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Ce jour où Charles Kaboré a cadré une frappe
Ce 21 mars 2010, au stade Vélodrome, l’Olympique de Marseille s’impose 2 à 1 face à l’Olympique lyonnais et continue sa course effrénée vers le titre de champion de France. Les buteurs du soir ? Taiwo et Kaboré. Une soirée à thème tireurs au pigeon et surtout, la dernière frappe cadrée par Charles Kaboré à ce jour.
« Putain de merde » . Plus qu’un simple élan de vulgarité, c’est un véritable tic de langage qui touche les supporters de l’Olympique de Marseille. Depuis 2007, à chaque frappe de Charles Kaboré, c’est le même réflexe. Dans les tribunes, on met ses mains autour de la tête, au cas où, et on dégaine la petite insulte. Sauf que ce 21 mars 2010, un peu plus de quatre mois après l’incroyable 5-5 qui a fait vibrer la France du football, le Burkinabé va réussir l’impensable : offrir un peu plus de bonheur à ses supporters. On joue l’heure de jeu d’un match décisif pour le titre de Champion de France, 0-0, le match est « ouvert » , selon Christophe Dugarry. Källström envoie une frappe dans les nuages. Sur l’attaque suivante, Kaboré hérite de la sphère au milieu du terrain, aux quarante mètres. Petite feinte de frappe – ouais, un type a cru qu’il allait frapper de là – levage de tête et boum boum Dioulasso. « Ça fait mouche » , crie Grégoire Margotton. Les supporters phocéens exultent. Ils n’en croient pas leurs yeux. Ils ont à moitié raison : la balle était contrée.
Moins précis que son coach à l’entraînement
Ses minuscules oreilles, poussée par le mistral, entraînent sa course folle dans les bras de Taye Taïwo. Charles Kaboré nage dans le bonheur. Un bonheur après lequel il court depuis. C’est décidé, son « Vélodrome 2010 » sera son « Anfield 2008 » . Alors il essaye, le salaud. Quand on le décale, en bout de course, après un crochet, de volée ou en ramasse-miettes, Charly tente sa chance, en vain. Il n’a plus marqué depuis ce but. Pire, il est devenu une sorte d’arroseur automatique, sur le côté droit comme dans l’axe, qu’il frappe ou qu’il centre. Une incapacité chronique à utiliser son pied qui avait d’ailleurs poussé Didier Deschamps à lui coller des exercices supplémentaires à l’entraînement. Charly devait enchaîner les transversales, mais affichait un pourcentage de réussite digne de Shaquille O’Neal aux lancers-francs, tandis que la Dêche lui assurait tranquille un 9/10. Malgré ça, il est aimé le Kaboré. Alors on s’y fait. On le regarde frapper et on se dit que sur un mal entendu, ça pourrait déboucher sur un corner. Et qu’un de ces jours, l’un de ses centres pourrait finir dans le petit filet opposé. Après tout, qui aurait cru, ce 21 mars, que le Burkinabé scorerait l’un des buts les plus importants de la saison ?
La cuisse bionique de Taye Taiwo
Car l’égalisation de Bafé Gomis quelques minutes plus tard n’y changera rien. Le dernier mot reviendra à Taye Taiwo qui, en deux temps, a troué le filet de Hugo Lloris avec sa cuisse bionique. L’OM, alors sixième de Ligue 1, s’impose, grimpe à la quatrième place et décroche le premier succès d’une série folle de sept victoires qui va mener les hommes de Didier Deschamps vers le titre. Une période dorée que les Phocéens regardent avec nostalgie aujourd’hui. Il n’y a qu’à comparer l’effectif actuel et l’effectif de l’époque pour avoir un peu envie de chialer. Le onze a une gueule aussi bonne que ce génie de Lucho González et sur le banc, aucune trace d’Apruzesse. En revanche, on trouve Hatem Ben Arfa, Brandão, Bakary Kone, Morientes et donc, Kaboré. Un joueur qui fait aujourd’hui partie des meubles et qui est apprécié à la sortie du parking de la Commanderie. Qu’on le veuille ou non. Et pourtant, tout le monde le sait, que sans ce tacle lyonnais, elle n’aurait ressemblé à rien, cette frappe.
Par Swann Borsellino