- Coupes d'Europe
Un carton plein, et demain ?
Les six clubs français engagés en coupes d’Europe cette saison ont franchi l’obstacle de la phase de groupes. C’est rare, et cela mérite d’être souligné. Même si le prochain rendez-vous, en février, en dira davantage sur l’état de santé du foot hexagonal.
Difficile de ne pas y voir un curieux paradoxe. Alors que la cuvée 2022-2023 avait été sacrément rafraîchissante à bien des égards, force est de constater que la Ligue 1 n’est pas très emballante à suivre cette saison. Entre des matchs rarement spectaculaires – voire carrément soporifiques –, des projets de jeu peu lisibles et des grosses écuries en deçà du rendement attendu, les week-ends sont parfois bien tristes pour les observateurs assidus du championnat de France. Pas l’idéal, c’est vrai, alors que la LFP est encore à la recherche de diffuseurs pour le cycle 2024-2029. Dans ce contexte morose, on aurait pu craindre une bérézina sur la scène européenne. Ça avait d’ailleurs très mal commencé, puisque l’Olympique de Marseille avait laissé filer le train de la Ligue des champions en chutant contre le Panathinaïkos dès le troisième tour préliminaire (0-1, 2-1, 3-5 TAB). Pourtant, les six clubs français engagés en coupes d’Europe ont tous, sans exception, franchi l’obstacle des poules. Et c’est tout sauf anecdotique : depuis la réforme de 2009 (Coupe de l’UEFA transformée en Ligue Europa, fin de la Coupe Intertoto), les formations hexagonales n’avaient signé un carton plein qu’une seule fois. C’était il y a deux ans, en 2021-2022.
Les revenants à pleines dents, les habitués ont fait le boulot
Cette situation est d’autant plus remarquable que deux clubs faisaient leur retour sous les projecteurs continentaux depuis des lustres, à savoir Lens et Toulouse. Certains prédisaient le pire au Racing, chamboulé au mercato et auteur d’un démarrage poussif en Ligue 1. Dans une poule de C1 plutôt dense, les Sang et Or ont toutefois vaillamment défendu leurs chances et si l’on peut regretter qu’ils n’aient pas un peu mieux négocié leurs deux confrontations face au PSV (un point pris sur six), on doit les féliciter d’avoir sécurisé la troisième place avec autorité, ce qui leur permet d’être reversés en barrages de Ligue Europa. Ils y retrouveront les Violets, englués dans le bas de tableau en championnat, mais admirables de courage et d’abnégation en C3. Surtout, Lensois et Toulousains ont égayé l’automne européen du foot français en signant des exploits remarquables. Les premiers ont dominé Arsenal (2-1), les seconds se sont offert Liverpool (3-2), à chaque fois dans une ambiance incandescente. À l’image de leur campagne, ces soirs-là, il n’y a eu ni calcul ni complexe d’infériorité, mais du culot et une détermination sans faille : à l’arrivée, cela débouche sur un succès mémorable. Et sur une qualification bien méritée.
Avec vous, 𝗽𝗼𝘂𝗿 𝘃𝗼𝘂𝘀 💜
En février prochain, notre road trip européen continue ! Nouvelle destination connue dès lundi 😉#DeboutToujours 😈 pic.twitter.com/x3NfOW8Wo2
— Toulouse FC (@ToulouseFC) December 14, 2023
Si les deux revenants ont croqué dans leur aventure européenne à pleines dents, les habitués, eux, ont fait le boulot comme il faut. Sans trop forcer, Lille s’est promené en tête d’un groupe de Ligue Europa Conférence dont il était logiquement favori. L’OM et Rennes ont assuré dans leur poule respective, même si les deux formations ne se sont pas facilité la tâche en lâchant bêtement leur première place lors de l’ultime journée. Enfin, il y a le cas PSG. Les champions de France ont été bousculés comme jamais en phase de groupes depuis le rachat par QSI. Ils ont bien failli être reversés en C3, ce qui aurait assurément terni le bilan global. Mais les partenaires de Kylian Mbappé ont réussi à passer par un trou de souris pour rallier les huitièmes de finale. Et, au fond, c’est bien là l’essentiel.
12 – Paris s’est qualifié pour la phase à élimination directe de la Ligue des Champions pour la 12e fois consécutive, seuls le Real Madrid (21) et le Bayern Munich (16) font mieux actuellement. Soulagement. #BVBPSG pic.twitter.com/4HKWwbycv1
— OptaJean (@OptaJean) December 13, 2023
Février, le vrai mois de vérité
Tout ce beau monde suivra avec appétit les tirages au sort programmés lundi, qui dévoileront la suite des hostilités. Celles-ci se tiendront à partir de mi-février, et on a tendance à penser qu’il s’agira là du véritable crash-test pour les clubs français. Car l’exemple de la saison passée est encore bien frais. À l’exception de Marseille, tous les représentants tricolores avaient franchi le cut de décembre. Mais quatre d’entre eux avaient ensuite pris la porte dès l’entame des matchs à élimination directe (PSG, Monaco, Rennes et Nantes), laissant Nice, engagé en C4, assumer le statut de seul rescapé national. Tout de suite, forcément, c’était moins brillant, et ça a pesé lourd dans le duel mené avec les Pays-Bas au coefficient UEFA. Cet affrontement franco-batave sera encore en toile de fond en 2024. Pour l’heure, les formations françaises encore en lice sont deux fois plus nombreuses que les néerlandaises (PSV en C1, Feyenoord en C3, Ajax en C4), mais le rapport de force sera-t-il toujours aussi favorable après les premiers rendez-vous couperets ? Ce n’est absolument pas garanti. Sorti deuxième de son groupe, Paris sera opposé à un cador et sera certainement obligé de hausser le curseur pour éviter une nouvelle déconvenue dès les huitièmes. Barragistes de C3, Marseille, Rennes et Toulouse devront disposer d’équipes reversées de la Ligue des champions et ne partiront vraisemblablement pas avec les faveurs des pronostics. Lens bénéficiera a priori d’un tirage plus clément, mais son manque d’expérience pourrait lui être préjudiciable. Dans le pire des scénarios, seul Lille, exempt de barrages, sera toujours de la partie mi-mars. Alors, le carton plein de l’hiver paraîtra bien fade quand arrivera le printemps.
Par Raphaël Brosse