Copa del Rey : Basques Vs. Catalans
C'est la grande finale de la Coupe d'Espagne, autrement appelée Coupe du Roi. Le choc entre Leones et Blaugranas aurait normalement dû se tenir au Bernabeu, avant que les dirigeants de la fédération espagnole ne choisissent finalement le stade Mestalla de Valence. Ce soir, Basques et Catalans s'affronteront pour le titre d'un pays qu'ils ne considèrent toujours pas comme le leur. Où le mythe des deux Espagne (1) est resservi...
La finale qui aura lieu dans quelques heures pose une question essentielle : l’Espagne, kézaco ? Une question très conne, mais dont la réponse définitive n’a jamais été trouvée. Sociologues, politiques, écrivains ou voyageurs réputés s’y sont tous cassé les dents.
La finale entre l’Athletic Bilbao et le Fc Barcelone apportera sûrement de nouveaux éléments à un dossier déjà extrêmement chargé et épineux. Les deux clubs phares des régions les plus indépendantistes du Royaume vont se livrer un match de football qui promet d’être chargé en références (géo)politiques.
A quoi d’autre faut-il s’attendre avec un club dont la politique sportive est de faire jouer uniquement des joueurs basques tout en excluant ceux qui seraient nés dans d’autres régions d’Espagne ? Pourquoi le Barça, que Manuel Vazquez Montalban définissait comme « l’armée d’un État sans Nation » , ne sauterait-il pas sur l’occasion -rêvée- pour se foutre ouvertement de ses “ennemis” castillans en réalisant le doublé ?
Quels que soient le résultat et le vainqueur de ce soir, il y a fort à parier que les célébrations seront sensiblement les mêmes : « Madrid, Cabron, saluda al campeon » (Madrid, salaud, salue le champion). Le pouvoir central, les Merengues et la famille royale vont en prendre pour leur grade, c’est une évidence…
Pour s’en convaincre, il suffira de jeter un coup d’œil à Mestalla à l’entrée des joueurs sur le terrain. Ne vous étonnez pas si vous ne voyez pas de drapeaux espagnols mis à part sur le pin’s du veston du monarque Juan Carlos. Le problème historique espagnol pourrait d’ailleurs se transformer en un véritable incident diplomatique si le Roi d’Espagne et son gouvernement décidaient de ne pas tolérer les sifflets adressés à l’hymne national et les insultes faites par les socios des deux camps à une Nation qui se veut officiellement unie.
Noyée dans une avalanche de Senyeres et d’Ikurrinas (les drapeaux catalans et basques), de revendications pour la libération des détenus basques, contre la négation de la langue castillane au profit de ses cousines basques et catalanes, et des classiques banderoles « Catalonia is not Spain » , l’ambiance du stade valencian s’annonce explosive comme un cocktail Molotov.
Lorsque les vainqueurs monteront dans la tribune pour recevoir la coupe -qui symbolise normalement l’unité d’un pays tout entier- des mains du Roi (s’il est toujours là) et la soulever, le paroxysme identitaire aura pourtant bien lieu.
Le capitaine heureux se chargera de présenter avec fierté le trophée à ses supporters heureux, et ce, pour le plus grand désarroi de ses ennemis, dépités. Pour José Ortega, le philosophe madrilène, l’origine de l’État est avant tout sportive. Des champions, des vaincus, des partisans, des idéologies, de la joie, des espoirs déçus, et tout ça grâce à un ballon… Et si l’Espagne n’était pas finalement qu’un grand match de foot ?
* (1): « Il y a un Espagnol qui veut vivre et qui commence à le faire entre une Espagne qui meurt et une Espagne qui baille. Petit Espagnol qui vient au monde, que Dieu te garde. Une des deux Espagne finira par te glacer ton petit cœur » .
Antonio machado, poète espagnol, mort durant la guerre civile.
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