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Coentrão, guesh caviar

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Coentrão, guesh caviar

Blond décoloré. 23 ans. 30M€. Fábio Coentrão est la recrue de l'été. Il est gaucher, de gauche et parfois gauche... Le Real, il le vaut bien.

Le Real Madrid vient de cracher 30M€ pour s’offrir un blondinet d’un 1,79m et 66kg. Fábio Coentrão, 23 ans, arrive du Benfica. Un destin aussi évident aujourd’hui que mal barré il y a encore un an. L’international portugais a tout d’une star. Une enfance mouvementée, un talent innée, une ambition démesurée et un melon qui ne demande qu’à être châtré…

« Figo des Caxinas » et fils d’immigrés en France

Vila do Conde. Ville côtière au nord de Porto. C’est dans le quartier des Caxinas – petit village de pêcheurs – que Fábio a poussé ses premiers ballons. Ses premières accélérations. Tout aussi vite, le virevoltant gaucher se voit attribuer l’appellation de « Figo des Caxinas » . « Je suis très aimé chez moi mais ne me donnez pas ce surnom. Appelez-moi Fábio » , tempère-t-il, avant de céder : « Certains, pour rire, m’appellent aussi le magicien » . Coentrão, c’est ça. Un paradoxe sur pate. Inarrêtable. Imprévisible. C’est loin des yeux de ses parents qu’il va se lancer dans le football. Dans le club local : Rio Ave. Une fierté pour Bernardo, le paternel. Cet ancien pêcheur n’hésite pas à exhiber fièrement son tatouage fétiche : l’écusson de la formation vilacondense. Mamã Maria Josefina ne sera guère plus présente. Fábio a vécu loin des siens. « Mes parents étaient dans le sud de la France (du côté de Cannes ndlr). Mon père travaillait dans des élevages, des choses liées à la mer, c’est ce qu’il aime. Mes deux frères aussi étaient là-bas » , narre-t-il. Et la France a presque fait avorter sa carrière : « J’ai failli les rejoindre à l’âge de 13 ans mais le Rio Ave a demandé à ce que je reste au Portugal » .

Esseulé, le gamin livrera son lot de conneries. Comme tous. Et il en sortira grandi. Comme peu. Son ascension permettra surtout le rapatriement de ses proches… en janvier dernier. De retour sur ses terres, la mère Coentrão range l’aspirateur et respire : « Je ne travaille plus. Sinon, je serais restée là-bas… » . Maintenant, c’est le fiston qui bosse. Sans oublier ses racines. Aucun tournoi, aucune manifestation ne s’organise à Vila do Conde sans sa présence. En mai dernier, il s’est même pointé aux côtés du Premier ministre sortant, José Sócrates, en pleines législatives. Une montée côté gauche qui n’a pas empêché la défaite des socialistes.

Recalé par le Sporting, Mourinho et Di Maria

Le 17 avril 2005, Fábio vit sa première minute de jeu dans l’élite. Carlos Brito vient de lâcher une perle. Mais c’est en 2006/07 qu’il explosera. En D2. Le Sporting le suit. Et le tente. Mais le Rio Ave en réclame 750K€. Les Lions déclinent. Chelsea le met à l’épreuve, à son tour. Le joueur se souvient : « J’ai fait un essai d’un mois mais Mourinho est parti… » . Ce n’était donc que partie remise. Les deux hommes partagent le même agent : Jorge Mendes. Mou est aujourd’hui de retour et il bande bien dur pour le décoloré. Après un Mondial U20 2007 dont il ressort quasi seul vainqueur (le Portugal sera éliminé en 8ème de finale de le Chili), c’est le Benfica qui l’enrôle pour un peu moins de 800K€. Mais l’adaptation sera difficile. Devant, lui, il y a un certain Angel Di Maria.

