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Ceballos à moëlle
Convoqué dans le groupe madrilène pour affronter son ancien club du Betis Séville, Daniel Ceballos va probablement jouer ses premières minutes en Liga sur la pelouse du Santiago-Bernabéu. Un honneur pour le joueur, tout aussi fan du Real Madrid que fervent opposant à l'indépendantisme.
Dès l’enfance en Andalousie, Dani Ceballos est certain d’une chose : il veut devenir footballeur pour porter le maillot du Betis Séville. Mais à l’adolescence, certains choix peuvent parfois amener au regret, voire à la honte. Une coupe de cheveux délirante, un jean orange pour lequel on avait une passion sans commune mesure, ou un amour inconditionnel pour les chansons de David Charvet. La fameuse erreur de jeunesse. L’assumer, c’est exister. Ce que Dani ne fait qu’à moitié. « J’ai eu la malchance de jouer pour le FC Séville (de 2004 à 2009, ndlr) » , avouait-il en 2014, dans l’émission El Pelotazo. À treize ans et après cinq saisons d’apprentissage chez le voisin honni, il tente déjà de se remettre à la poursuite de ses rêves. « En deuxième année chez les U13, le FC Séville m’a rappelé pour faire la présaison chez eux, mais j’ai refusé et je suis parti. » À Utrera, le troisième club du coin, dans la banlieue de Séville. Deux saisons qui lui serviront de tremplin pour enfin toucher son graal : la tunique verdiblanca.
« Faire taire ces chiens catalans et basques »
Moyennant un léger pourcentage sur l’éventuelle vente du prodige, le Betis flaire le bon coup et récupère le talent. Le rêve de gosse se concrétise, le story telling peut commencer. Surtout quand l’autre camp a le pardon difficile. L’affront est toujours présent chez les supporters des Palanganas, qui n’hésitent pas à brandir les mots « traître » ou « infidèle » à chaque derby sévillan. À croire que Dani Ceballos a toujours aimé la controverse, l’a toujours alimentée. Le 25 mai 2012, Dani, ses seize ans et son acné, sont devant la télé pour assister à la finale de Coupe du Roi entre l’Athletic Bilbao et le FC Barcelone au Vicente-Calderón. L’hymne national est copieusement sifflé des deux côtés du stade, et l’adolescent se rue sur son smartphone. « J’ai profondément honte devant ces sifflets envers l’hymne espagnol, gazouille-t-il, un brin énervé. Il faudrait envoyer une bombe au-dessus de ce stade pour faire taire tous ces chiens catalans et basques. » Quand même.
Une seconde erreur de jeunesse qui, cette fois, a fait jaser au moment de rejoindre le Real Madrid cet été pour 16,5 millions d’euros (dont 2,25 versés au FC Séville comme indemnité de formation). Surtout qu’après trois saisons pleines au Betis, Ceballos était également convoité par le Barça. Mais ça, c’était avant que les internets ne mettent en lumière son compte Twitter, où un second tweet datant du 1er juillet 2012 et directement adressé à Cesc Fàbregas et Gerard Piqué, a également fait mouche en Catalogne : « Vous n’avez pas honte de prendre une photo avec le drapeau catalan ? Dégagez du pays, les Catalans ! » Pas très Barça compatible, mais nettement plus aguicheur pour toute la branche nationaliste des socios du Real.
L’apprenti magicien
Côté terrain : Ceballos a fait sa première apparition en Liga contre la Real Sociedad dimanche dernier, au sein d’une Maison-Blanche qui aura forcément besoin de forces supplémentaires dans une saison où, en Liga comme en Champions, tous ses adversaires vont tenter la cambriole flingue à la main. En conférence de presse d’avant-match, Zinédine Zidane en était parfaitement conscient : « Dani peut jouer à plusieurs postes, c’est justement son point fort. Techniquement, c’est un garçon à l’aise avec le ballon, un joueur intelligent. Je le sens bien en ce moment, impliqué. » De là à le récompenser contre son club de cœur ? Si le Real fesse rapidement le suspense ce soir, sûrement. Pour Dani Ceballos, l’apprentissage du très haut niveau ne fait que commencer. Sur le pré, comme en dehors.
Par Antoine Donnarieix