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Conca les poches pleines

Par Quentin Müller
Conca les poches pleines

Après une escapade chinoise qui avait fait de lui, en 2011, l'un des 5 plus gros salaires de la planète foot, Dario Conca est revenu en janvier, et à 31 ans, dans ce Brésil qui voulait le naturaliser et l'avait élu meilleur joueur de son championnat avec Fluminense. Portrait d'une carrière hors du temps, tournée vers l'or.

Le temps vécu est produit de notre conscience. Il est même « invention ou il n’est rien du tout » selon Bergson. Pour Dario Conca, les deux aiguilles de l’horloge ont bel et bien tourné, mais à une vitesse anormale. En réalité, le natif de General Pacheco en a toujours manqué ou en a eu trop, au choix. Révélé au Fluminense à 25 ans, après de multiples prêts, puis objet de toutes les convoitises du Vieux Continent à 28 ans, pour finalement vouloir retrouver le haut niveau à 31 printemps, Conca sera toujours arrivé à contretemps. Un rendez-vous manqué avec le monde du football qui portait pourtant en lui de grands espoirs. Car l’ancien international U20 argentin n’a rien d’un joueur de talent lambda reconverti en chercheur d’or, traçant et orientant sa carrière en fonction des juteux contrats qu’on lui proposait. Dario est une de ces rares pépites atypiques dont l’équation footballistique est à trois inconnues et dont pas même la logique booléenne ne viendrait à bout.

Lancé par Manuel Pellegrini

Formé à Tigre, puis à River Plate, où l’on produit des joueurs racés, Dario Conca met deux ans avant de pouvoir faire ses débuts en 2002 avec les pro. À l’époque, l’équipe a fière allure. Martin Demichelis, Lucho González, Andrés d’Alessandro, Maxi López ou encore Fernando Cavenaghi se tirent la bourre en équipe première. C’est donc dans ce contexte relativement concurrentiel que Conca débarque. Manuel Pellegrini, « l’Architecte » , voit en lui la relève d’une génération dorée sur le départ. Le gamin joue trois bouts de matchs, puis onze la saison suivante sans briller outre mesure. Les prêts s’enchaînent alors, malgré la fuite des cadres. Tout d’abord, il file à Universidad Católica, au Chili, sous les conseils de Manuel Pellegrini, ancien coach du club. Là-bas, comme prévu, on lui laisse sa chance. Mais après presque trois saisons intéressantes, quoiqu’inégales, le puceau repart en prêt à Rosario. Là-bas, le joueur ne plante pas un caillou, mais montre de belles choses, à tel point que Vasco da Gama fait une offre pour un prêt. Au Brésil, Conca explose enfin. Le type, loin de la pression du bled, joue libéré et le peuple local ne tarde pas à en faire son chouchou. Après une belle saison à Vasco, Dario a déjà 25 ans. Fluminense le recrute en pleine bourre. Le joueur s’intègre rapidement dans une équipe bien huilée et fait la connaissance d’un certain Thiago Silva avec lequel il atteindra la finale de la Copa Libertadores en 2008, perdue aux tirs au but. « Je me souviens, j’étais là pour le dernier match de Thiago Silva avant son départ au Milan AC, et je peux te dire que le chouchou au Stade Maracanã, c’était pas lui, mais Conca » , se souvient Smaïl Bouabdellah, journaliste à beIN Sports.

« Il a beaucoup apporté à Evergrande »

Fraîchement élu Ballon d’or brésilien et enfin reconnu à sa juste valeur par toute la planète foot, Dario Conca est courtisé par tout le gratin européen. Mais à 28 ans, ses perspectives d’avenir dans un grand club sont minces. En réalité, le génial milieu argentin n’a aucune marge d’erreur. S’il se loupe chez un grand d’Europe, sa carrière se finira comme elle a commencé, par une pléiade de courtes expériences. Du coup, quand le Guangzhou Evergrande lui propose d’intégrer le cercle très fermé des cinq joueurs les mieux payés du monde, le cerveau de Dario fume. À l’époque, le club chinois ne lui offre que 400 000 euros de moins que le salaire de Messi, soit 10,6 millions annuels. Une folie que l’Argentin ne pourra finalement balayer du revers de la main. L’ancienne ouaille de River Plate fonce donc tête baissée découvrir si les pelouses sont vertes derrière la Grande Muraille. Invaincu en 13 rencontres, le Guangzhou Evergrande tourne déjà à plein régime. « Il a apporté la dernière passe, voire l’avant-dernière passe. Au début, il est arrivé en 10, puis au fil des matchs, il est redescendu plus bas, dans une position de 6 offensif » , se souvient Philippe Troussier, qui l’a affronté en tant que coach avec le Shenzhen Ruby. De saison en saison, l’Argentin soigne ses stats. « Il marquait peu de buts dans le jeu, mais surtout sur coup franc. C’était un Juninho version poche. Il a beaucoup apporté à Evergrande. Car en Chine, les joueurs locaux ne sont pas formés à faire la transition entre le milieu et l’attaque. C’est pour ça qu’un joueur dribbleur et passeur réussira toujours plus qu’un pur attaquant. D’où l’échec Hoarau » , analyse Troussier. En 2012, l’arrivée de Marcello Lippi confortera l’Argentin dans son rôle de meneur. Le coach transalpin le convaincra même de rempiler une dernière saison, celle du doublé et celle de la consécration sur la scène asiatique (le titre national et la Ligue des champions). Trois ans après, les trophées et les billets plein les poches, Dario décide finalement d’en revenir à son premier amour, celui qui l’a révélé et lui a permis de devenir le jeune homme riche qu’il est. Au Fluminense, il gagnera 8 millions d’euros de moins qu’en Chine, mais qu’importe, Conca clôture un chapitre, et par la même occasion, met fin à la courbe du temps.

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Par Quentin Müller

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