Recruté à prix d’or (7M€), l’international argentin s’attire les faveurs des coaches et du public. Lassé de cirer le banc, Fábio enchaîne les prêts. Le Nacional, à l’hiver 2008, Saragosse, la (demie) saison suivante avec même un retour à la case départ, Rio Ave. Mais la petite tête blonde prend la grosse tête. Capricieux, il parvient à énerver les dirigeants de son club formateur. Et il gonfle : « Di Maria possède ses qualités et moi les miennes. Je ne vais pas dire qu’il est meilleur que moi parce que je pense que je suis meilleur. Je mérite une nouvelle opportunité au Benfica » . Et comme la providence, elle arrive…

Sauvé par Jesus

La vie de Coentrão bascule le jour où il croise la route de Jesus. A l’intersaison 2009, Jorge Jesus signe chez des Aigles (presque) à poil de titres. JJ convoque le tricard au stage de pré-saison qui envoie : « Je travaille tous les jours pour intégrer le groupe du Benfica » . Il entame sa rédemption : « Je crois que je suis arrivé trop tôt au Benfica. Ça n’a pas été facile d’arriver dans cette maison et de s’y affirmer. J’ai été prêté mais je suis revenu et j’ai renversé la tendance » . Fábio se confesse : « Je suis arrivé à Lisbonne à l’âge de 19 ans et la notoriété m’a montée à la tête » . Il promet : « Je ne suis plus un rebelle mais un garçon posé(…) Avant je pensais avec mes pieds, aujourd’hui, je pense avec ma tête » . La grande gueule devient gueule d’ange, même lorsqu’il évoque Angel : « Di Maria est un excellent joueur, il a d’énormes qualités. Même si je veux bien sûr m’affirmer dans cette équipe, ce que je veux le plus c’est que le Benfica gagne chaque week-end » . Fábio prend sur lui et prie pour être loué à son tour dans la Catedral.

Il est l’un des seuls pros à crécher au Seixal, le centre d’entraînement du SLB qu’il ne quittera qu’à l’été 2009. Un an plus tard, il achètera une villa dans le Marisol juste à côté de son Seigneur Jesus. Coentrão lui déclare sa flamme : « Je l’aime. Je ne retrouverai plus jamais un entraîneur comme Jorge Jesus. C’est sans aucun doute le meilleur entraîneur que je n’ai jamais eu » . Il joue par à-coups. Et convainc. Dès septembre, son salaire est doublé. Sa clause libératoire atteint les 20M€. Un mois plus tard, il prolonge jusqu’en 2015 et la clause monte aux fameux 30M€. Jesus cogite à convertir cet ailier en latéral : « Je pense qu’il peut jouer à ce poste avec une qualité au-dessus de la moyenne » . JJ commence à pousser César Peixoto sur le banc et à refiler les lauriers à Fábio. En décembre, le gamin est le meilleur passeur du championnat. Et même pas un titulaire évident. Le Mondial n’est pas loin. Mais Fábio revient de loin : « La Selecção ? Il est encore tôt… » , tempère-t-il. Le Portugal se cherche pourtant un défenseur gauche. FC se fait une place à ce poste à la Luz. Et il kiffe : « Je me sens bien dans les deux positions. Je n’ai pas de préférence. Je joue là où le mister voudra aussi bien au Benfica qu’en Selecção. Même si toute ma vie j’ai joué comme ailier, je commence à aimer jouer comme latéral et j’aime cette position » . Ses performances lui valent des éloges. L’intérêt de certains, déjà. Et ses envies grandissent : « Bien sûr que j’aimerais aller en Afrique du Sud. Je travaille pour que ce soit le cas. J’espère que Carlos Queiroz aime ce que je fais. Si le Benfica est champion, ce sera encore plus facile » . Et ce sera le cas. Fábio « ne pense même plus à [son] mariage » et il sera le seul benfiquiste avec le Portugal à la Coupe du Monde. LA satisfaction guesh du tournoi. Coentrão peut le dire : « Jesus a fait de moi un joueur et un homme » . Riche…

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Chronique d’un transfert annoncé

24 mai 2010 : La presse espagnole annonce que le Mou a exigé trois noms aux payeurs madrilènes : Di Maria, David Luiz et Fábio Coentrão. Ce dernier commente : « C’est un honneur que mon nom soit associé au Real Madrid qui, selon moi, est le meilleur club du monde » . Mais il la joue benfiquiste : « Je suis au Benfica, j’aime le Benfica et je suis sous contrat » .

26 mai 2010 : Mourinho bluffe : « Fábio Coentrão est un excellent joueur dont on parle beaucoup mais je préfère un joueur avec un profil différent même si je reconnais qu’il est un grand joueur avec une grande marge de progression » .

Juin 2010 : Benfica refuse 20M€ du Bayern. La Juventus est aussi sur les rangs. Fábio bombe le torse : « Je pense qu’au Mondial j’ai prouvé que je valais 30M€ » .

Septembre 2010 : Le SLB veut augmenter sa clause libératoire à 40M€ mais le joueur refuse.

