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Comment débrider une Kawasaki…
Si vous aimez le suspense, il fallait regarder la J-League ce week-end. Dimanche soir, lors de la treizième journée de la seconde phase du championnat, Kawasaki Frontale et Yokohamas F Marinos ont fait durer le plaisir dix minutes au-delà du temps réglementaire. Avec trois buts et deux retournements de situation dans les arrêts de jeu. Séquence émotion.
Arsenal a fracassé Chelsea samedi pour le derby de Londres. Dimanche, le Japon a répondu à l’Angleteterre avec son « derby de Kanagawa » , préfecture au sud de Tokyo. Au stade d’athlétisme Todoroki – le fief de Frontale quand les Marinos jouent, eux, au « Nissan » qui a accueilli la finale du Mondial 2002 – ils étaient 25 000 spectateurs entassés dans ce que la presse nippone appelait ce lundi un « théâtre » . Car les acteurs du match ont offert des montagnes russes émotionnelles au public : à la fin du temps réglementaire, les locaux menaient 2-0 contre leurs illustres rivaux. Et avaient conservé leur avance intacte cinq minutes plus tard, à un moment où n’importe quel match lambda serait arrivé à son terme. Sauf que ce Frontale-Marinos ne l’était pas : dans la sixième minute du temps additionnel, les Violets – leur tunique away – ont réduit le score avant d’égaliser deux minutes plus tard… De quoi faire rager le coach de Kawasaki ? Pas forcément vu que le match s’est étiré sur plus de dix minutes d’arrêts de jeu, et que ses hommes, aux couleurs du mythique club brésilien du Grêmio Porto Alegre, ont arraché la victoire au bout du bout du temps additionnel. Complètement fou.
Frontale vise la finale
Pourtant, tout avait commencé comme un match classique. Au quart d’heure de jeu, un marquage laxiste et une absence de pressing défensif permet au latéral droit de Frontale d’ajuster un centre à l’entrée des six mètres. Le péroxydé Kenta Kano ne se fait pas prier pour crucifier le gardien adverse d’une belle tête piquée décroisée. Face à un adversaire qui manque parfois d’engagement dans les duels, les locaux sont même tout proches de creuser l’écart au début de la seconde période avec une récupération dans le camp des Marinos conclue par une belle frappe juste au-dessus du cadre de Yu Kobayashi. Une petite victoire tranquille se dessine pour Frontale, qui pourrait ainsi sécuriser sa place sur le podium et valider sa qualification pour la grande finale de la J-League. Chose a priori entérinée quand Yusuke Takada trouve d’une passe lumineuse son attaquant Koji Myoshi entre les deux centraux de Yokohama, et que le buteur conclut d’un subtil piqué. On est à la 85e minute, il y a 2-0, et on peut penser que le match est plié. Sauf qu’au cours du deuxième acte, Shota Arai, gardien de Frontale, s’est blessé et son évacuation du terrain a pris un certain temps. Ce qui pousse l’arbitre, Masaaki Iemoto, à annoncer jusqu’à dix minutes de plus.
Trois buts en quatre minutes
Alors quand Kosuke Nakamachi, en bon renard de surface, vient pousser le ballon au fond après une première parade du gardien de Frontale, forcément, il ne fait pas plus que sauver l’honneur. On en est à la 96e… Sauf qu’une semaine plus tôt, le 17 septembre, Kawasaki s’est déjà fait dessus dans un contexte similaire : menant 2-1 sur la pelouse d’Omiya Ardija, les Bleu et Noir sont finalement repartis à la maison avec une défaite 3-2. Mais deux minutes après le but de Nakamachi, un milieu de Frontale foire totalement sa passe en retrait et envoie Manabu Saito au but, tout le stade crie d’effroi. L’attaquant de Marinos joue bien le coup : il contourne le gardien avant de centrer en retrait pour Sho Ito qui envoie le ballon du gauche en lucarne. 98e minute, et Marinos vient d’arracher le nul. Enfin, c’est ce qu’aurait voulu la logique. Mais deux minutes plus tard, la logique a totalement déserté le stade quand, suite à un corner trop long, Yusuke Takada récupère côté gauche et dépose le ballon sur la tête de Yu Kobayashi, qui décroise et trouve le petit filet gauche de Tetsuya Enomoto, le gardien des Marinos. On en est à la 100e minute du match, et les visiteurs ne pourront faire mieux, cette fois, que de se porter aux abords de la surface adverse sans tirer au but. Kawasaki Frontale a sûrement achevé tous ses fans souffrant d’insuffisance cardiaque, mais l’essentiel est ailleurs : l’équipe va disputer le Championship Stage avec les deux autres meilleures équipes de la saison. Avec un tel sens de la dramaturgie, ils méritent déjà le titre.
Par Nicolas Jucha