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Cédric Hountondji : « Je me verrais bien développeur informatique »
Défenseur indispensable de Clermont (actuel 3e de Ligue 2) où il a enfin trouvé une certaine stabilité à l'heure de souffler sa 27e bougie, Cédric Hountondji revient sur son goût des études et sur son insolite parcours (Bretagne, Berry, Corse, États-Unis, Bulgarie...) qui lui a ouvert les yeux sur la notion d'expérience. Entretien avec une tronche discrète, qui se verrait bien entamer une carrière dans l'informatique après celle de footballeur.
Il paraît que durant tes jeunes années, la scolarité était hyper importante pour toi. D’où ça te venait ?Mes parents – mon père en particulier qui était strict – étaient tournés vers les études et vraiment à cheval là-dessus. Pour eux, il était inconcevable que je n’obtienne pas mon baccalauréat. Donc j’ai bûché à fond pour avoir mon bac S option biologie, avec une moyenne de 11,5. J’étais notamment avec Pierre-Yves Hamel, c’était au centre de formation de Rennes et on travaillait le soir après les entraînements. Pas si facile que ça… Ma mère était aide à domicile et mon père militaire, donc peut-être que cette rigueur venait de là.
Tes parents envisageaient un certain cursus ?Pas du tout, ils voulaient juste que j’aie un minimum de bagage pour trouver un métier. Ils étaient assez inquiets, mais il ne m’ont jamais parlé d’une profession en soi. J’étais assez libre dans mes choix.
Vous deviez dénoter un peu, avec Hamel.Je pense que les autres se demandaient comment on trouvait le temps de suivre des études compliquées, et nous prenaient un peu pour des tronches. Mais attention, ce n’était pas une question d’intelligence. Juste de l’envie.
Après, tu t’es intéressé au droit, c’est ça ?Ouais, droit du sport. Avec Pierre-Yves, on est allé à un seul cours ! On voulait s’inscrire, mais on n’y est jamais retourné vu que les horaires ne correspondaient pas avec ceux des entraînements. Peut-être qu’on aurait pu continuer en faisant des cours à distance, mais notre carrière était en jeu, donc on en a fait notre priorité.
Tu te vois reprendre des études, une fois que le football sera fini ?J’ai déjà repris des études, à distance justement, pour devenir développeur informatique. Ça fait six mois, maintenant. J’avais déjà touché un peu quand j’étais plus jeune, mais je suis encore loin du compte.
C’est assez rare de combiner foot professionnel et étude, non ?Pas tant que ça, je crois. Il y en a, mais ils n’en parlent pas. Avec l’UNFP, il y a une branche reconversion qui permet à beaucoup de reprendre l’enseignement. Tu as l’impression qu’on est peu, mais il y en a plein qui préparent leur reconversion. Même si, c’est vrai, c’est souvent dans la branche du foot. Moi, mon truc, c’est de réaliser des vidéos, les modifier, faire des montages, créer des sites Internet ou des applications… J’adore l’informatique, et j’aimerais me tourner vers ça lorsque j’aurai raccroché plutôt que de continuer dans le milieu du sport.
Tu n’es pas un amoureux du foot ?Si, j’aime le foot. Mais je pense que c’est intéressant de voir autre chose, et j’ai le temps pour passer des diplômes dans le domaine informatique. Alors, pourquoi pas ?
Et analyste vidéo ?Ah non, ça ne me botte pas du tout ! Pourtant, j’utilise énormément la vidéo. Je regarde tous mes matchs après le coup de sifflet final, je regarde le placement de mes partenaires aussi. Les actions où l’on prend des buts, je ne sais pas combien de fois je les mate… Qui aurait dû être là, qui n’a pas respecté les consignes… J’essaye de décortiquer le truc, tu vois.
On en revient à la période scolaire, qui t’a entre autres appris la rigueur.Oui, il y a sûrement un lien avec l’éducation que j’ai reçue. Je suis un perfectionniste. J’ai besoin de savoir pourquoi j’ai été mauvais, mais aussi pourquoi j’ai été bon. Si tu observes comment tu t’es préparé et les raisons pour lesquelles tu as été performant, tu as toutes les chances de devenir régulier. Au fur et à mesure du temps, tu fais moins d’erreurs. Tu sais comment réagir dans telle ou telle situation : c’est ce que les gens appellent l’expérience. Dans une situation donnée, tu te rappelles que tu l’as déjà vécue et tu agis en fonction de ce qu’il s’était passé : c’est ça, l’expérience. Tu avais opté pour une passe en retrait qui avait mis ton équipe en danger ? Bah là, cette fois, tu dégages en touche. Le football, c’est ça : des situations qui se répètent, qui se répètent, qui se répètent… Et le but, c’est de ne pas faire la même erreur deux fois.
Des expériences, tu en as connu beaucoup. Tu viens de fêter tes 27 ans, mais tu as déjà pas mal bourlingué : Orléans, Rennes, Châteauroux, Auxerre, Ajaccio, Clermont, New York, Sofia, le Bénin… Tu es quelqu’un qui a la bougeotte ?Mon envie première n’a jamais été de voyager, plutôt de créer quelque chose sur le long terme dans un même club. Mais je n’ai pas eu cette chance, tout simplement. J’ai été prêté deux fois quand j’étais à Rennes, puis j’ai été mis à la cave au Gazélec où je ne jouais plus, le club voulait se débarrasser de moi. Je suis parti aux États-Unis, je n’ai pas joué du tout au début avec Patrick Vieira. Au bout de six mois, en guise de première titularisation, je me suis blessé… Donc non, mes choix n’ont pas été dictés par le goût du voyage. Ce n’était même pas une question d’argent, mon salaire américain n’était pas celui de David Villa par exemple.
Tu as désormais trouvé une stabilité à Clermont, où tu es posé depuis 2019. Tu dois apprécier…Oui, je kiffe. Mais mes aventures passées m’ont forgé un caractère, un mental d’acier. J’en garde du positif, je suis plus fort psychologiquement. Dans la tête, je suis désormais super costaud. Ça m’a aussi permis de découvrir différentes cultures, et d’apprendre l’anglais.
Et de comprendre que ta place était en France ?Oui, je crois. Je suis revenu en France parce que je me suis dit que l’étranger n’était pas si bien que ça. Ici, on a de bons championnats. Et socialement, on n’est pas à plaindre. Je ne parle même pas de la bouffe… Au départ, c’était compliqué aux States ! Donc je suis vraiment ravi à Clermont. Et si en plus, on peut monter en Ligue 1…
Propos recueillis par Florian Cadu