- Community Shield
- Arsenal-Chelsea (1-1, 4-1 TAB)
Chelsea, l’ABBA dans le baba
Le Community Shield remporté par Arsenal a vu se dérouler la première séance de tirs au but dans sa nouvelle formule. Si elle déplaît déjà à certains, c’est surtout Chelsea qui s’est rendu ridicule lors de cette épreuve.
Jusque-là, tout allait relativement bien. Theo Walcott, Gary Cahill et Nacho Monreal n’avaient absolument pas tremblé et leurs tentatives totalement maîtrisées avaient fait mouche. Et puis, Wembley a halluciné. Déjà pas forcément au courant de la nouvelle organisation des séances de tirs au but – en témoignent les « Why ? Why ? » lâchés dans le stade après avoir vu Monreal frapper juste après Walcott -, le public a observé, aussi incrédule que les téléspectateurs, Thibaut Courtois s’emparer du ballon pour aller tenter sa chance. Le gardien était donc désigné comme le deuxième des cinq tireurs de sa bande.
Forcément, ce qui devait arriver arriva : le portier confondait penalty avec six mètres et le ballon était catapulté dans l’espace. Après ce une-deux avec les potes de Thomas Pesquet presque réussi, c’est un autre Bluesqui succéda au dernier rempart belge, système ABBA oblige. Son nom ? Álvaro Morata. Gentil cadeau de bienvenue pour celui qui venait déjà de fauter sur l’égalisation adverse – l’attaquant couvre plusieurs joueurs sur le coup-franc amenant au but de Sead Kolašinac – lors de ses premières minutes avec le maillot bleu sur le dos. Qu’il ait coûté 80 millions d’euros n’a rien changé à la sentence : franchement pas rassuré par l’homme qui devait arrêter les penalty (et non les frapper), l’Espagnol n’a même pas trouvé le cadre façon Graziano Pellè face à l’Allemagne. La suite ? Un succès facile des Gunners, qui n’avaient plus qu’à terminer le taf.
Faire tirer le gardien, une faute professionnelle ?
Alors, que reprocher à Chelsea, qui n’a perdu que sur la loterie des tirs au but ? Tout simplement qu’il ait justement réussi à transformer cette loterie en combat perdu d’avance. Sérieusement, depuis quand fait-on frapper un gardien absolument pas habitué à ce genre d’exercice ? Dès la deuxième tentative, qui plus est ? Le premier boulot du bonhomme étant de se concentrer sur les tirs adverses, la mission devient tout de suite moins facile à remplir quand il sait qu’il va devoir lui-même endosser le rôle du buteur quelques minutes plus tard. Surtout, dans le cas où il rate – comme lors de ce Community Shield, où le loupé est quand même énorme et prévisible -, il faut un mental gros comme ça pour se remettre directement dans le bain et réparer sa faute. Coïncidence ou pas, Courtois n’a touché aucune balle après son foirage. Ce qui est certain en tout cas, c’est qu’il n’a pas eu les épaules pour digérer. Les images le prouvent : l’ancien de l’Atlético de Madrid paraissait au bord des larmes après la rencontre.
À bas l’ABBA
Cela n’a rien à voir avec l’essai de Courtois, mais il convient également de parler de la nouvelle formule, appelée ABBA – le joueur d’une équipe A tire en premier, suivi de deux tentatives de l’équipe B, puis de deux tentatives de l’équipe A, et ainsi de suite -, d’une séance de tirs au but. Testée pour la première fois à ce niveau à Wembley, et mise en place pour apporter davantage d’équité, cette mesure peut aisément être débattue. Les partisans de cette nouvelle règle estiment qu’il n’est pas juste que l’équipe qui frappe en premier garde l’avantage psychologique de la formule classique (qui, selon plusieurs études, permet de gagner 60% du temps). Arsenal, qui a tiré en second lors de sa confrontation avec Chelsea, a par exemple gagné largement l’épreuve. OK.
Mais les détracteurs avancent qu’ABBA ne fait que renverser le problème. En effet, l’équipe qui a le malheur de rater le premier penalty de sa série de deux subit un « choc psychologique » dont il n’a pas le temps de se remettre. Et la probabilité de voir le deuxième tireur de cette série échouer augmente drastiquement. C’est ce qui s’est passé avec Courtois et Morata. Un scénario reproduit à l’identique en finale de l’Euro U17 (l’Espagne avait gagné 4-1 aux TAB contre l’Angleterre, comme Arsenal contre Chelsea). En réalité, la seule vraie interrogation qui vaille est la suivante : faut-il essayer de rendre plus juste quelque chose qui, pour beaucoup, est par définition fondamentalement injuste ? Pour obtenir une réponse, encore faut-il que les gardiens aux pieds carrés ne frappent pas…
Par Florian Cadu