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C’est quoi cette histoire de match truqué entre Bordeaux et Ventspils ?
Lorsque le Haillan s’est réveillé ce vendredi matin au gré des coupures de presse en cyrillique faisant état d’un potentiel match truqué vieux de trois ans entre les Girondins et les Lettons du FK Ventspils, le rire a de nouveau viré au jaune écarlate. Si Bordeaux n’a rien à voir dans l’histoire, cette mauvaise publicité n’est pas vraiment bienvenue.
Un drop de Hwang, un rush de De Préville ou une intervention manquée et musclée de Mexer. Qu’il semble loin, le prolifique duo Gourcuff – Chamakh. Sans réalisation notable depuis leur quart de Ligue des champions en 2010, les Girondins de Bordeaux attendent désespérément leur révolution interne. Sous pavillon américain, le scapulaire souffre déjà assez saison après saison, emboîtant erreurs de casting et échecs sportifs. Un an après avoir troqué leur emblème historique contre un logo bon marché, les Bordelais en viennent même à trembler pour leur place en Ligue 1. Et maintenant les voilà liés, de très loin certes, à une suspicion de match truqué en terre lettone.
Le retard à l’allumage de l’UEFA
Juillet 2018, deuxième tour préliminaire de Ligue Europa. Bordeaux est amené à croiser le fer avec la modeste formation lettone de Ventspils, habituée des tours de qualification folkloriques et participante à la phase de groupes de l’édition 2009-2010. Les Marine et Blanc l’emportent 1-0 devant l’unique tribune du stade local proche de la Baltique, grâce à un coup franc précoce de Zaydou Youssouf (3e minute). La qualification sera bouclée une semaine plus tard au Matmut Atlantique, sans faire de vagues (2-1).
Trois ans après la double confrontation, voilà que l’UEFA a annoncé ouvrir une enquête sur le déroulement du match aller dans le port letton jumelé avec Lorient, expliquant se baser sur des suspicions de trucage. À l’origine de l’information, une agence de presse russe, la RIA Novosti : des mises anormalement élevées sur la rencontre via divers sites de paris sportifs auraient été placées (la classique, quoi), et l’arbitre de la rencontre approché par des individus malintentionnés, pour changer le cours de la rencontre. Écoutes téléphoniques à l’appui, le constat semble assez accablant pour Sergey Lapochkin, bien qu’aucune erreur manifeste n’ait été relevée par les observateurs. Réputé pour ses penaltys controversés accordés à tort et à travers (11 en 15 matchs de Premier Liga russe cette saison) et sa distribution de biscottes en pagaille, l’officiel a été suspendu 90 jours à titre provisoire et risque une fin de carrière anticipée. Les signes avant-coureurs, eux, étaient réels.
À Ventspils, entre habitude et récidive
Juste avant d’obtenir son sésame pour affronter Bordeaux, Ventspils avait écarté les Albanais du Luftëtari Gjirokastër (5-0 et 3-3), d’une manière assez… suspecte. Un match aller à sens unique et un retour débridé : deux buts dans les arrêts de jeu pour retourner le score, une défense albanaise transformée en passoire pour l’occasion, à l’arrêt presque et suivant un alignement de poussins, ainsi que des alertes rouges relatives aux sommes placées sur la rencontre. Déjà. À l’époque, l’UEFA avait enclenché le silence radio. Pourtant, comme le relate la presse lettone, le comportement des vingt-deux acteurs, entre indignation virulente et justifications cousues de fil blanc, avait de quoi mettre la puce à l’oreille.
Pour couronner le tout, disons que le FK Ventspils jouit de sa petite réputation de récidiviste en la matière. Son président, Adlan Shishkhanov, est un amateur de pétrole et de fourrure. Capo dei capi depuis février 2018, ce citoyen russe a coulé l’emblématique club moldave de Dacia Chișinău en 2017, avant de quitter le navire face aux accusations de corruption. Faire arrêter ses joueurs ne lui aura pas suffi : arrivé en Lettonie, pays encore fortement russophone, il y a repris ses habitudes. Shishkhanov est aujourd’hui toujours à la tête du FKV, même si le club pointe désormais à la dernière place de Virslīga (8e sur 8) et se retrouve bien loin des joutes européennes. Dans l’équation, on n’oubliera pas non plus le passif des clubs albanais, avec la suspension drastique appliquée à leur club phare des années 2010. Un sacré cru.
Par Alexandre Lazar