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Cinq excuses plus ou moins valables pour justifier l’élimination de l’Espagne

Par Éric Maggiori
6 minutes
Cinq excuses plus ou moins valables pour justifier l’élimination de l’Espagne

180 minutes disputées, un but marqué (sur penalty), sept encaissés : hop, l'Espagne, championne du monde en titre, est déjà éliminée du Mondial brésilien. Une élimination qui n'est évidemment pas le fruit du hasard. Voilà cinq raisons pour la justifier. Avec ou sans mauvaise foi, au choix.

L’excuse rationnelle : « Ce n’est plus ce style-là qui gagne en Europe »
C’est indéniable : pendant des années, la domination de l’Espagne a correspondu avec celle du Barça en Europe. Le Barça de Guardiola, le tiki-taka, le jeu rapide à une touche de balle. À tel point qu’à un certain moment, lors du pic de domination du Barça en Europe, on avait presque l’impression que l’Espagne, c’était le Barça sans Messi. C’est l’époque où le style de jeu barcelonais triomphait. Rien ne parvenait à le contrer. Si le Barça voulait gagner 4-0, le Barça gagnait 4-0. Certes, l’Espagne n’a pas toujours été aussi flamboyante. Il faut se souvenir qu’en 2010, la Roja a été le champion du monde avec la plus faible attaque de l’histoire. Mais quand même : il y avait toujours une cohérence, du moins au niveau du style de jeu dominant. Sauf qu’en 2014, le style de jeu dominant n’est plus le tiki-taka. Aujourd’hui, le style qui triomphe, c’est un jeu rapide, physique, à l’image de ceux du Real Madrid et de l’Atlético Madrid, ou du Bayern Munich (même si Guardiola a tenté d’amener un peu de tiki-taka dans ce jeu athlétique). L’Espagne a continué à s’entêter dans son jeu, dans son style. Elle a presque ignoré la réalité. Une réalité qui l’a rattrapée ; les Pays-Bas et le Chili l’ont battue exactement de la même façon que le Bayern a battu le Barça l’an dernier, ou que le Real a triomphé cette saison en Ligue des champions : avec un jeu direct, en quelques passes, et avec beaucoup, beaucoup de physique. Oui, dans l’esprit, ce Chili-là était plus proche de l’Atlético Madrid que l’Espagne elle-même. Un comble. S’adapter à l’air du temps. Voilà ce que l’Espagne 2014 n’a pas réussi à faire.

L’excuse surnaturelle : « Il y a une malédiction au Maracanã »
C’était le 30 juin 2013. Il y a un an. Après avoir arraché aux tirs au but son billet pour la finale de la Coupe des confédérations, l’Espagne affronte le Brésil en finale. Et là, patatras. Les Brésiliens déroulent et humilient les champions du monde en titre. Un succès 3-0 qui ne fait pas un pli, et qui aurait dû servir de sonnette d’alarme pour les Espagnols. Le décor ? Le Maracanã de Rio. Un an plus tard, dans le même stade, la Roja est éliminée de la Coupe du monde, six jours après le début des hostilités. Coïncidence ? Non, évidemment. Il est bien connu qu’une malédiction règne dans ce stade, et ce, malgré sa rénovation. Et ce ne sont pas les Brésiliens, victimes du « Maracanazo » en 1950, qui diront le contraire. Si l’Espagne avait joué à Porto Alegre, elle se serait probablement imposée 3-0 contre le Chili. Comment ça, le match face aux Pays-Bas n’a pas eu lieu au Maracanã ? Bah, disons que la malédiction avait obtenu une dérogation pour suivre les Espagnols jusqu’à Salvador. Pas d’autres explications rationnelles possibles à un tel fiasco.

