- Coupe du monde 2014
- Prospective
Cinq scénarios pour terminer la Coupe du monde
Parce que l'histoire est un éternel recommencement, on a imaginé comment ce Mondial pourrait se terminer avec cinq scénarios et cinq vainqueurs différents. Attention, toute ressemblance avec des événements passés ne serait pas tout à fait une coïncidence.
Lionel, Diego et l’Argentine
Nietzsche avait donc raison, Dieu est bien mort. Du moins, on lui a coupé la main. Malgré les images qui accablent, Lionel Messi nie l’évidence et n’évoque pas le Tout Puissant comme Diego Armando Maradona 28 ans plus tôt. « Je le jure sur ma mère, je dévie le ballon de l’épaule » , assure le fossoyeur des rêves belges. Dans son émission de radio, Diego lui enjoint « d’avoir les couilles d’assumer et d’emmerder ces raclures capitalistes de la FIFA » . Mais Messi préfère opter pour la stratégie du silence. Il n’a pas tort. Soucieuse d’éviter que 200 000 Argentins mettent le Brésil à sac, la FIFA lui inflige un match de suspension avec sursis. Malgré les têtes de cochons et les bouteilles de cachaça lancées dans sa direction par des Brésiliens vindicatifs, Messi traverse la demi-finale contre les Pays-Bas tel un général sur un champ de bataille. Son doublé propulse l’Albiceleste en finale pour la première fois depuis 24 ans. « Lionel doit savoir que la Fifa va nous enculer, c’est sûr, d’ailleurs l’arbitre est anglais » , prévient un Maradona inquiet de la nomination d’Howard Webb. Une crainte confirmée par le pénalty généreux accordé à l’Allemagne à la 85e minute. En souvenir d’Andreas Brehme, Thomas Müller décide de tirer de son mauvais pied (le gauche), mais trouve le poteau de Romero. Sur le contre, Messi envoie d’une touche de balle Ángel Di María vers la postérité, comme Jorge Burruchaga sous le soleil de plomb de Mexico en 86. Torse nu dans les travées du Maracanã, Diego Maradona lâche quelques larmes quand son successeur soulève timidement le trophée remis par Pelé. « On vous a tous niqués » , hurle un Pibe de Oro évacué par la sécurité. Messi, lui, se contente de sourire. Sa façon à lui de dire qu’il est heureux.
France 98, France 2014
Le football est une affaire de signes du destin auxquels on cherche à se raccrocher. Après un premier tour négocié les mains en haut du guidon, les Bleus ont souffert face au Nigeria comme contre le Paraguay 18 ans plus tôt. Comme l’Italie pour France 98, l’Allemagne va dire si cette équipe à un destin ou juste un billet retour pour Paris. Et un destin tient parfois à un effet d’optique qui a fait croire un instant que la reprise de Klose prenait la direction de la lucarne de Lloris. Schweinsteiger, lui, a hérité du rôle de Di Biagio, celui qui frappe trop fort et sur le barre, tandis que Griezmann et Pogba, eux, ne tremblent pas. Elle n’a pas de drapeau à damier, mais cette Colombie a des airs de Croatie, surtout quand Laurent Koscielny offre à James l’ouverture du score. Sur le coup d’envoi, le natif de Tulle remonte le terrain et profite d’un une-deux avec Mathieu Valbuena pour tromper Ospina. Quelques minutes plus tard, le père du petit Noah monte au filet pour envoyer la France en finale d’une reprise de volée du gauche malgré la perte de sa chaussure. Avant la finale, Didier Deschamps a pointé à la vidéo l’absence de marquage des Argentins sur corner. Un message bien reçu par Karim Benzema qui vient couper au premier poteau ce corner de Griezmann. Sans doute diminué par la tourista qui l’a frappé après un assado organisé par Lavezzi la veille, Messi repeint à plusieurs reprises la surface de réparation des Tricolores. Même à dix après l’expulsion d’Évra, la France tient sa seconde étoile. « Je ne sais pas si vous le savez, Arsène Wenger, mais on peut mourir tranquille après avoir vécu ça » , lâche un Christian Jeanpierre qui, frappé par l’émotion, attribue le but du 2-0 de Sissoko à un Pogba sorti dix minutes plus tôt. « Oui » , résume un Wenger plus dans la retenue.
