- Coupe du monde 2014
Comment bien choisir sa sélection en vue de la Coupe du monde
À quatre mois de la Coupe du monde, il est grand temps de choisir sa sélection. Diego Costa, Januzaj ou encore Icardi sont bien au courant. Les sélections nationales leur caressent les pieds depuis un moment. Patience, le choix est irréversible, mieux vaut prendre son temps. Et s'il n’y a rien de plus beau que de jouer la Coupe du monde avec son « pays », parfois mieux vaut la jouer tout court.
Si tu veux jouer pour le Qatar
« Les règles de la FIFA concernant les naturalisations sont très claires. Si un joueur n’a jamais joué pour l’équipe A d’une autre nation, alors il peut changer de nationalité et jouer pour le pays de son choix. Les trois joueurs que nous avons décidé d’enrôler dans notre équipe nationale peuvent le faire. Et on espère que la FIFA sera OK. » En 2004, Philippe Omar Troussier se croit à la tête du PSG. Il n’a pas les joueurs sur place pour se qualifier pour la Coupe du monde 2006, alors il cherche à recruter du Brésilien. Ailton, Leandro et Dede sont sur ses tablettes. Il a logiquement le soutien de la Fédération qatarie. Le Français était à deux doigts de la mettre bien profond à tout le monde. Malheureusement, la FIFA réagit juste à temps. Désormais, le joueur voulant être naturalisé doit remplir au moins l’une de ces conditions : il est né sur le territoire, sa mère ou son père biologique est né sur le territoire, sa grand-mère ou son grand-père est né sur le territoire, il a vécu au moins deux années consécutives sur le territoire. OK. C’est plus contraignant. Le Qatar va être bien emmerdé pour son Mondial, même s’il reste encore quelques options et un bon argument pour réaliser un bon mercato en 2022. Ils sont déjà qualifiés.
Si tu espères la jouer
Francileudo Santos, plus connu sous le nom de Santos, n’a rien d’un Tunisien. Ni le nom, ni la tête. Pourtant, l’ancien attaquant de Sochaux et du TFC brillera pendant quatre années avec les Aigles de Carthage. La faute à son passage à l’Étoile du Sahel. Mais avant de tomber sous leur charme, Santos mettra aussi quatre années à se décider. En 2000, il joue pour Sochaux, il empile les buts, 53 en 5 saisons, pour les Doubistes, c’est énorme. La Tunisie ne cesse de l’appeler, de lui laisser des messages… sans réponse. Rien de mieux que le bon vieux silence radio pour faire comprendre à une ex trop encombrante qu’elle ne correspond pas vraiment à tes critères. Jusqu’au jour où Santos réalise qu’il ne jouera jamais pour le Brésil. La Seleção est trop belle, championne du monde en 2002 et menée par un Ronaldo Ballon d’or. Finalement la Tunisie, c’est pas si mal. En décembre 2003, devant une concurrence beaucoup moins séduisante, il devient le titulaire indiscutable à la pointe de l’attaque tunisienne. Objectif : la CAN 2004 et la Coupe du monde 2006. Le pari est risqué, mais il prend forme lorsque Santos offre la première CAN de l’histoire aux Aigles de Carthage en abattant le Maroc en finale. Dans la foulée, ils obtiennent leur qualification pour le Mondial toujours grâce à leur « Brésilien » . Santos a réussi son pari. Il jouera la plus prestigieuse des compétitions. C’était sans compter sur son genou défectueux. Finalement, il regarde à la télévision ses coéquipiers sortir dès le premier tour. Bien essayé tout de même.
Si tu as tourné le dos à ton pays d’origine
Ferenc Puskás est la légende du football hongrois. De 1945 à 1956, il corrige à chaque fois qu’il joue. « Le Major galopant » se sent bien sous les couleurs de son pays, champion olympique en 1952 et finaliste de la Coupe du monde en 1954. Idem avec son club, le Honved Budapest. Champion à répétition, il réalise alors avec son équipe une tournée en Europe de l’Ouest, histoire de taper du très lourd. Mais cette année-là, c’est l’Histoire qui forcera sa décision. L’insurrection de Budapest en 1956 l’oblige à s’exiler en Espagne. Après un détour par Londres, il rejoint alors le Real Madrid et la sélection espagnole. Dans ces années-là, la naturalisation d’un joueur se faisait en un claquement de doigt. Une nationalité et quelques années plus tard, il dispute la Coupe du monde 1962 avec la Roja. Mais quand le cœur n’y est pas, rien ne va. Après trois matchs sous ses nouvelles couleurs, Puskás n’a plus le même appétit. Aucun but et une sortie prématurée.
