- Barcelone/Chelsea
- Un homme dans le match
Cech et mat
Sa place en finale, Chelsea la doit à son courage, à la réussite aussi, à son savoir-faire défensif, à Didier Drogba aussi, et surtout, à Petr Cech, sans qui rien n'aurait été possible.
Quand Messi s’est élancé pour tirer le pénalty qui devait liquider la demi-finale, on s’est dit que Petr Cech était sacrément grand. Sur sa ligne, le géant tchèque s’agitait, ruse grobbelaardesque pour perturber le triple Ballon d’or, mais aussi, manière de bien exhiber l’impressionnante étendue de son envergure. Face à un tel animal, permis était de douter pour le frappeur, et de considérer également que la prise de risque devait être maximale. Alors Messi s’élança, frappa fort, et la barre repoussa sa tentative. Petr Cech n’a pas même effleuré le ballon, mais voyait là son impeccable demi-finale aller-retour, récompensée par la mise en échec du génie argentin.
Si la taille suffisait à faire le grand gardien, alors Gilles Roussey aurait été le meilleur de sa génération. Cech, en plus d’une envergure qui l’avantage évidemment, dispose surtout d’un sens du timing impeccable dans ses sorties, et d’une parfaite couverture de sa ligne de but. Témoin, cette frappe de Messi de la 83e minute déviée des bouts des doigts sur le poteau, à un moment où un but barcelonais aurait fait couler à pic le navire assiégé des Londoniens. Cech venait alors tout juste de signer une autre sortie aussi prompte que décisive.
Super-héros
Comme à Stamford Bridge, Cech avait enfilé au Camp Nou sa cape de super-héros. D’homme providentiel, de sauveur. Aussi bas soit placé le bloc de Chelsea, l’ex-portier du Stade Rennais savait qu’un lutin parviendrait de temps à autre à jaillir dans son dos, et qu’il faudrait alors bondir pour écourter le temps de réflexion de l’assaillant, et resserrer au maximum son angle de tir. De la théorie, Cech passa notamment à la pratique à la 19e minute, quand il contrait une frappe de Messi, génialement lancé dans la surface par une talonnade de Fabregas.
L’apport décisif de l’international tchèque se note d’autant plus, qu’en face, Victor Valdès a largement contribué à planter les siens. Un peu coupable sur le but de Drogba à Stamford Bridge, le double V a multiplié les maladresses au Camp Nou. On peut l’exonérer de tout reproche sur les buts anglais, quoique sa sortie pourrait être considérée comme prématurée sur la réduction du score de Ramires… A l’inverse, sa réaction trop tardive à la 16e minute a conduit à ce choc finalement synonyme de match écourté pour Piqué, et condamné Guardiola à bricoler en reculant Busquets. Un premier tournant du match.
Déjà discuté après sa prestation face au Real Madrid, Valdès a échappé de peu au lynchage quand son immense trouade (64e) ne fut pas mise à profit par Ivanovic. Face à tant de maladresse, de fébrilité, Cech paraissait encore plus solide, infranchissable, malgré deux buts encaissés sur lesquels il ne pouvait rien. En finale, Chelsea sera privé de pièces cruciales (Terry, Ramires, Meireles, tous suspendus). Mais Cech sera bien là. Avec son casque, et sa cape.
Par Thomas Goubin