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Chapecoense, le tir au but de la discorde
Battu ce dimanche par Avaí en finale du Championnat de Santa Catarina (1-1, 4-2 TAB), Chapecoense est un club en colère. La raison ? Un tir au but refusé par la VAR, car le ballon ne serait pas totalement entré. Sauf que les images prouvent le contraire.
Les supporters de football connaissaient la VAR qui accorde un penalty pour une faute de main dans les dernières secondes d’un huitième de finale de C1. Ou encore la VAR qui vient annuler le but de la qualification pour le dernier carré de Ligue des champions en raison d’un hors-jeu. Ils viennent à présent de découvrir la VAR qui invalide un tir au but sous prétexte que le cuir n’a pas franchi la ligne. La scène s’est déroulée au Brésil en finale du Championnat de Santa Catarina. Le championnat d’État qui se joue comme chaque année avant le championnat national.
Alors que Avaí et Chapecoense se quittent sur le score de 1-1, la séance de tirs au but débute. Et si les quatre premiers tireurs des locaux ne tremblent pas, ce n’est pas le cas de ceux de Chapecoense. À la suite du raté d’Aylon, Bruno Pacheco n’a pas le droit à l’erreur. Pas un problème pour le latéral de 27 ans qui envoie une chiche sur la barre transversale qui rebondit juste derrière la ligne. Du moins, c’est ce que lui et ses coéquipiers croient. Le juge de touche, lui, en est certain : le ballon n’est pas entré entièrement. Ne voulant pas prendre le moindre risque, l’arbitre de la rencontre fait appel à la VAR. Arrive alors un long moment de flottement et de stress qui s’ajoute à la tension logique d’une séance de tirs au but en finale de Championnat d’État. Et si les images semblent prouver la validité du tir au but, les arbitres présents à la VAR vont dans le sens du juge de ligne et invalident la transformation. Fin du match. Avaí est sacré champion.
Em SC, Avaí venceu o campeonato pelo VAR. À bola entrou. VAR disse que não. pic.twitter.com/4cOr2oyeeS
— DiogoGustavo ™ (@aziadaChape) 21 avril 2019
Scandale d’État
Assez logiquement, Plinio David de Nes Filho, le président de Chapecoense, n’est pas très content. Mais vraiment pas très content. « Nous tenons à préciser que nous ne reconnaissons pas ce résultat en raison de l’erreur commise par l’arbitre. Il doit d’ailleurs être puni et exclu du football brésilien pendant six mois ou un an. Il ne mérite pas le respect de notre communauté de Chapecó et des fans de Chapecoense. Son attitude et sa décision dénigrent l’image du football Catarinense » , enrage Plinio David de Nes Filho au micro de la radio Super Condá. Si la colère du président de Chapecoense semble légitime, l’arbitre de la rencontre, lui, continue de croire que sa décision est juste. C’est en tout ça ce qu’il aurait affirmé au journaliste brésilien Rodrigo Polidoro : « Le dernier tir était très limite, mais l’assistant m’a dit que le ballon n’était pas entré. Par prudence, nous avons décidé d’utiliser la VAR pour confirmer ce que l’assistant a vu. Et la décision a été confirmée : le ballon n’est pas entré totalement. »
De son côté, le président de la Fédération catarinense, Rubens Angelotti, préfère ne pas prendre de risque et botte en touche : « Le tribunal jugera si Chapecoense fait appel à lui. Certains croient que le ballon est entré et d’autres qu’il n’est pas entré. » Une action en justice. C’est bien ce que compte faire Chapecoense. Le club brésilien compte s’appuyer sur deux choses pour s’imposer au Tribunal : l’erreur d’arbitrage manifeste et l’invasion de terrain des supporters d’Avaí, dès le coup de sifflet final : « La sécurité a ouvert les portes et permis cette invasion. L’arbitre n’avait même pas encore terminé le match. Nous étions à la merci d’une probabilité énorme d’agression et personne n’a protégé nos joueurs pour qu’ils sortent du terrain. Nous sommes revenus aux années 1970 » , ne décolère toujours pas le président de Chapecoense.
La prochaine fois, pensez-y : ouvrez les yeux
Alors oui, même si ce tir au but avait été validé, Chapecoense aurait peut-être perdu cette finale. D’autant plus que si le cinquième tireur d’Avaí avait transformé son tir dans la foulée, le résultat de celui de Bruno Pacheco importe peu. Oui, le président de Chapecoense s’emballe un peu lorsqu’il veut annuler le match en raison de l’invasion de terrain des supporters adverses. D’autant plus qu’il n’y a pas le moindre blessé ou la moindre agression à déplorer, les supporters célébrant juste avec leurs joueurs le 17e titre du championnat catarinense du club. Il faut dire que la colère de Chapecoense est à la hauteur de leur déception, tant le trophée était important pour les hommes de Ney Franco. Que ce soit pour faire oublier un championnat national 2018 totalement raté avec un maintien acquis lors de la dernière journée. Ou encore pour rendre hommage au journaliste Rafael Henzel, rescapé du crash d’avion de 2016, et décédé d’une crise cardiaque il y a un mois.
Mais c’est bien connu, le football est parfois cruel. Et pas tout le temps juste. Cette finale entre Avaí et Chapecoense va forcément être reprise comme exemple par les Anti-VAR. Sauf qu’une fois encore le problème n’est pas tant la VAR, mais les arbitres qui l’utilisent. Ce n’est pas la faute de la VAR si l’arbitre assistant, posté à un mètre du ballon, a cligné des yeux au moment où il frappe le sol. Ce n’est pas non plus la faute de la VAR si les arbitres dans le car-régie regardaient le nouvel épisode de Game Of Thrones au lieu des images de l’action. Et finalement ce n’est pas non plus la faute de l’arbitre principal, Bráulio da Silva Machado, qui n’a fait que suivre l’avis de ses assistants. De loin, Frank Lampard esquisse un sourire devant ces images et se dit que même si la VAR avait existé en 2010, elle ne l’aurait donc pas forcément aidé à faire valider son but en huitième de finale de Coupe du monde face à l’Allemagne. Surtout si ce sont des arbitres brésiliens à la VAR.
par Steven Oliveira