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Clubs français en coupes d’Europe : la rentrée des crasses
Avec le petit point rennais en trois matchs de C1 et le 6-2 infligé à Nice en C3, le bilan européen des clubs français est tout minus. Les automnes se suivent et se ressemblent. L’exception lilloise fait « penser printemps »...
Malgré le titre féroce, commençons par un peu d’indulgence. La crise sanitaire va encore affecter le foot mondial pendant au moins deux saisons. L’année 2021 avec l’Euro et les JO, puis l’année suivante avec la Coupe du monde dessinent une période incertaine, surchargée de matchs de clubs et de sélections. Des préparations physiques tronquées, des cas de Covid qui tombent sans prévenir, les séquelles psychologiques du confinement, les calendriers bousculés, les pertes économiques inouïes, les huis clos déshumanisants, voire même la règle des cinq changements pas encore bien maîtrisée par les coachs, bref… Le foot professionnel va naviguer à vue avec des équipes qui flanchent à certains moments, des cracks en berne et des scores parfois irrationnels (cf. Liverpool tapé 7-2 par Aston Villa). C’est pourquoi le contexte général perturbé incite à l’indulgence générale qui doit aussi profiter à nos chers clubs français. On atténuera donc un jugement qu’on aurait voulu féroce sur le bilan famélique de trois défaites (PSG et OM en C1, Nice en C3), un nul (Rennes) et une victoire (Lille).
Reste que cette première soirée européenne indigeste nous a reconnectés aux saisons précédentes, avec une médiocrité qui n’épargnera que Rennes et Lille. Trois déclarations synthétisent l’état d’esprit de nos clubs. Le Niçois Pierre Lees-Melou, après s’être fait rouler dessus par Leverkusen (6-2) : « On a vu un peu plus d’intensité par rapport à ce qu’on est habitué à avoir en Ligue 1. » C’te blague ! Les clubs français redécouvrent chaque année qu’un match de football dure 90 minutes et que leurs adversaires ont toujours la sournoiserie crasse de marquer en fin de rencontres (Manchester United, Olympiakos et Leverkusen)… Autre déclaration, Paul Pogba sur le PSG, après le succès des Red Devils au Parc (2-1) : « On les a surpris. Ils ne s’attendaient pas à ça. » La sournoiserie crasse de l’adversaire, encore ! Le grand Paris a été très désappointé de rencontrer des jeunes Mancuniens effrontés bien regroupés en bloc, toujours en mouvements et exploitant au maximum les espaces laissés dans leur moitié de terrain. Enfin, les impressions du vétéran Mathieu Valbuena sur l’OM : « J’ai vu peu d’âme dans cette équipe, ni d’entraide entre eux. […] Je n’ai pas vraiment vu de révolte. Je pensais voir une équipe attaquer très fort le match, avec beaucoup d’agressivité. » Tirez le rideau ! Tout ça pour dire que toute critique tactique de ces trois revers s’estompe en grande partie à partir du moment où l’état d’esprit n’y est pas. Mais, bon ! On a prôné l’indulgence pour cette reprise des coupes d’Europe. Alors indulgeons.
Lille et Rennes, ligne claire
Pour survoler rapidement les débats, on dira que Nice a été balayé par un Leverkusen plus fort que lui, mais sans être génial, et qui a su mieux s’organiser à 0-2. Gouiri (un beau but) et Lees-Melou ont surnagé, alors que Dolberg s’est noyé. Le PSG-Manchester s’est en fait réduit à un duel de gardiens face à des attaquants en roue libre et qui a tourné en faveur de De Gea. Thomas Tuchel s’est planté avec Mbappé en 9 et un milieu essentiellement défensif (Herrera, Danilo, Gueye), incapable d’orienter devant et de bien protéger derrière. Verratti absent et Rafinha entré trop tard (78e) auraient apporté la créativité dont a fait preuve Bruno Fernandes pour donner l’avantage tactique global aux Red Devils. Et en plus, Fernandes défend, lui ! Ce qui n’est pas le cas des Trois Fantastiques parisiens, isolés devant, déjà privés de profondeur par le back five adverse et neutralisés en prise à deux ou trois. Un PSG au complet (avec retours de Marquinhos, Paredes, Verratti) peut encore réaliser un truc à Old Trafford.
Un truc, l’OM devait en faire un au Pirée pour espérer décrocher la troisième place d’une poule où Manchester City et Porto devraient émerger. Que dalle ! Pour son retour en C1, face à un Olympiakos un peu en mode Ligue 1 (Valbuena, El-Arabi, M’Vila), Marseille a fait de la Ligue 1. Avec une attaque Payet-Benedetto-Thauvin fantomatique. Un bon point pour Pape Gueye, bizut qui a su pallier l’absence de Kamara, et à Mandanda, gardien du temple Ohème. Un monument sacré que le minot Maxime Lopez défendait, lui, de toute son âme, mais qu’on a laissé partir à Sassuolo. Dans cette grisaille, on distinguera d’abord Rennes, auteur mardi soir d’un nul 1-1 face à Krasnodar. Du football Jeanne Mas, « en Rouge et Noir » pour une « toute première fois » en Ligue des champions. Dépucelage correct pour une équipe qui a mis tout son cœur pour « conclure » , notamment en passant à quatre attaquants sur la fin pour une pluie d’occases. Le but encaissé a bien illustré l’inexpérience de Rennais surpris par le tir meurtrier de Ramirez (59e). C’est la Ligue des champions, bébé ! Pas besoin d’armer, ça part tout seul. Voyez Mo Salah, génie des frappes instantanées ! Enfin Lille, vainqueur 4-1 au Sparta Prague, détenteur comme Rennes d’un fonds de jeu lisible. Christophe Galtier a fait tourner en préservant André et Renato Sanches. Yazici, qui s’est goinfré d’un triplé, et Ikoné offrent une bonne alternative devant à la paire Yılmaz-David. En attendant de se mesurer au Celtic et à Milan, le LOSC semble posséder les atouts qui font les épopées européennes dans une C3 mieux taillée à sa mesure. À suivre…
Par Chérif Ghemmour