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Chris Mavinga, le talent trop pressé
À 18 ans, Chris Mavinga quittait la réserve du PSG pour Liverpool avec une flatteuse réputation. 6 ans et 5 clubs plus tard, voilà le défenseur à Troyes et de retour au Parc des Princes dans l’anonymat. Itinéraire d’un môme doué mais trop pressé.
Chris Mavinga, pur produit de la formation parisienne, est né un 26 mai. Le jour de la victoire de l’OM en Ligue des champions contre l’AC Milan en 1993. Mavinga fêtait son deuxième anniversaire ce soir-là. À 15 ans, le gamin de Meaux signe au PSG et ne va pas se contenter de vivoter. Très vite surclassé, Chris Mavinga saute les étapes : titulaire chez les U17 puis les U19. En 2008, il s’enfile toute une saison de CFA comme starter (arrière gauche ou central) à seulement 18 ans. Son nom est sur toutes les lèvres. L’histoire raconte que Gilles Grimandi, scout d’Arsenal, se déplace souvent pour voir jouer le garçon. Un jeune homme qui fait ses matchs et qui profite des différents forums parlant des matchs de jeunes du PSG pour demander ce que l’on avait pensé de ses performances… sous un faux pseudo. Oui, Mavinga est un perfectionniste. On lui prédit un brillant avenir. Surtout qu’au sein de la formation parisienne, les jeunes qui ont tenu l’équipe de CFA à bout de bras ne sont pas légion. Loin du trio Sakho-Coman-Charbonnier (oui, celui de Reims), Mavinga est performant et régulier. D’autant qu’il est en avance sur tous ses copains de promotion. Cette avance, il va la payer cash en cédant aux sirènes de Liverpool. À 18 ans, alors que son contrat d’aspirant arrive à son terme au PSG, il préfère se lier à Liverpool et un salaire XXL (on parlait de plus de 55K mensuels), plutôt qu’à son club formateur qui lui proposait un contrat professionnel standard. Liverpool, Anfield, Steven Gerrard. Mavinga rêve… mais va déchanter.
Il ne jouera jamais pour les Reds qui le prête au Racing Genk, en Belgique. En Jupiler League en cours de saison, le Français joue ses premiers matchs professionnels, mais le pays de Jean-Claude Van Damme ne gardera de son passage chez lui qu’un seul geste. Et pas le meilleur. Lors d’un match contre le Standard de Liège, Mavinga confond la tête de son adversaire Mehdi Carcela avec le ballon. Bilan : multiples fractures au visage, mâchoire et nez cassés pour Carcela. En bonus, un carton jaune seulement. Le jeune défenseur est choqué et ne savoure pas le titre de champion de Belgique comme il se doit. « Je suis content que nous soyons champions, mais j’ai mal pour lui. Je suis vraiment désolé que ça se soit passé. Je comte bien faire quelque chose pour lui dans les prochains jours. C’était compliqué de jouer après ça, l’image de son visage m’a hanté durant tout le reste de la partie » , déclare-t-il dans la presse belge à la fin du match. Sans cet incident, Mavinga serait-il resté en Belgique ? Peut-être. Il y avait trouvé une certaine stabilité en tout cas.
L’histoire du taxi et l’exil au Rubin Kazan
Pour fuir cette histoire, le gaucher signe à Rennes durant l’été 2011 et va enfin découvrir la Ligue 1. Son rêve de gosse ? Jouer un match professionnel en France. Il débute tranquillement sa carrière dans l’ombre de la poitrine de Salma Hayek. Mais comme le garçon se laisse parfois influencer, son destin va une nouvelle fois basculer en octobre 2012. Alors qu’il est de toutes les sélections de jeunes depuis 2009, il se laisse embarquer dans une folie dans la nuit du 13 octobre 2012, trois jours avant un match décisif pour une qualification de l’équipe de France espoirs pour l’Euro 2013, ce match est perdu contre la Norvège (3-5) et entraîne la non-qualification des Bleuets. La défaite passe au second plan quand l’opinion publique apprend que Yann M’Vila, Antoine Griezmann, Wissam Ben Yedder, M’Baye Niang et Chris Mavinga se sont payé une virée nocturne (boîte de nuit parisienne) trois jours avant le match décisif, alors que l’équipe séjournait au Havre. Les garçons se sont fait griller par des photos Facebook et ont quand même joué le match contre la Norvège. La commission de discipline de la FFF ne sera pas aussi clémente. Mavinga prendra un an de suspension de toutes sélections en équipes nationales. Il ne reverra plus jamais le maillot bleu…
Pis, il doit partir loin de l’Hexagone pour oublier. Encore une fois, le choix de carrière interpelle : Rubin Kazan. En Russie, le garçon joue très peu (15 matchs) et trouve le temps long. « Parfois, c’est difficile de se motiver quand on va jouer en Sibérie, avec plusieurs heures de décalage horaire en plus… » lâche-t-il en août dernier dans les colonnes de Ouest-France. Surtout, le défenseur confirme qu’il ne voulait surtout pas quitter Rennes. Une fuite en avant. Son départ en Russie ? « Pas enthousiaste du tout. C’est vrai que malgré les circonstances, je n’avais pas du tout envie de partir. » C’est pourquoi l’an dernier, Mavinga est prêté à Reims. Sans succès. Cet été, c’est à Troyes qu’il a atterri, toujours en prêt. À 24 ans, Chris Mavinga doit apprendre à se poser et à faire les bons choix. Récemment, il en a fait un. Et pas des moindres, puisqu’il est devenu international congolais. Idéal pour franchir un palier et s’affirmer. Le garçon est encore jeune, mais a déjà traversé des histoires incroyables. Actuellement, il a besoin de se poser. De respirer. De jouer. De montrer un autre visage, car c’est un bon gamin, comme on dit. Pas méchant. Juste trop pressé. Cette semaine, il a reçu Hervé Mathoux sur son canapé pour lui filer une correction à FIFA 16 devant les caméras de télévision. Avec le sourire. À 18 ans, Chris Mavinga était en avance sur son temps. À 24 ans, il retrouve son club formateur du PSG tout en évoluant dans une équipe qui pointe à la dernière place de Ligue 1. Oui, le talentueux défenseur de la CFA a raté certains virages, mais la route est encore longue.
Par Mathieu Faure