Si tu n’as plus le choix
Avoir le choix, ça monte vite à la tête. Germano-ghanéen, Kevin-Prince Boateng a fait le con, et du coup, un choix par défaut. Même si, en apparence, il est heureux avec le Ghana, tout laisse à penser qu’il aurait préféré jouer aux côtés de son demi-frère Jérôme. Il a débuté avec l’Allemagne en moins de 19 ans, et on lui promet alors un avenir radieux. Il se permet même en 2007 de refuser « définitivement » les Black Stars. Mais ça, c’était avant le tournoi de Toulon de la même année. De « vagues incidents » , on évitera les détails, compromettent son avenir avec la Mannschaft. En 2009, il ravale sa fierté et sonne à la porte de la sélection ghanéenne. Une belle opportunité de saisie, puisqu’il fera partie du groupe sorti par l’Uruguay en quarts de finale du Mondial 2010.
Si tu veux faire plaisir à papa
Pierre-Emerick Aubameyang aurait pu porter le maillot bleu frappé du coq. Sauf que l’attaquant a préféré honorer la carrière de son père et ses origines : « Le Gabon a été un choix de cœur. Ma première CAN restera l’un des plus beaux souvenirs de ma carrière. Jouer une CAN, c’est beau, mais la jouer à domicile, c’est encore plus beau. » Clairement, on voit mal ce qui aurait pu le décider. Peut-être ce match en espoir contre la Tunisie en 2010. Il fera finalement le choix du cœur, de ses origines, le choix paternel. Quitte à ne jamais participer à la Coupe du monde.
Si tu veux la jouer à tout prix
C’est le cas de figure le plus représenté. Nombre de camarades sont passés par là et continuent de faire ce choix. Jouer coûte que coûte. Quitte à se servir de sa femme américaine, se marier avec elle, choper la nationalité et participer à la Coupe du monde dans son pays. C’est l’histoire de David Régis. Même si on ne doute pas de son amour pour Nikki, le hasard fait bien les choses. Ce Français passé par Valenciennes, Strasbourg et Lens rencontre donc une Américaine expatriée. Ils se marient en 1995. Repéré en 1998 par Steve Sampson, le sélectionneur américain, il ne lui reste que peu de temps pour participer au Mondial français. Il obtient finalement le passeport américain le jour du match d’ouverture de la Coupe du monde. Merci l’amour.
Si tu es assez bon pour jouer partout
Tout le monde te désire : alors opte pour la meilleure sélection. Fais comme Mesut Özil, Sami Khedira ou encore Zakaria Bakkali plus récemment. Après tout, Pierre de Coubertin racontait des conneries. Participer, mais pour quoi faire ? Tant qu’à pouvoir choisir sa sélection, autant essayer de faire le bon choix, celui de la gagne. La victoire en sera peut-être moins belle, mais victoire il peut y avoir. Contrairement à d’autres choix plus romantiques, celui-là sonne comme une évidence. À choisir entre l’Espagne et le Zimbabwe (no offense), la décision est rapide à prendre. Ensuite, comme Diego Costa, quand les deux meilleures sélections au monde te draguent, il ne te reste plus qu’un bon pile ou face. Pile. Ça sera l’Espagne.
Si tu as perdu tout espoir
Tu as joué pour une sélection espoir, mais tu n’as pas confirmé ? Tu fais de ton mieux pour te faire remarquer, mais rien n’y fait ? Tu as perdu espoir ? Alors imite Ludovic Obraniak et reviens vers tes lointaines origines. Caché derrière de bons sentiments. « Je vais être polonais parce que mes grands-parents étaient polonais. Je suis rattaché à cette culture. » On te fera certainement plus de place. Même si tu ne parles pas un seul mot de leur langue, tu joueras sans aucun doute beaucoup plus là où la concurrence s’appelle Klich, Zielinski ou Sobota. Et la Coupe du monde t’ouvrira peut-être les bras si tu arrives à t’entendre avec le sélectionneur. Tu as déjà participé à un Euro à « la maison » . C’est pas si mal que ça.
Auraient pu être cités : Moussa Sow, Alfredo Di Stéfano, Laszlo Kubala, Sébastian Soria, Frédéric Kanouté, Jean-Armel Kana-Biyik, Lamine Sakho, David Trezeguet…
Par Ugo Bocchi