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Champion’s Leon, la C1 de l’Ouest
Pendant que l'UEFA se remue les méninges pour réformer ses compétitions, le Pays de Léon, dans le nord-ouest du Finistère, a déjà fait mieux au cours de l'année 2021, en créant la Champion's Leon, une Ligue des Champions à la sauce breizh réservée aux amateurs. Au cœur de l'aventure, une envie, celle de redynamiser le foot amateur à l'ère COVID. Et pour l'instant, c'est réussi.
Un tirage au sort diffusé en direct sur les réseaux sociaux, des chapeaux composés en fonction du niveau de chaque équipe, une phase de groupe en première moitié de saison et une phase finale au cours de la seconde : en apparence, la Champion’s Leon a tout d’une vraie Ligue des Champions. En apparence seulement, car la C1 du Pays de Léon, soit la pointe nord-ouest du Finistère, ne réunit pas les plus grands clubs d’Europe, mais plutôt seize écuries amateurs d’Armorique. A l’origine de l’aventure, Benoît Milin, une sorte de Gabriel Hanot des temps modernes, dont l’ambition est de redynaiser le foot amateur, grandement fragilisé par la crise COVID. Et pour l’instant, le projet, qui a débuté le 4 août, semble atteindre ses objectifs. De là à concurrencer un jour la Ligue des Champions ?
« On fait notre popote dans notre coin »
L’histoire commence fin octobre ou début novembre 2021, lorsque le voile du confinement recouvre pour la deuxième fois la France. Comme six mois auparavant, une chape de plomb s’abat sur le foot amateur. Pas sur ses acteurs, et leur esprit toujours en ébullition. « On ne savait pas trop où on allait, mais on se doutait du fait qu’on n’allait sans doute pas reprendre la saison, se souvient Benoît Milin. Du coup, je me suis demandé pourquoi les petits clubs n’organiseraient pas un truc sectoriel, en format Ligue des champions, pour pouvoir jouer à nouveau. » Au départ, l’idée est de compter uniquement sur les clubs de R3 du coin : huit équipes, deux poules de quatre et des phases éliminatoires. L’entraîneur du FC Guiclan en parle à ses homologues, notamment à Vincent Riou, coach de Bodilis-Plougar (R3). « Pendant le confinement, j’ai souvent été en contact avec Benoît, qui avait été mon entraîneur plus tôt, rejoue-t-il. On a parlé de son idée, et finalement, au mois de janvier, il a fini par concevoir le projet. »
Au programme, donc ? Des chapeaux composés de clubs de R3, R2 et D1 et une phase de groupes estivale, avant le début de saison, pendant laquelle chaque équipe jouera trois matchs. Les deux premiers de chaque groupe accèdent à la Ligue des champions, les deux derniers à l’Europa Ligue. En deuxième partie de saison, lorsque le calendrier réservera quelques trous, les écuries bretonnes se départageront au terme d’une phase éliminatoire. Une nouvelle fois, le format de la compétition est un plébiscite : sitôt l’annonce postée sur ses réseaux sociaux, Benoît Milin reçoit des dizaines de messages et la presse s’empare même de l’affaire. A tel point que son créateur s’en va même prévenir le président du district pour lui expliquer le projet. « Je lui ai précisé que la compétition ne jouerait pas sur le calendrier fédéral, se souvient-il. Moi, je n’empiète pas sur la fédé : on fait notre popote dans notre coin, on ne gêne personne. » La Champion’s Leon est née.
Kings of Leon, Superligue et étoile sur le maillot
Que les fans de rock américain se rassurent, le nom de la compétition n’a rien à voir avec le fameux groupe Kings of Leon. « Je ne connaissais pas du tout Kings of Leon, avoue Benoît Milin. Je me suis juste dit que Champion’s League du Leon, ça faisait con, donc je suis parti sur Champion’s Leon. » Bref, un nom simple, qui ne veut pas forcément attirer les feux de la rampe ou le succès commercial. « Nous le faisons bénévolement, simplement parce qu’on adore le foot, continue-t-il. Et les gains des matchs iront à des associations caritatives. » Au rang des objectifs, « redynamiser le club et le football dans le Pays Léon » et « apporter plus de challenge dans les matchs amicaux » pour Vincent Riou, « populariser le secteur » et « faire revenir les bénévoles » pour Benoît Milin. Le tout avec en tête une idée assez simple, réunir la région. « Il y a plein de matchs qui sont à huit ou dix kilomètres de distance : ça peut ramener du monde, les gosses ne rentrent pas tard, bref, ça permet de fédérer les gens. »
Et de montrer, bien sûr, que le foot amateur vit toujours. « Ça montre que le foot amateur tient à sa Ligue des champions plutôt qu’à la Super Ligue » , lance Benoît Milin. Et s’il en fallait une preuve supplémentaire, la Champion’s Leon a déjà fait des émules aux alentours : « Ça a été repris par le 22 [Côtes d’Armor, NDLR], sur un autre format, et par le 35 [Ille-et-Vilaine, NDLR], poursuit-il. A chaque fois, on me demande s’ils ont le droit. Je leur réponds toujours : » bah oui, on est un pays libre ». Chacun fait ce qu’il veut. » Ce que veut Benoît Milin, en tout cas, c’est éventuellement reproduire l’expérience l’année prochaine, du moins si l’édition 2021/2022 est réussie et plaît à son public. Quant aux clubs engagés, la tête n’est pas forcément à la victoire finale, ni même à quelques signes honorifiques. « L’objectif, c’est de prendre du plaisir, affirme Vincent Riou. Et je ne pense pas qu’on arborera une étoile sur le maillot en cas de victoire : l’étoile, on la laisse à la télévision et aux joueurs professionnels. » Et si les pros n’auront finalement pas eu de Super Ligue, le pays léonard, lui, aura bien sa Champion’s League.
Par Valentin Lutz
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