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« Ce n'est pas une victoire écrasante de la Superligue »

Propos recueillis par Jérémie Baron
5 minutes

Le spectre de la Superligue est réapparu ce jeudi après une décision de la Cour de justice de l'Union européenne, qui estime, selon son communiqué, que « les règles de la FIFA et de l'UEFA sur l'autorisation préalable des compétitions de football interclubs violent le droit de l'Union ». Une victoire de Florentino Pérez et compagnie ? Pas si sûr, nuance Christophe Lepetit, responsable des études économiques du Centre de droit et d'économie du sport, où il est également directeur de l'UEFA Master for International Players.

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Comment doit-on interpréter cette décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ?

Clairement pas comme elle est interprétée depuis ce matin, à savoir une défaite cuisante pour la FIFA et l’UEFA, et une victoire écrasante d’A22 (la société créée pour parrainer et aider à la création de la Superligue en Europe, NDLR). Il y a un net décalage entre l’annonce faite par le juge et le communiqué publié. Ce qui est certain, c’est que la Cour considère qu’au regard des critères et des règles qui étaient en vigueur au moment de l’annonce de la Superligue en 2021, l’UEFA et la FIFA sont des monopoles avec un pouvoir de marché très important, et ont pu abuser d’une forme de position dominante pour menacer d’interdire les clubs de participation et de suspendre les joueurs. Mais la Cour considère également que si elles édictent des critères transparents, objectifs, non discriminatoires et proportionnés, les deux instances peuvent prendre des décisions qui contreviennent aux droits de l’Union. Toute la subtilité est là : à partir du moment où la FIFA et l’UEFA respectent ces quatre conditions pour prendre des décisions et réguler, ces règlements peuvent être considérés, au titre de la spécificité du sport, comme valables. C’est d’ailleurs en ce sens que l’UEFA a communiqué : elle a changé ses règles il y a un an. La CJUE reconnaît une autre chose très importante : quelle que soit la compétition, qu’elle soit organisée par les instances sportives ou par un organisateur privé lucratif, il faut respecter le calendrier international. Ça doit être pris en compte par A22 : ils ne pourront pas aller en confrontation directe avec des compétitions déjà existantes. Il y a une complexité, pour la Superligue, assez éloignée de la façon dont elle communique depuis ce matin.

On doit maintenant attendre la décision du tribunal de commerce de Madrid(1).

Différentes choses vont repasser par le tribunal de Madrid, qui devra bien sûr tenir compte du jugement rendu par la CJUE, et qui va devoir se positionner non pas sur les anciennes règles – celles en vigueur au moment de l’éclatement de la Superligue en avril 2021 –, mais sur la compatibilité des nouvelles. Et l’UEFA est visiblement assez confiante quant au fait que ses nouvelles règles sont compatibles et cochent les critères. Ce qu’il faut analyser maintenant, ce sont les modifications de l’UEFA (modifications de format, de qualifications) et voir en quoi ces règles sont différentes. Mais c’est très loin d’être évident que la décision du jour soit une énorme victoire de la Superligue.

J’en viens presque à me demander si ça n’est pas une victoire – pas écrasante – de l’UEFA et une défaite – pas humiliante – de la Superligue.

La Superligue se relance-t-elle, comme on pourrait le penser de prime abord ?

Le projet de Superligue n’a jamais été à l’arrêt, il a toujours été existant. A22 a rencontré énormément de clubs entre fin 2021 et aujourd’hui, pour essayer de modifier leur format. Ils annoncent directement des choses ce matin : ils ont préparé un projet entre avril 2021 et aujourd’hui. La Superligue et A22 essaient de vendre le fait qu’ils ont totalement été légitimés dans leur droit à organiser une compétition concurrente aux compétitions officielles. Ce qui n’est pas tout à fait faux, mais ça n’est pas aussi simple que ça. Rien n’empêche A22 de lancer une compétition, mais rien n’empêche la FIFA et l’UEFA de réagir à travers leurs règlements pour contrecarrer ces plans, à partir du moment où cela respecte les quatre critères cités précédemment et que cela s’inscrit dans le cadre de la spécificité sportive. J’en viens presque à me demander si ça n’est pas une victoire – pas écrasante – de l’UEFA et une défaite – pas humiliante – de la Superligue.

La Superligue fait la promesse de proposer tous ses matchs gratuitement. C’est faisable, ou est-ce une promesse en l’air ?

C’est faisable, mais je pense qu’il s’agit d’un énorme mensonge. Ils peuvent tout à fait lancer leur compétition et leur plateforme sur laquelle ils proposeront gratuitement toutes les rencontres des compétitions masculines et féminines, ils essayeront de financer cela par la publicité, ce qu’ils n’arriveront pas à faire, très probablement. Pourquoi aujourd’hui la Ligue des champions, la Ligue Europa et la Ligue Europa Conférence sont sur des médias payants ? Parce qu’il y a eu une course en avant permanente, de la part des clubs qui se font concurrence, pour augmenter les revenus. Cela a poussé l’UEFA à une sorte d’essorage du marché, c’est-à-dire à aller chercher tous les budgets de tous les diffuseurs. Les mêmes causes produiront les mêmes effets. C’est une promesse à mon sens intenable, à moyen terme. À court terme oui, puisque ça peut permettre d’amadouer les fans et de lancer la compétition en lui donnant tout de suite une base assez solide de suiveurs, mais assez rapidement derrière ils voudront arriver à une forme de monétisation de cette plateforme, et/ou de partage des droits entre la plateforme et les diffuseurs payants.

Les premières réactions ont montré que les instances, les clubs et les fans se rangent encore du côté de l’UEFA.

Il ne s’agit pas de dire que le système actuel est parfait, loin de là ; mais les premières réactions restent sensiblement équivalentes à ce qu’elles étaient en 2021. Ligues, fédérations, clubs et fans sont toujours résolument opposés au projet porté par A22, projet qui n’a d’autres objectifs que de favoriser les intérêts de quelques clubs.

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Propos recueillis par Jérémie Baron

(1) La CJUE était « interrogée, de manière générale, sur les règles de l'UEFA et de la FIFA ». Elle « ne prend pas position, dans son arrêt, sur ce projet spécifique ».

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