Le Brésil et la baraka de la maison
Le Brésil en est sûr. On ne lui volera pas SA Coupe du monde deux fois. En quart de finale contre la Colombie, le Brésil souffre, poussé vers la prolongation. James Rodríguez, qui s’est laissé pousser une petite queue de rat, manque de peu l’équerre de Júlio César sur une volée léchée en pleine course, comme Baggio contre la France en 1998. Aux tirs au but, Marcelo, deuxième tireur, écrase sa frappe alors que les jeunes pousses Bernard et Oscar assurent comme des chefs et que Júlio César remet les compteurs à zéro, sur un péno mal exécuté par Quintero. Thiago Silva, chaussettes baissées, remet la pression sur la bande colombienne. L’Intériste Fredy Guarín s’avance pour égaliser à 4-4. Sur le banc brésilien, Hernanes, lui-aussi nerrazzuro, conte la suite à ses coéquipiers : « Oh, regarde la mine qu’il va mettre. Il va tirer au-dessus. » Pan, la barre et explosion de joie. Direction la demi-finale, contre la France. Après une première mi-temps crispante, les Bleus ouvrent le score dès le retour des vestiaires. Benzema profite d’un mauvais alignement de Dani Alves pour tromper de près Júlio César. Le Barcelonais, par orgueil, va poser le ballon sur le rond central et devient ailier droit. Deux missiles de 30 mètres plus tard, Dani qualifie le Brésil en finale, contre l’Argentine. Le match rêvé. L’avant-match est perturbé : Leo Messi, pris de convulsions, est annoncé forfait, mais est tout de même aligné. Un fantôme. Comme la qualité de jeu de la rencontre. Garay termine le bras en écharpe, Sabella ayant effectué tous ses remplacements. Puis, dans les derniers instants, à la 92e, le Maracanã s’embrase. Sur un dernier déboulé de Dani Alves, Fred récupère le centre, pivote, élimine ce pauvre Garay et fusille Romero. Le ballon fracasse la barre et rebondit aux alentours de la ligne de but. L’arbitre arrête la partie, demande la Goal Line Technology qui tombe curieusement en panne. Flippé, l’arbitre de champ laisse son assistant décider. Le drapeau tremblant dans la main, il hoche la tête et pointe le rond central. Le Brésil glane sa 6e couronne mondiale, alors que les images du ballon ne franchissant pas cette foutue ligne tournent en boucle. La Goal Line Technology est provisoirement remise au placard. Michel Platini, élu plus tard président de la FIFA, décide de rajouter 3 arbitres près du but, dont un perché sur la barre transversale. L’opération sera un fiasco lors de la Coupe des confédérations organisée en Russie.
Mario, Andres et la Colombie
Un tacle en guise d’hommage. Un tacle pour l’éternité. Lancé, les cheveux au vent, dans une glissade folle dont il a le secret, Mario Yepes détourne une frappe non-cadrée de James Rodriguez et la propulse dans la but d’un Julio Cesar impuissant. Comme pour dire merde au passé tout en le gardant dans un coin de leur tête, mais surtout de leur coeur, les Colombiens s’imposent 2 à 1 face au pays organisateur, 20 ans après l’inoubliable défaite concédée face aux USA au Rose Bowl de Pasadena. Emus par le scénario dingue de la rencontre mais épuisés par leur première rencontre disputée de la compétition, les coéquipiers d’Abel Aguilar, David Ospina et James Rodriguez s’incline face à Mathieu Valbuena, Yohan Cabaye et Blaise Matuidi au cours d’une demi-finale de Coupe du monde qui sent bon la reprise de la Ligue 1. Mais l’important est ailleurs. En Colombie, derrière la déception se cache une immense fierté. Celle d’avoir fait tremblé le monde du foot. Accueilli en héros chez lui, du côté de Cali, Mario Yepes profite de ses quelques jours de repos. Très porté sur la famille, l’ancien nantais s’offre quelques escapades avec ses proches mais ne refuse pas un verre. Avec quelques coéquipiers, il sort dans un bar et s’enfile quelques coups. C’est au moment où il regagne sa voiture sur le parking qu’un groupe de supporters colombiens, plateau de shots de téquila à la main, viennent parler à leur chouchou. Pas du genre à se défiler, Mario s’exécute. A chaque verre vidé par leur capitaine, les supporters crient « gol! » . Ivre mais sans jamais oublier son sens du replacement, Yepes remet les petits verres vides sur le plateau et remonte dans sa caisse. Tant pis pour l’alcotest.
La Flamonie tout feu, tout flamme
Tout de noir, jaune et rouge vêtu, probablement sa tenue la plus sobre, Elio Di Rupo peut se payer Obama sur Twitter. Ses Diables Rouges viennent de renvoyer le Team USA à la baraque et s’offrent un quart de finale au Brésil. Déjà une belle épopée. Pourtant, comme le chantonnait Sinatra, The best is yet to come, pour les joueurs de Wilmots comme pour le premier ministre belge. Trop solides et menaçants offensivement pour une équipe argentine dont les faiblesses n’ont d’égal que le talent de Lionel Messi depuis le début de la compétition, les partenaires de Daniel Van Buyten écartent l’Albiceleste et s’offrent une demi-finale face au Pays-Bas. Le début d’un Interville géant mais sans Nathalie Simon pour les hommes du Plat Pays. Cap sur le Nord pour commencer avec les Pays-Bas comme adversaire en demi-finale et Arjen Robben en guise de vachette. Salauds, les séparatistes flamands accrochent des photos de Ron Vlaar pour faire peur aux enfants qui osent échanger leurs vignettes Panini en français. Pas effrayé pour un sou, Vincent Kompany bouffe les attaquants bataves pendant que Daniel Van Buyten, d’un coup de casque à donner la gerbe aux supporters du Paris Saint-Germain, offre une qualification en finale aux siens. Rendez-vous au Maracanã donc, pour un nouvel épisode de La guerre des voisins aux airs de Fort Boyard avec Valbuena et Mertens en guise de Passetemps et PassePartout. Eden Hazard trouve les sept clés qui ouvrent la défense française et les Belges terrassent l’arrogant voisin français. Conscient qu’il y a de l’argent à faire, Stromae sort un clip qu’il avait préparé dans la minute mais le grand vainqueur à noeud-papillon de cette compétition s’appelle Elio Di Rupo. Avec la victoire de la Flamonie, c’est tout un pays qui se retrouve uni suite aux victoires face aux deux infâmes voisins.
par AP, SB et RB