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C’était Arjen d’Oranje…

Par Matthieu Rostac, à Amsterdam
C’était Arjen d’Oranje…

Mardi soir, Arjen Robben a quitté le football international par la petite porte, mais paradoxalement, avec beaucoup de dignité. Capitaine courage, remuant attaquant et unique buteur du match, le joueur du Bayern Munich referme une parenthèse de quatorze ans et 96 sélections. Flashback de ses « meilleurs » moments en équipe des Pays-Bas.

Après une dernière victoire inutile face à la Suède (2-0) et un dernier doublé, Arjen Robben a donc décidé d’arrêter les matchs avec l’équipe nationale néerlandaise. À 33 ans, 96 sélections et 37 buts. Il aurait probablement pu poursuivre une paire d’années pour continuer de rassurer une nouvelle génération batave qui en a grandement besoin et gratter le symbolique cap des 100 sélections au passage. Il aurait également pu se barrer sur une bonne note juste après l’inattendue troisième place des Pays-Bas au Mondial 2014, son meilleur « souvenir en sélection » devant la finale de 2010 « parce que le groupe était spécial, soudé » . Mais non, Arjen Robben n’est pas fait de ce bois. Derrière cette réputation d’individualiste – pas forcément usurpée – sur un terrain de foot, l’homme de verre est également quelqu’un d’altruiste, au sens du sacrifice insoupçonné. Leader informel du vestiaire oranje depuis 2012, l’ailier du Bayern Munich avait ravi le cœur et le mental de ses coéquipiers à défaut d’un brassard laissé gracieusement à Van Persie jusqu’en août 2015. Puis, il est devenu capitaine de cette équipe néerlandaise qui n’est pas parvenue à se qualifier pour deux compétitions internationales consécutives, une première au pays depuis 1986.

Robben déteste perdre, mais il a dû accepter l’idée et, surtout, ne l’a jamais fui. Voilà pourquoi il a décidé de sortir par la petite porte mardi soir face à la Suède, après avoir tout donné une ultime fois. Don Quichotte des éliminatoires à la Coupe du monde 2018, il devait marquer sept buts à son adversaire du soir pour espérer accrocher les barrages. Il en a marqué deux avant d’entamer un tour d’honneur. Il laisse désormais la place à la « jeunesse » , encore une preuve d’altruisme qui n’y ressemble pas. Avoir Robben dans sa sélection, c’était maintenir les apparences. La meilleure chose à faire pour laisser Wijnaldum, Janssen et Blind manger leur pain noir et prendre enfin leurs responsabilités internationales, c’était de partir. Alors Robben s’en est allé. En laissant derrière lui quelques bons souvenirs, quand même.

Pays-Bas 1-1 Portugal, 30 avril 2003

Un match anodin, mais pas tout à fait. Alors que la fin de saison se profile, Dick Advocaat a décidé de tester deux des nouveaux joyaux de la Couronne batave : Arjen Robben et Wesley Sneijder, respectivement 19 et 18 ans. Le joueur du PSV avait alors remplacé Marc Overmars, celui de l’Ajax de Phillip Cocu. Quatorze ans plus tard, Robben et Sneijder décident de partir au même moment – le joueur de l’OGC Nice devrait annoncer son choix très prochainement.


Pays-Bas 2-3 République tchèque, 19 juin 2004

L’histoire retiendra que Milan Baroš sera élu homme du match de cette seconde rencontre du groupe D de l’Euro 2004 au Portugal. Pourtant, Arjen Robben aurait très bien contester cette décision, lui qui délivre en une mi-temps deux passes décisives pour Wilfried Bouma puis Ruud van Nistelrooy. Pis, un choix incompréhensible de Dick Advocaat oblige le nouveau joueur de Chelsea à sortir à la 58e minute, remplacé par Paul Bosvelt. À ce moment du match, les Pays-Bas mènent 2-1. Ils perdront finalement 2-3 et Robben deviendra de facto un prétendant sérieux dans le onze de départ oranje.

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Serbie-et-Monténégro 0-1 Pays-Bas, 11 juin 2006

Chez le voisin allemand, les Pays-Bas entament leur Coupe du monde face à la Serbie-et-Monténégro, difficile et accrocheur adversaire. Seul Robben parviendra à faire exploser le verrou balkanique à la 18e minute après avoir mangé les défenseurs à la course sur vingt-cinq mètres. L’ailier de Chelsea sera auréolé du titre d’homme du match, avant de récupérer une deuxième fois le sésame face à la Côte d’Ivoire. Une montée en puissance arrêtée net par l’ouverture de la boucherie néerlando-portugaise en huitièmes de finale.


