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Choupo-Moting, blague à part
À peine le pied posé à Paris, Eric Maxim Choupo-Moting était considéré comme une erreur de casting. Sauf que le garçon n’a jamais prétendu être autre chose qu’une bonne solution de rechange à la MCN, comme il l’a montré à Rennes. Et si c'était le moment de se remettre de ce transfert surprenant pour laisser au Camerounais une petite chance de montrer ce qu’il vaut ?
Être bardé d’étiquettes avant d’avoir été utilisé : le lot de beaucoup de jouets pas encore sortis de leur emballage. Soit la situation connue par Eric Maxim Choupo-Moting en débarquant au PSG. Car l’attaquant, arrivé libre en fin de mercato, était estampillé de diverses expressions toutes faites et attribuées à la hâte. Celui-ci serait au mieux un « panic buy » venant ponctuer le « pire mercato parisien depuis l’arrivée des Qataris » , ou encore une simple « faveur faite à un agent » (Roger Wittman en l’occurrence) qui avait pu orienter plus tôt vers la capitale Julian Draxler et Thilo Kehrer.
Un bonhomme de 29 ans qui n’a planté que huit buts en deux saisons et qui a accompagné l’an dernier Stoke City vers la relégation en Championship, avant de résilier son contrat. Bref, pour certains, voir Choupo-Moting dans l’effectif parisien ne serait rien d’autre qu’une vaste blague. « Le PSG est une très grande équipe et c’est normal que les gens en dehors du club attendent de très grands noms, confiait-il, lucide. Mais je connais mes qualités, je sais que je peux aider l’équipe. Il y a toujours des sceptiques, il faut l’accepter. »
Le caramel derrière la blague
Justement, la semaine dernière, l’international camerounais (46 sélections, 13 buts) est sorti pour la première fois de sa boîte pour répondre à ces sceptiques. Après une première apparition à Liverpool, c’est à Rennes cinq jours plus tard qu’il a réellement signé son acte de naissance sous le maillot parisien. En Bretagne, « Choupo » n’a eu besoin que de cinq petites minutes après son entrée en jeu pour sceller le succès parisien (3-1), convertissant à bout portant un service de Thomas Meunier. « Tout le monde était très content pour moi. C’est une très bonne chose, mais le but est de continuer comme ça avec l’équipe, réagissait-il dimanche dans les couloirs du Roazhon Park. Personnellement, je me sens très bien. Tous les joueurs et le staff m’ont très bien accueilli dès le premier jour. Dès que j’ai ma chance sur le terrain, je me donne à 100%. »
Un but comme un gage de son implication complète. À peine arrivé, un chiffre parle déjà pour lui, Eric Maxim Choupo-Moting est le joueur ayant ouvert le plus rapidement son compteur après ses débuts en première division avec le PSG, derrière Christophe Landrin (3 minutes en 2005) et surtout Jay-Jay Okocha (1 minute et 7 secondes en 1998). C’est ainsi que « EMCM » a posé les bases d’une relation dont il connaissait les termes avant de signer, à défaut que le public, lui, les ait bien cernés. Il est venu à Paris pour être un joueur de complément, derrière la triplette Mbappé-Cavani-Neymar, et assumer ce rôle le plus efficacement possible. Un profil dont Thomas Tuchel avait besoin, d’autant plus qu’il ne coûtait pas un rond. « Être doublure au PSG, je suis sûr qu’il le prend de manière positive, assure Denis Lavagne, sélectionneur du Cameroun entre 2011 et 2012. C’est important pour un entraîneur d’avoir des garçons qui acceptent ce rôle-là : ils ne feront pas la gueule quand ils ne joueront pas et donneront le maximum pour apporter un plus à l’équipe quand ils entreront. »
Choupo fort ?
D’autant que le technicien allemand savait à qui il allait avoir affaire, puisqu’il avait déjà dirigé le natif de Hambourg pendant trois saisons du côté de Mayence entre 2011 et 2014. Le coach parisien justifie d’ailleurs ce transfert de manière très pragmatique : « Nous avons cherché un joueur pour suppléer Cavani durant plusieurs semaines. Nous avons eu l’occasion de signer Maxim. Parce que nous cherchions un joueur fort dans les airs, capable de contrôler des ballons hauts. » Et encore, le coach parisien ne fait que schématiser.
Loin du stéréotype du grand échalas d’1,91m maladroit, Choupo-Moting est aussi loué pour sa polyvalence. En effet, il a souvent évolué dans ses anciens clubs sur le côté gauche ou en soutien d’un autre attaquant (comme Huntelaar à Schalke, par exemple). « Il a une bonne technique, une bonne compréhension du jeu. Il manque peut-être un peu d’explosivité, mais il sait être adroit devant le but, dépeint Denis Lavagne. Alors, c’est sûr qu’il n’a pas fait la carrière qu’il aurait dû faire à cause de sa nonchalance et d’un certain manque de détermination. Mais globalement, il a le niveau pour le Paris Saint-Germain. Et finalement, connaître la concurrence avec les trois phénomènes qu’il a devant, ça l’obligera à se bouger s’il veut gratter du temps de jeu. »
Banc public
Autre argument avancé par Tuchel : le caractère avenant et agréable du garçon. « C’est un mec bien. Je pourrais même l’inviter à mes réunions de famille » , avait-il lancé. Une vraie garantie à ce niveau, où il ne peut pas y avoir que des numéros 1 dans une team. Question d’ego et de vie de vestiaire. Ouvert, intéressé, fan de street-art, notamment de Banksy, Eric Maxim Choupo-Moting serait la définition même du bon coéquipier, envoyant là valser l’image de tête brûlée refusant d’honorer sa sélection pour la CAN 2017. Son passif quelque peu houleux avec le Cameroun, pays de son père, serait dû à sa condition de binational amené à découvrir un univers différent de celui qu’il a connu en Europe, cumulée à la difficulté de s’y faire accepter. Mais Paris est loin de présenter cet exotisme et le garçon semble déjà s’y plaire, quitte à partager son temps entre la ville, le terrain et le banc. Il ne reste plus qu’à provoquer une réciprocité avec le public en profitant de ses prochaines entrées. Avec un message à adresser à tous : les blagues les plus courtes sont les meilleures.
Par Mathieu Rollinger
Propos de Denis Lavagne recueillis par MR.