crevette (1m74, 65 kg), il a été annoncé au Bayern Munich, à la Juventus, à Lyon, à Marseille et donc à Lille. Au lieu de cela, il a passé les 192 premiers matchs de sa carrière à cravacher. À connaître la descente avec le Mans en 2010. À frôler la relégation avec le FC Sochaux les deux années suivantes. Le tout avec dévotion et sérénité, comme si ces rendez-vous manqués n’étaient qu’un report. Après tout, le gamin passé par l’INF Clairefontaine n’a que 23 ans. Corchia, un nom d’ancien, une bouille de marmot et l’avenir devant lui. S’il gagnerait évidemment à évoluer un cran au-dessus, il profite de ses aventures « d’en bas » pour se forger un caractère. Prendre de la bouteille. Son pied droit n’a pas besoin de ça pour se porter bien. Tireur de coup franc hors pair, centreur de talent et surtout teigneux de tous les instants, le latéral droit n’est peut-être plus précoce, la faute à ces trains ratés, mais il est largement à l’heure. Et tant pis s’il a perdu du temps. Parfois, quelques détours sur un chemin font plus de bien qu’autre chose.
Roudet, il m’aime trop !
La route jusqu’au centre d’entraînement de Sochaux, Corchia la connaît aussi bien que son couloir droit à Bonal. En vrai, après l’épisode lillois, il y est revenu comme s’il n’était jamais parti. « Réintégrer un joueur comme Corchia dans le groupe, ce n’est pas difficile. C’est un garçon adorable qui n’a pas eu de chance dans cette histoire. Je lui ai envoyé un message avant qu’il revienne : « Le meilleur est à venir » » , avouait Hervé Renard à L’Équipe, après l’affaire. Titularisé lors de chacune de ses 31 apparitions en Ligue 1 cette saison, Sébastien Corchia (3 buts, 2 passes décisives) fait plus que le boulot en cette fin de saison. Tranchant à l’image de ce bon vieux Julien Faussurier, le numéro 2 des Lionceaux a deux matchs pour réaliser ce dont il a envie : partir la tête haute, avec un énième maintien en poche. Partir pour Lille ? Pas forcément. De son propre aveu, le joueur, qui n’a rien signé avec le LOSC, a d’autres opportunités. À moins que comme d’autres fois auparavant, cela ne capote. Mais dans ce cas-là, Corchia a déjà une idée du coupable. « L’été prochain ? Ce sera la bonne, cette fois. Sans ça, je vais croire qu’il y a quelqu’un qui ne veut pas que je parte de Sochaux. Je soupçonne Roudet, il m’aime trop ! Je pense qu’il travaille à la DNCG. »
Par Swann Borsellino