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Ces matchs à revoir en période de quarantaine
Alors que suivre le foot est devenu au fil du temps « un métier, une vie parallèle » comme l’expliquait il y a quelques années l’écrivain anglais Nick Hornby, la période de confinement offre la possibilité de se souvenir et de ressortir certaines madeleines rangées dans nos esprits.
Le classique : Roumanie 3-2 Argentine – Quart de finale de la Coupe du monde 1994
Buts : Dumitrescu (11e, 18e) et Hagi (58e) pour la Roumanie // Batistuta (16e sp) et Balbo (75e) pour l’Argentine
Au matin du 3 juillet 1994, impossible de deviner que le monde s’apprête à vivre les 90 plus belles minutes de la Coupe du monde qui se joue aux États-Unis, notamment sous le cagnard irrespirable de la Californie. Comment l’anticiper d’ailleurs ? Car si la Roumanie a dominé son groupe grâce à ses contre-attaques télépathiques, elle a aussi été réduite en miettes par la Suisse lors du premier tour (1-4). Dans le même temps, l’Argentine s’est d’abord amusée avec la Grèce et a dominé le Nigeria, avant de glisser face à la Bulgarie de Stoichkov. Résultat, avant ce huitième de finale de Coupe du monde, il y a de la curiosité, mais aussi cette donnée : suspendu pour dopage après deux matchs de compétition, Diego Maradona va suivre la rencontre au milieu de la tribune de presse du Rose Bowl de Pasadena. À cela, il faut aussi ajouter l’absence de Claudio Caniggia, double buteur face aux Nigérians lors de la phase de poules. Et alors ? Le plateau reste délicieux et la Roumanie déboule à la foire avec un objectif affirmé : prouver qu’elle possède à cet instant la plus belle génération de son histoire et qu’elle n’est pas là pour jouer les poupées gonflables. La suite est l’histoire d’un grand match, d’un type né à la campagne, comme Benjamin Nivet, soit dans un univers sauvage, venu porter ses potes au cœur d’un tour de force philosophique. En 58 minutes, Gheorge Hagi décroche les projecteurs, et la Roumanie inscrit trois buts à l’Argentine, alors menée 3-1 et qui ne recollera jamais (Abel Balbo réduira malgré tout le score à l’attaque du dernier quart d’heure). Aujourd’hui encore, tout le monde en est persuadé : cette équipe méritait plus qu’une défaite aux tirs au but au tour suivant face à la Suède. Reste que ce jour-là en Californie, il n’y avait qu’un Maradona. Le vrai, celui des Carpates.
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Le western : Italie 4-3 RFA – Demi-finale de la Coupe du monde 1970
Buts : Boninsegna (8e), Burgnich (98e), Riva (104e) et Rivera (111e) pour l’Italie // Schnellinger (90e) et Müller (94e, 110e) pour la RFA
Cette demi-finale du Mondial 70 reste le plus beau duel de chasseurs de primes de l’histoire du football, du genre où l’on se tache le froc et où l’objectif est de rafler la mise, peu importe la manière. Forcément, au casting, il y a l’Allemagne, cette Allemagne qui se pointe toujours dans les sommets. Elle aura été là à Berne, en 1954, pour piéger la Hongrie en finale. Elle aura aussi été là en 1982, à Séville, pour coller des cauchemars au fond des crânes français pour l’éternité. Mais elle aura donc été aussi là en 1970, à Mexico, pour jouer « le match du siècle » avec l’Italie, duquel une image ressort immédiatement : celle d’un Beckenbauer avec le bras en écharpe et l’épaule pétée. Pourtant, cette demi-finale est aussi une histoire de boulettes et de séquences alternatives. Au Mexique, il fait chaud, Gerd Müller fond – l’histoire raconte qu’il aurait perdu sept kilos au cours du match –, mais aucun acteur ne veut lâcher le steak. Encore moins lors d’une prolongation d’anthologie, où tout explose. Müller renaît, Burgnich lui répond, Riva enchaîne, puis Müller surgit de nouveau et c’est à Rivera que revient l’honneur de planter le coup fatal. Derrière, l’Italie restera invaincue en compétition officielle face à l’Allemagne durant 46 ans. Merci Darmian, Zaza, Pellè et Bonucci.
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L’historique : Milan 5-0 Real Madrid – Demi-finale retour de la C1 1989
Buts : Ancelotti (19e), Rijkaard (25e), Gullit (45e), Van Basten (49e) et Donadoni (60e) pour le Milan.
