- Journée mondiale des espèces menacées
Ces espèces menacées qu’il faut préserver
Par Kevin Charnay
5 minutes
Ce vendredi, c’est la journée mondiale des espèces menacées. Et il n’y a pas que les koalas qui sont en voie d’extinction. Dans le football aussi, certains spécimens attachants tendent à disparaître.
Le numéro 10 à l’ancienne
Qu’est-ce qui menace son éco-système ?Le numéro 10 à l’ancienne est le héros de son équipe, celui qui dicte le tempo, celui qui doit débloquer la situation sur un coup de génie. Mais ce qui le rend si élégant, c’est qu’il le fait avec une certaine nonchalance. Le numéro 10 à l’ancienne n’est pas forcément costaud, mais on ne peut pas lui prendre le ballon lorsqu’il décide de le protéger. Il n’est pas rapide, mais il peut effacer n’importe qui en un contre un. Tout simplement parce qu’il est doté d’une technique surnaturelle et d’une intelligence de jeu hors norme. Or, dans un football de plus en plus exigeant physiquement, il n’a plus le temps de souffler. Ce qui le condamne à mourir par suffocation. Comment endiguer son extinction ?Le numéro 10 n’est pas une espèce qui vit en meute, à la différence des loups ou des milieux défensifs. C’est ce qui le rend si fragile, mais aussi si unique. De fait, il est difficile pour lui de survivre, mais il peut aussi réserver la bonne surprise de grandir n’importe où dans le monde (avec une petite préférence pour l’Argentine et l’Italie). Pour favoriser le développement d’un meneur de jeu à la classe inégalable, il faut le mettre dans les meilleures conditions possibles. S’adapter à lui, lui garantir des réserves naturelles protégées dans les centres de formation. Et il le rendra au centuple.Le latéral qui sait défendre
Qu’est-ce qui menace son éco-système ?L’extinction de cette espèce est bien plus brutale que pour les numéros 10 à l’ancienne. Dans les années 1990, une météorite s’écrase sur la planète des latéraux qui font de la défense leur priorité. Elle s’appelle Roberto Carlos. Le Brésilien débarque en Europe avec de nouvelles caractéristiques. Plus contre-attaquant que défenseur, il apporte offensivement ce qu’aucun latéral avant lui n’a apporté. Des qualités de vitesse et de percussion si impressionnantes qu’on en oublie ses lacunes défensives. Une particularité qui est devenue la norme aujourd’hui. Comment endiguer son extinction ?Des études prouvent que certaines plantes s’épanouissent mieux si on leur montre de l’affection. Eh bien, il en est de même avec les latéraux. Longtemps considéré comme le poste le plus ingrat du football, le latéral a souvent été rangé dans la case « pas assez bon pour être ailier » . Dans la cour de récré, personne ne veut être arrière droit. Alors aujourd’hui, pour flatter son ego, le latéral se prend pour un attaquant. Il faut aussi s’enflammer sur un bon tacle ou sur un replacement irréprochable.L’ailier de débordement
Qu’est-ce qui menace son éco-système ?Il arrive que l’avénement d’une espèce précipite l’extinction d’une autre. C’est exactement ce qui est en train d’arriver pour l’ailier de débordement. Depuis que les latéraux sont devenus des attaquants, ce sont eux qui ont la charge de déborder sur le côté à toute allure et de centrer. Les ailiers de débordement, qui occupaient autrefois cette tâche, ont donc été contraints à muter en ailiers à repiquer. À l’image d’un Gareth Bale autrefois illustre bouffeur de ligne dans son couloir gauche, qui repique désormais sans arrêt dans l’axe pour frapper dans le couloir droit. Et aujourd’hui, absolument tous les ailiers jouent comme ça. Comment endiguer son extinction ?Pour qu’une espèce en voix d’extinction puisse survivre, il faut lui donner de l’espace, loin de la cohue générale. Ainsi, pour que l’ailier de débordement puisse s’épanouir tranquillement, il faut lui libérer les couloirs. Ainsi, fini les latéraux trop offensifs qui viennent empiéter sur son territoire. Place au bon vieux 3-5-2, qui permet aux deux hommes des côtés d’avoir le champ libre pour s’amuser. Après, c’est aux ailiers de débordement de s’adapter pour se transformer en pistons, s’ils ne veulent pas se faire éliminer par les latéraux offensifs.L’entraîneur en survêtement
Qu’est-ce qui menace son éco-système ?Luis Aragonés, Vicente del Bosque, Guy Roux, Élie Baup, Éric Gerets, Marcelo Bielsa… Les vieux dinosaures portaient le survêtement. Et c’était génial, car ils montraient que le football est encore une affaire de terrain. Mais les jeunes loups sont arrivés, aussi bien au niveau international avec Pep Guardiola ou José Mourinho, qu’au niveau national avec Claude Puel ou Rudi Garcia. Des mecs qui portent le costume car ils représentent leur club d’un point vue marketing également. Une simple affaire de génération. Comment endiguer son extinction ?Contrairement aux espèces précédemment citées, il semble n’exister aucune chance d’éviter l’extinction de l’entraîneur en survêtement. Le dernier représentant de l’espèce, Marcelo Bielsa, est en train de mourir petit à petit dans le milieu du football. La seule chance que son espèce survive, c’est qu’il ait laissé un enfant caché quelque part. Il s’appelle peut-être Maurizio Sarri. Protégeons-le vite de ce monde de fou.
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Par Kevin Charnay