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Chelsea, et si…
En Ligue des champions, seule compétition pouvant sauver sa saison, Chelsea peut tirer du passé quelques motifs d'espoir pour croire en l'exploit : comme en 2022-2023, les résultats sportifs des Blues n'étaient pas bons sur la scène nationale et la stabilité sur le banc n'était pas non plus de mise lors de leurs dernières épopées en C1.
Nationalité, parcours, style de jeu, réputation, caractère… En apparence, tout oppose ces deux entraîneurs. Pourtant, le discret Roberto Di Matteo et l’expansif Thomas Tuchel ont un point commun précis dont personne d’autre ne dispose : ils ont remporté la Ligue des champions en dirigeant les Blues, mais aussi en étant catapultés sur le banc en cours de saison. C’était en 2012 pour l’Italien, qui avait alors remplacé André Villas-Boas après en avoir été l’adjoint, et en 2021 pour l’Allemand suppléant un Franck Lampard aujourd’hui de retour. Gagner la coupe aux grandes oreilles durant une année où un coach est éjecté, ce qui est souvent indicateur de mauvais résultats, voilà qui est pour le moins étonnant et surtout peu fréquent. Le Bayern Munich, qui a subi une fessée ce mardi à Manchester City et qui devrait donc sortir de l’épreuve alors qu’il vient juste de nommer Tuchel à la place de Julian Nagelsmann, peut en témoigner.
Pas à un paradoxe près, Chelsea fait donc figure d’ovni, puisque ses deux triomphes dans la compétition l’ont été dans ces conditions. Même schéma en 2008, avec sa seule finale connue et perdue contre Manchester United sous les ordres d’Avram Grant (en successeur de José Mourinho). Bonne nouvelle pour les supporters londoniens, qui peuvent légitimement s’inquiéter à l’heure du déplacement de leur équipe chez le Real Madrid en quarts de finale : leur club a déjà consommé deux coachs (Tuchel et Graham Potter) depuis cet été. Aurait-il donc doublé ses chances de remporter le seul titre qui reste accessible, et sauver un exercice pour le moment calamiteux ?
Havertz, pas encore l’égal de Drogba
La Ligue des champions constitue en effet le dernier objectif des Blues, actuellement largués en championnat (onzièmes, à quatorze points du cinquième et presque plus proches de la zone rouge que d’une place les qualifiant pour une coupe européenne) et qui l’étaient déjà en 2012 (sixièmes), voire en 2021 (quatrièmes, mais avec 19 unités de retard sur le champion et une seule d’avance sur Leicester). Avec Di Matteo, le succès final à Munich avait ainsi permis à Chelsea de se qualifier in extremis en C1. But recherché en 2023, année présentant donc quelques similitudes avec ses petites sœurs. « Il y a des points communs évidents, c’est vrai, accorde Christophe Lollichon, en charge des gardiens à Londres de 2007 à 2022 et donc au cœur des épopées évoquées. Les changements d’entraîneurs en cours de saison, déjà, et à des périodes plus ou moins parallèles. Puis, le fait qu’on ne soit pas très bien en Premier League. Sinon, nous n’aurions pas changé de coach ! » En revanche, beaucoup de choses ont récemment changé au sein de l’entité.
Notamment en ce qui concerne la gestion de l’effectif, la quantité de transferts étant démesurée depuis moins d’un an (une grosse quinzaine d’arrivées et une vingtaine de départs, sans prendre en compte les prêts), alors que les anciens vainqueurs pouvaient compter sur de vrais patrons et cadres lors de leurs heures de gloire (Drogba, Lampard et Terry ou encore Ivanović en 2012 ou même en 2008 avec une team quasiment en autogestion ; Rüdiger ou Kanté en 2021…). La comparaison s’arrête donc là, aux yeux du Français : « Notre effectif n’avait pas été aussi chamboulé qu’aujourd’hui, que ce soit lors du mercato d’été ou d’hiver. Il y avait certes une instabilité sur le banc, mais pas dans l’effectif où les tauliers faisaient la différence. Cela permettait de se parler, avec notamment la présence de leaders quasiment partout. Tu ressentais un truc, quoi… Quand bien même ça n’allait pas avec le coach et quand bien même les résultats étaient décevants par rapport aux attentes en championnat, il y avait quelque chose qui se passait en Ligue des champions. Avec les mecs présents sur le terrain, il était inconcevable de laisser passer la moindre opportunité. Aujourd’hui, je ne vois pas ça. Il n’y a quasiment pas de leaders, et sur les anciens, il reste qui ? Thiago Silva est blessé, Jorginho est parti, N’Golo revient tout juste et n’est pas vraiment un capitaine à part entière… Peut-être César Azpilicueta, qui n’est plus un titulaire. Les principaux problèmes de Chelsea aujourd’hui sont liés à ce renouvellement très important de l’effectif, il est impossible de compter sur un quelconque équilibre. »
C’était mieux avant ?
L’optimisme peut donc difficilement être de mise, malgré la réaction bleue au tour précèdent permettant l’élimination du Borussia Dortmund en huitièmes. Surtout que l’effectif n’est pas la seule chose qui a été transformée à Chelsea, où Roman Abramovitch a fait ses cartons pendant que l’homme d’affaires américain Todd Boehly prenait la suite tout en haut de la hiérarchie. « En réalité, le Chelsea d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le Chelsea d’auparavant. Le changement de propriétaires a induit des modifications très importantes, que ce soit dans les objectifs et les projections du club, dans la politique de recrutement ou dans les décisions. Ces chamboulements sont observables tant au niveau sportif qu’organisationnel ou médical, et j’ai du mal à voir comment la situation peut s’arranger. La saison est pourrie, et risque de le rester jusqu’au bout », reprend Lollichon.
Et de conclure : « Avant, il y avait Petr Čech qui était revenu au club en tant que dirigeant avec toute son intelligence et sa capacité à prendre de bonnes décisions aux côtés de Marina Granovskaia. Mais aujourd’hui, il n’y a plus Petr, plus Marina, plus de propriétaire emblématique du club… Il n’y a plus personne ! Tout a tourné, même au niveau médical avec notamment les départs du masseur-kinésithérapeute Thierry Laurent ou du médecin responsable Paco Biosca. Ce qui est étonnant, car le staff était considéré comme l’un des plus performants, compétents et efficaces d’Europe. Outre le manque de performances sur le terrain, il y a donc des choses étranges au niveau structurel. » Certaines sources pointent d’ailleurs la présence de trois directeurs sportifs différents, des gens intrusifs dans les compositions d’équipe… Le cas Pierre-Emerick Aubameyang, qui passe davantage de temps en tribunes que parmi les remplaçants, alors que l’absence d’un véritable avant-centre se fait sentir, constitue par exemple un vrai point d’interrogation, et quelques questions restent en suspens… En tout cas, celles sur la logique du sport et les bizarreries du football existent toujours et les Blues s’y accrocheront encore.
Par Florian Cadu
Propos de CL recueillis par FC.