On disait l’Italie conservatrice, la voilà explosive. Aux fourneaux : Arrigo Sacchi. Sur la table : son Milan, revenu de Madrid quatorze jours plus tôt avec un bon nul (1-1). Ainsi, tout doit se jouer au retour, à San Siro, et c’est parti. Dans l’assiette, il y a tout : le pressing coordonné et agressif, le bloc haut, le piège du hors-jeu parfaitement maîtrisé, une gestion savante des zones et la conviction que quelque chose de grand est en train de naître alors que le Real court après une victoire en C1 depuis 1966. D’ailleurs, on ne parle pas de n’importe quel Real, mais bien de la Quinta del Buitre, la bande qui a remporté cinq Liga consécutives, deux C3 et qui a la possibilité de remporter la septième C1 de son histoire dans le salon du Barça, au Camp Nou, quelques semaines plus tard. Sacchi, lui, vit sa deuxième saison à Milan, mais n’a pas le temps. Parfait, Berlusconi n’en a pas non plus. Alors, ce 19 avril 1989, tout va aller plus vite, plus fort, dans un mélange de génie et de synchronisation collective qui voit le Milan broyer le Real (5-0) en soixante minutes. Pour comprendre, il faut le voir. Bonne leçon.
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Le one-man-show : Brésil 0-1 France – Quart de finale de la Coupe du monde 2006
But : Henry (57e) pour la France.
Chacun son chef-d’œuvre. Diego Maradona aura eu sa Belgique 1986, Zidane tient dans sa poche son Brésil 2006. Peut-être parce qu’il refusait de grandir et donc ici de partir, ZZ avait ce souhait de rester le plus beau, le plus propre, le plus génial, partout, tout le temps. Ce quart de finale de la Coupe du monde 2006 est sa merveille, son moment de génie absolu, son match XXL. Au cours de la saison, il n’avait pourtant pas montré grand-chose avec le Real, se pointant même sec comme un coucou au début de la préparation. Et alors ? Zizou avait tout gardé pour faire décoller les Bleus et remonter sur le toit du monde. Il sera finalement tombé dans la course au titre de plus grand joueur de l’histoire sur un coup de tête lâché sur Materazzi en finale. Peu importe, gardons plutôt le Zidane de Francfort, mais aussi l’immense prestation défensive des Bleus. Amen.
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Le thriller : Chelsea 4-4 Liverpool – Quart de finale retour de C1 2009
Buts : Drogba (51e), Alex (57e), Lampard (76e, 89e) pour les Blues // Aurélio (19e), Alonso (28e sp), Lucas Leiva (81e) et Kuyt (83e) pour les Reds
Là aussi, ça pète dans tous les sens. Ce quart de finale retour de la Ligue des champions 2009 est même une publicité parfaite pour la Ventoline. Vainqueur autoritaire à Anfield lors du match aller (1-3) grâce notamment à un doublé d’Ivanović, Chelsea se retrouve mené, six jours plus tard, de deux buts à la pause. Alors, dans les allées du Bridge, ça tremble de partout. Sur son banc, Guus Hiddink n’est pas serein et a déjà réagi, à neuf minutes de la mi-temps, en lançant Nicolas Anelka à la place de Salomon Kalou. Oui, le même Anelka qui va délivrer deux passes décisives en seconde période et ainsi sortir les Blues d’une sale histoire, où Petr Čech s’est notamment noyé et où Pepe Reina n’a pas été beaucoup plus impérial. Une histoire qui aura malgré tout vu Liverpool mener 3-4 à sept minutes de la fin, avant que Frank Lampard ne vienne éteindre les braises. Délirant.
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L’indépendant : Torino 2-3 Bastia – 8e de finale retour de la C3 1978
Buts : Graziani (22e, 47e) pour le Toro // Larios (19e) et Krimau (50e, 65e) pour Bastia
Le foot à son essence : de la brume, du froid, des panneaux publicitaires Martini et Club Med, des supporters bouillants… Ça, c’est le Torino-Bastia de décembre 1977, un sommet dingue pour le club corse, qui vit alors la deuxième campagne européenne de son histoire et qui doit se fader un Torino blindé d’internationaux, mais surtout champion d’Italie au printemps 1976. De quoi faire peur au Sporting ? Pas le moins du monde, car rien ne fait peur aux Bastiais, qui sont allés gagner sur le terrain du Sporting Portugal (1-2) au premier tour et à Newcastle (1-3) au second. À l’aller, à Furiani, les Corses ont surtout assuré l’essentiel (2-1) grâce principalement à leur duo Papi-Rep. Mais le Torino chez lui, c’est autre chose et c’est notamment aucune défaite concédée dans son antre depuis le début de saison. Pas de peur non plus : à la dix-neuvième minute, au bout d’une action collective délicieuse, Jean-François Larios fait sauter les ampoules d’une reprise de volée délicieuse. La suite, c’est Graziani qui inscrit un doublé et Abdelkrim Merry « Krimau » qui lui répond. C’est surtout l’histoire.
Le match aller en entier (le retour n’existe pas encore en intégralité, malheureusement), c’est par ici.
Celui à projeter sur le mur de son immeuble pour en faire profiter ses voisins : FC Barcelone 5-0 Real Madrid – 13e journée de Liga
Buts : Xavi (10e), Pedro (18e), Villa (55e, 58e), Jeffrén (90e) pour le Barça.
Parce qu’on n’a jamais fait mieux.
Le match en entier, pas le choix, ici.
Par Maxime Brigand