France 1-4 Pays-Bas, 13 juin 2008

À l’Euro 2008, la poule C n’avait de « groupe de la mort » que le nom pour les Pays-Bas. Après avoir dégusté l’Italie (3-0) lors du premier match, les Oranje avaient écrasé la France. Durant ce match, Robben débute sur le banc, plus forcément favori dans le 4-2-3-1 de Marco van Basten en raison d’une première saison compliquée au Real Madrid. Rentré à la mi-temps, Robben offre le second but à Robin van Persie avant de terroriser Grégory Coupet : parti sur le côté gauche de la surface française, l’ailier hollandais balade Lilian Thuram avant d’envoyer une mine surpuissante dans un angle impossible. Sa réussite puis sa célébration, mélange de surprise, de nonchalance et d’arrogance, sont encore imprimées dans la mémoire des Bleus tel un violent flash-back du Vietnam.

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Pays-Bas 0-1 Espagne, 11 juillet 2010

62e minute de la finale de Coupe du monde entre l’Espagne et les Pays-Bas à Johannesburg. Aux cinquante mètres, Sneijder trouve une ouverture limpide pour Robben, parti dans le dos de la défense. Le joueur du Bayern Munich prend à contre-pied Casillas, qui parvient néanmoins à détendre sa jambe pour détourner de justesse le ballon en corner. Le reste, c’est Robben qui nous le racontait en juin 2015 : « Je pense que c’est quelque chose qui me suivra toujours, toute ma vie. Mais après, c’est une action comme une autre. À ce moment-là, on ne pouvait pas savoir que ce serait aussi décisif. Après tout, ce n’était pas la dernière minute de jeu, il restait une demi-heure à jouer. Je n’y pense pas tout le temps, sauf quand on m’en parle ou quand je vois les images à la télévision. Ce n’est pas un sentiment très agréable, mais tu dois vivre avec ça. »

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Pays-Bas 6-0 Irlande du Nord, 2 juin 2012

Dans ce match amical préparatoire à l’Euro 2012, les Pays-Bas déroulent face au sparring partner nord-irlandais et aux gants en peau de pêche de Roy Carroll. Robben, plus adepte de la vitesse et de la ligne droite que du tricot au point de corner, réalise un geste que l’on ne lui soupçonnait pas : un petit pont sur l’infortuné Andy Little. Ce jour-là, ce n’était pas Will Grigg qui était en feu.


Espagne 1-5 Pays-Bas, 13 juin 2014

De ce match « retour » de la Coupe du monde 2014, on se rappelle surtout de la suspension en vol de Robin van Persie à la suite de l’ouverture « Frankdeboeresque » de Daley Blind. Confrontation dans la confrontation, Robben a lui exorcisé ses démons en marquant par deux fois face à Casillas. À chaque fois, il a fait joujou avec la défense espagnole et les appuis du portier madrilène.

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Pays-Bas 2-1 Mexique, 29 juin 2014

Même s’ils ont remporté le match, les Pays-Bas ne se sont jamais autant fait martyriser pendant la Coupe du monde brésilienne que lors de ce huitième de finale contre le Mexique. D’ailleurs, le but victorieux est un penalty inscrit par Huntelaar en toute fin de match, généreusement accordé pour une faute de Rafael Márquez sur… Arjen Robben, qui réalise un saut de carpe parfaitement exécuté, le troisième du match. Oui, l’ailier du Bayern plonge beaucoup. Lui-même l’a aisément reconnu en conférence de presse d’après-match au micro de NOS. Ou presque : « La faute de fin de match, il y avait bien penalty, mais l’autre, en première mi-temps, était bien une simulation. Je devrais arrêter de faire ça. »

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Pays-Bas 2-0 Suède, 10 octobre 2017

L’entreprise était quasi impossible puisque la Suède devait en prendre sept dans le buffet pour laisser les Pays-Bas lui passer sur le corps. Robben himself avait qualifié cette éventualité de « miracle » . Le miracle n’a jamais eu lieu, mais a vite été remplacé par un beau jubilé pour l’ailier du Bayern Munich, auteur de deux buts qui pourraient symboliser sa carrière : une vilaine panenka foirée, puis une frappe des vingt mètres aussi puissante que somptueuse venue secouer le petit filet d’Olsen. Malgré l’échec, malgré la frustration, malgré la pression retombée, Robben n’a pas pleuré quand il a fait ses adieux. Robben, c’est un gars de Bedum, un gars du Nord. Et un gars du Nord ne pleure pas, tout simplement parce qu’il incarne le pragmatisme. La raison pour laquelle il lâchera cette punchline en guise d’épitaphe internationale : « C’est l’homme de verre qui aura duré le plus longtemps. »

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