L’excuse nostalgique : « Depuis qu’il n’y a plus Puyol… »
2010 : deux buts encaissés en sept matchs. 2014 : sept buts encaissés en deux matchs. On inverse juste deux chiffres, et on passe d’une armada invincible à une équipe aux abois. La différence ? La présence, puis l’absence de Carles Puyol. Capitaine de toutes les batailles, le défenseur du Barça était le pilier de cette sélection espagnole, en plus d’en être le fer de lance, comme lors de la demi-finale face à l’Allemagne. Mais en 2012, le défenseur connaît ses dernières sélections avec la Roja, et laisse les clefs de la charnière centrale au duo Piqué-Ramos. Si l’Euro 2012 se passe plutôt bien (un seul but encaissé), la suite est plus compliquée. Au Brésil, sans son défenseur aux 100 sélections, l’équipe de Del Bosque n’a pas trouvé de patron en défense. Car Puyol, c’était aussi une aura, une présence, un type qui vous replace, qui vous donne des consignes et des conseils. Des choses que mêmes les expérimentés Ramos et Piqué n’ont pu remplacer. Un peu perdu après la débâcle face aux Pays-Bas, Del Bosque a même tenté de mettre Javi Martínez en défense centrale pour le second match face au Chili. Pas une grande réussite. Non : personne ne peut remplacer Carles. Et ça, le Barça s’en était déjà rendu compte cette saison. Tata Martino aurait pu faire passer l’info.

L’excuse bouc émissaire : « Tout ça, c’est de la faute de Diego Costa »
Cette saison, Diego Costa a tranché. Appelé deux fois en équipe du Brésil, l’attaquant de l’Atlético Madrid finit par choisir l’Espagne. Un choix vraiment osé, sachant qu’il aurait eu l’occasion de disputer le Mondial au Brésil avec le maillot de la Seleção. Mais non. Du coup, Del Bosque s’est mis dans la merde tout seul, en lâchant des déclarations de séduction envers l’attaquant madrilène. Une fois le choix fait, Diego Costa a débarqué en sélection dans ses pantoufles avec, quasiment, une place de titulaire assurée. Grosse erreur. Impossible d’adapter en l’espace de trois matchs le jeu de l’attaquant à celui d’une sélection qui évolue ensemble les yeux fermés depuis 4-6 ans. On l’a bien vu : il y avait dix joueurs espagnols, et Diego Costa. Complètement déphasé, le joueur brillant admiré pendant toute la saison a été l’ombre de lui-même, et a parfois même fait déjouer son équipe, car son jeu de rôdeur des surfaces n’était pas du tout compatible avec celui de la Roja. De là à dire que cette élimination est due à Costa ? Peut-être pas, même si c’est toujours facile de trouver un bouc émissaire. En revanche, une autre explication est plausible : Diego Costa est en réalité un infiltré brésilien. Il a fait exprès de choisir l’Espagne, pour saborder de l’intérieur la sélection de Del Bosque, principal rival du Brésil. Mission accomplie. Il peut désormais prendre sa retraite internationale. Et peut-être même que la Fédération brésilienne lui accordera le droit exceptionnel de revenir en Seleção, tiens.

L’excuse du complot : « Mourinho avait tout piloté »
Il était devenu le symbole de cette Espagne qui gagne. Celui qui arrête des pénaltys face à l’Italie en 2008. Celui qui gagne deux duels face à Robben en 2010. Celui qui sauve la Roja face à Rakitić en 2012. Celui qui embrasse sa fiancée après le titre mondial. Bref, Casillas est devenu San Iker sous le maillot de la Roja, dont il est le capitaine et le leader. Mais la saison dernière, au Real, José Mourinho a osé faire ce que personne n’avait jamais osé avant lui : mettre Iker sur le banc au profit d’un autre gardien, Diego López. Aujourd’hui, c’est une évidence : le Mou avait tout prévu. Mettre Casillas sur le banc pour lui faire perdre confiance, le faire douter et lui faire perdre le rythme. Déjà, Iker a failli être le héros malheureux de la finale de C1, mais a été sauvé par son pote Ramos. Mais pendant ce Mondial 2014, même Ramos n’a rien pu faire. Le portier a été aux fraises. Mais comme c’est Casillas, par respect, en Espagne, personne ne peut rien lui dire. N’empêche que Mourinho a bien réussi son coup. Filou, va.

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