Octobre / novembre 2010 : La liste des prétendants s’élargit. Milan, Liverpool, Manchester City et United viennent aux renseignements. Le Bayern insiste toujours.

Octobre 2010 : Cristiano Ronaldo se fait l’agent de son agent : « Fábio Coentrão est un grand joueur » .

14 Janvier 2011 : Coentrão balance à la SIC : « Qui n’aimerait pas être entraîné par José Mourinho qui a déjà gagné tout ce qu’il y a gagner ? » .

Janvier : La Lazio, l’Atletico Madrid, l’Inter Milan, le Zenit et Tottenham en bavent pour le blondinet.

Février : Fábio le benfiquiste 2 : « J’aime Benfica. Je suis déjà dans un grand club » .

05 Mars : Jesus tend la joue et prophétise : « Je ne sais pas quel sera le destin de Fábio mais je suis certain qu’il sera heureux » .

Mars : le Bayern monte à 25M€.

1er avril : Fábio, le poisson rouge : « Si le président du Benfica me présentait un contrat à vie, je le signerais toute de suite ! » .

Mai : La Fiorentina et l’Inter tentent une approche.

27 Mai : Fábio profite de sa présence en Selecção pour se lâcher : « Le Real Madrid est un grand club. J’ai toujours dit que je voulais rester au Benfica mais je crois que les supporters comprennent parfaitement ma situation. J’ai réalisé deux saisons fantastiques et je crois que les supporters du Benfica seraient contents que je parte pour le Real » .

Seconde tirade : « Le Real possède le meilleur entraîneur du monde et le meilleur joueur du monde (CR7 ndlr), je dois aller là-bas. Je veux signer. Je sais qu’il y a un grand joueur à mon poste qui est Marcelo mais je n’ai peur de personne » .

28 Mai : CR7 la lèche dans AS : « Fábio est un joueur très fort, l’un des meilleurs footballeurs du monde. C’est un joueur polyvalent et j’ai déjà dit à plusieurs de mes amis qu’il est de ces joueurs qui manquent à n’importe quelle équipe » . Marcelo, c’est un pote ?

29 Mai : Le président du SLB, Luis Filipe Vieira, se montre agacé par les sorties de son gaucher. Sur le plateau de TVI, il tente de le recadrer : « Ce qu’il nous a dit et ce qu’il a affirmé publiquement c’est que le 22 il se présentera chez nous pour reprendre le travail. Il a dit qu’il le ferait, il n’y a donc rien à rajouter… Si quelqu’un est intéressé pour payer le montant de sa clause libératoire, là, nous ne pourrons rien faire » . LFV ferme les yeux… ça vient…

02 juin : Sur Cadena Ser, Mourinho met la pression : « D’abord, Fábio Coentrão est un joueur du Benfica. Ensuite, il est un grand joueur. C’est un joueur que j’aime depuis longtemps et qui a un profil très important dans le football actuel : sa polyvalence. Il joue à presque tous les postes et avoir un joueur de ce type dans son effectif est un plus » .

06 juin : Dans AS, Fábio botte le club des Aigles : « J’ai de la gratitude envers le Benfica mais le Benfica devrait aussi me remercier » . L’interview donnée sans l’autorisation de son club lui vaudra une amende.

06 juin : CR7 poursuit son boulot de com sur Cadena Cope : « Fábio est le meilleur portugais au Portugal. Ce serait une grande recrue. C’est un bon garçon, ambitieux et qui court beaucoup » .

09 juin : Coentrão est en vacances… en Espagne.

19 juin : Les négociations sont difficiles. Et Fábio doute : « Je suis un joueur du Benfica. Je suis sous contrat jusqu’en 2016. J’ai toujours dit que j’aimais le Benfica. Le 27, je serai de retour au travail » .

26 juin : Le Chelsea d’André Villas Boas est prêt à aligner les 30M€. Mais Coentrão refuse.

27 juin : Comme promis, Coentrão est à la reprise de l’entraînement.

30 juin : Le Correio da Manhã annonce une prise de bec entre Jesus et Coentrão à l’entraînement. JJ reproche à son protégé de trainer la patte.

04 juillet : Coentrão ne fait pas partie des joueurs convoqués pour le stage de pré-saison en Suisse.

05 juillet : Fábio signe au Real pour six saisons. Le transfert s’élève donc à 30M€. Garay estimé à 5,5M€ va faire le chemin inverse.

Nicolas Vilas

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