- Foot & Justice
- Procès Yann Lorence
C’était le drame de trop
Le procès Yann Lorence, le supporter du PSG tombé dans le coma et décédé après s'être fait tabasser devant le Parc des Princes début 2010, s'ouvre aujourd'hui. Retour sur le drame qui a cristallisé le conflit Auteuil/Boulogne et engendré la mise en sommeil du mouvement ultra à Paris.
Il y a dix ans, jour pour jour, la famille du PSG se réveillait en apprenant la mort de Julien Quemener. Ce jeudi 24 novembre 2016 s’ouvre le procès Yann Lorence. Comme Julien Quemener, Yann Lorence était supporter du PSG. Comme lui, il est mort aux abords du Parc des Princes un soir de match. La comparaison s’arrête là. Les circonstances, le contexte sont radicalement différents. Les conséquences, aussi. C’est la mort de Yann Lorence qui a poussé le président du club de l’époque, Robin Leproux, à mettre en place son fameux « plan Leproux » pour pacifier les tribunes – avec les conséquences que l’on connaît sur les ultras de la capitale et l’ambiance au Parc des Princes.
PSG-OM sans les supporters marseillais
Le 28 février 2010, le Paris Saint-Germain reçoit l’Olympique de Marseille en championnat. Les Marseillais ont boycotté le déplacement à Paris à cause de mesures de sécurité prises par les autorités qu’ils jugent répressives. Pourquoi ? Parce qu’il faut rappeler le climat ultra-tendu du match aller : le 25 octobre 2009, la Ligue avait reporté au dernier moment la rencontre au Vélodrome pour cause de grippe aviaire chez trois joueurs parisiens, alors que les supporters parisiens étaient déjà présents à Marseille. Il y eut de nombreux dégâts matériels, plusieurs blessés dont un Parisien renversé sciemment par une voiture. Mais cette fois-ci, ce soir de février 2010, il n’y aura pas de bagarres entre Marseillais et Parisiens. À la place, un climat de tension couve entre les deux entités de supporters parisiens : Auteuil et Boulogne, deux tribunes culturellement très distinctes qui se sont longtemps respectées, jusqu’à ce que les relations pourrissent à partir de 2003 avec la montée en puissance d’Auteuil (bagarres en déplacements, provocations des deux côtés, notamment). À deux heures du coup d’envoi, environ 150 supporters, estampillés Boulogne, se dirigent vers le virage Auteuil avec la volonté d’en découdre. Après s’être donné rendez-vous en fin d’après-midi au bar Park’s Boulevard (16e arrondissement de Paris) avec d’autres supporters de la tribune Boulogne (qui ont, eux, décidé de rejoindre leur tribune), ils contournent le dispositif policier jusqu’à arriver devant le virage Auteuil et tapent sur tout ce qui se présentent à eux. Alertés par la situation, de nombreux membres du virage Auteuil (et de la tribune G), qui étaient déjà dans les gradins, quittent leur tribune pour mener une contre-charge. Le tout, sous les yeux des CRS qui n’interviennent pas. Très rapidement, Auteuil se retrouve en surnombre. Les supporters de Boulogne battent en retraite. Pris dans la bagarre, mis au sol, tabassé, Yann Lorence, trente-sept ans, abonné de longue date de la tribune Boulogne, ne se relèvera pas. Il tombe dans le coma et sera déclaré « cliniquement mort » le 17 mars 2010.
La vidéo qui suit est filmée depuis la tribune G, le quart de virage qui jouxte Auteuil :
Membre de la Casual Firm
Yann Lorence était-il de la première charge initiée par les 150 supporters de Boulogne ? Si l’homme était bien un membre historique de la Casual Firm, l’une des principales bandes de hooligans de Boulogne, les sources du Kop of Boulogne soutenaient à So Foot en 2010 qu’il s’était « rangé » et qu’il ne faisait pas partie de la première charge (So Foot #75). Au contraire de ce qu’affirmaient alors les échos venus de la tribune Auteuil. Six ans et demi après les faits, les accusés, Romain L., trente-sept ans, et Jeremy B., trente-cinq ans, comparaissent devant la cour d’assises de Paris jusqu’au 30 novembre pour « violences volontaires commises en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner » . Ils encourent jusqu’à vingt ans de prison.
Par Florian Lefèvre